Toxicité expérimentale
Dans certains cas, les effets systémiques observés après exposition au fluorure de sodium peuvent être retenus, en raison de son métabolisme similaire à celui du fluorure d'hydrogène.
Toxicité aiguë
Le fluorure d’hydrogène est très toxique par inhalation et corrosif pour la peau et les yeux.
Espèce | CL50 |
Rat | 792 - 1909 mg/m3/1 h |
Souris | 279 mg/m3/1 h |
Cobaye | 3540 mg/m3/15 mn |
Singe | 1420 mg/m3/1 h |
Tableau 1. Toxicité aiguë par inhalation du fluorure d'hydrogène
L’exposition au fluorure d’hydrogène gazeux ou à des aérosols de solutions aqueuses produit une corrosion des muqueuses oculaires, cutanées et respiratoires avec lésions caustiques, perte de poids et détresse respiratoire même à faible concentration.
L’examen anatomo-pathologique des animaux révèle une ulcération bronchique, une hémorragie et un œdème pulmonaires, des lésions hépatiques et rénales, une hémorragie du thymus et une arythmie cardiaque liée à une hypocalcémie et une hyperkaliémie sériques.
Le fluorure d’hydrogène est caustique pour la peau du rat (50 μL d’une solution à 70 % pendant 1 min) provoquant érythème, œdème, vésication et nécrose progressant jusqu’au tissu musculaire ; la lésion cicatrise en 35 à 56 jours. L’application de 5 mL d’une solution à 5 % sur la peau du lapin pendant 4 heures provoque, 24 heures après l’exposition, la formation d’escarres et la destruction du tissu sous-jacent ; ces lésions ne sont pas réversibles en 14 jours. Aucun effet corrosif ou irritant n’est observé avec une solution à 1 %.
Les solutions à plus de 2 % sont corrosives pour l’œil du lapin.
Par inhalation, chez la souris, il induit une irritation respiratoire objectivée par une baisse de la fréquence respiratoire ; une RD50 a été établie à 110-123 mg/m3.
Toxicité subchronique, chronique
Une exposition prolongée au fluorure d’hydrogène provoque essentiellement une irritation accompagnée de lésions hépatiques, rénales, osseuses et dentaires.
L’effet majeur d’une exposition prolongée est une fluorose visible au niveau des dents (décoloration de l’émail, bouts cassants) essentiellement chez l’animal jeune. Des cavités de forme irrégulière ont également été observées dans les os de rats âgés de 12 mois (1mg/m3, 6 h/j pendant 1 mois).
L’exposition de rats pendant 14 jours, 6 h/j, 5 j/sem est létale à partir de 17,8 mg/m3 pour les femelles et 53 mg/m3 pour les mâles. Aux concentrations inférieures, on observe des modifications de poids corporel et des organes (foie, coeur, reins, poumons), des tremblements ainsi qu’une irritation respiratoire, nasale et oculaire.
Une exposition pendant 90 jours (0-0,1-0,72-7,52 mg/m3, 6 h/j, 5 j/sem) provoque chez le rat, à la plus forte concentration, une létalité ainsi qu’une baisse de poids relatif des organes, et, à concentrations non létales, une irritation respiratoire, oculaire et nasale, des malformations dentaires, des modifications hématologiques (augmentation des plaquettes et diminution du nombre de lymphocytes et de globules rouges) et biochimiques sériques (baisse du taux de glucose et d’albumine, augmentation du taux de potassium et de phosphore).
Une dégénérescence graisseuse du parenchyme hépatique avec foyers nécrotiques et invasion fibroblastique des espaces péri-portaux sont notés chez le cobaye (18 ppm, 6-7 h/j, pendant 50 jours) ; le lapin, exposé aux mêmes concentrations, développe une dégénérescence et une nécrose des tubes contournés rénaux.
Effets génotoxiques
Les données disponibles sur la mutagénicité des fluorures sont en faveur de l’absence d’effet génotoxique direct de l’ion F–.
In vitro, le test d’Ames sur bactéries est négatif pour les fluorures d’hydrogène et de sodium. Le fluorure d’hydrogène n’a pas été testé dans les cellules de mammifère ; en revanche, le fluorure de sodium donne des résultats positifs dans un grand nombre de tests (échanges entre chromatides soeurs, aberrations chromosomiques et synthèse non programmée de l’ADN).
In vivo, les tests pratiqués avec le fluorure d’hydrogène par inhalation sont équivoques (drosophile, tests de létalité récessive, +/– ; souris, test de létalité dominante, – ; rat, moelle osseuse, aberrations chromosomiques, +) ; ils présentent souvent des insuffisances méthodologiques ou sont insuffisamment détaillés. Les résultats obtenus avec le fluorure de sodium sont négatifs par voie orale chez le rat, la souris et le hamster. Quelques résultats positifs ont été obtenus par voie intrapéritonéale (ip) chez la souris.
Effets cancérogènes [7]
Les fluorures ne sont pas considérés comme cancérogènes pour l’animal par l’Union européenne (non classés), ils n’ont pu être évalués par le CIRC (groupe 3).
Il n’y a pas d’études publiées permettant d’apprécier la cancérogénicité du fluorure d’hydrogène.
Quatre études, réalisées avec le fluorure de sodium dans l’eau de boisson (0-25-100-175 ppm pendant 2 ans) ou dans la nourriture (0-4-10-25 mg/kg/j pendant 2 ans) du rat et de la souris, ne montrent qu’une augmentation marginale du taux d’ostéosarcomes chez les rats mâles exposés à l’eau de boisson.
Effets sur la reproduction
Peu d’études sont disponibles avec le fluorure d’hydrogène ; le fluorure de sodium diminue la fertilité du mâle mais n’a pas d’effet sur le développement du fœtus.
Fertilité
Une atrophie testiculaire a été observée chez des chiens exposés au fluorure d’hydrogène (18 ppm, 6 h/j, 6 j/sem, 5 sem) ; cet effet n’apparaît pas chez les lapins ou les rats.
Par voie orale, le fluorure de sodium est toxique pour la fertilité du mâle :
- chez la souris à partir de 4,52 mg F–/kg/j pendant 30 jours : baisse du comptage et de la mobilité spermatique, modification de l’épithélium germinal des testicules et de l’épididyme, anomalies des spermatozoïdes, y compris perte du flagelle ;
- chez le rat à partir de 2,26 mg F–/kg/j pendant 30 jours : baisse du comptage et de la mobilité spermatique ;
- chez le lapin à partir de 9 mg F–/kg/j pendant 30 jours : réduction de 70 % de la fertilité.
Développement
L’ion F– passe la barrière placentaire et pénètre dans le fœtus.
Le fluorure de sodium n’induit pas d’effet sur le développement du rat (jusqu’à 250 mg/L dans l’eau de boisson soit 10 mg F–/kg/j pendant 2 générations ou jusqu’à 200 mg/kg dans la nourriture du 1er au 20e jour de gestation) et du lapin (jusqu’à 400 mg/L soit 13,2 mg F–/kg/j du 6e au 19e jour de gestation) ; ces doses sont légèrement toxiques pour les mères (baisse de la prise de boisson, blanchiment des dents). Bien que l’ion F– atteigne le fœtus, la concentration est trop faible pour affecter la croissance osseuse.
Dans une étude plus ancienne, des injections ip de fluorure de sodium (15 mg/kg/j du 14e au 20e jour de gestation) provoquent chez le rat des malformations du squelette et des retards d’ossification des vertèbres et des sternèbres sans toxicité maternelle.