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Travail indépendant : comment prévenir les risques professionnels ?

Comment adapter les démarches de prévention pour mieux prendre en compte les spécificités du travail indépendant ? Émilie Aunis, chercheuse à l’INRS présente quelques éléments de réponses et les conclusions d’une étude dont les résultats sont présentés dans le numéro 181 de la revue Références en santé au travail.

Quelles sont les principales caractéristiques du travail indépendant ? 

Les indépendants sont avant tout des travailleurs non salariés : ils ne sont pas liés à un employeur par un lien de subordination. Cette population se caractérise par une forte hétérogénéité en termes de métiers (médecins, livreurs à vélo, etc.), de statuts (entrepreneurs individuels, microentrepreneurs, etc.), de secteurs d’activité, de niveaux de revenus. La part des travailleurs indépendants dans la population active française a évolué au cours du temps. En 1982, elle représentait 18 % de la population active. Elle a progressivement baissé pour atteindre son taux le plus bas en 2004 (10,9 %), notamment en raison du déclin du secteur agricole. Depuis, le travail indépendant connaît une nouvelle croissance. Les effectifs ont été multipliés par 1,5 entre 2010 et aujourd’hui, sous l’impulsion de la création du régime de l’autoentreprise. En 2023, ils représentaient ainsi 13,1 % de la population active, soit un peu plus d’un actif sur 8. 


Médecins, livreurs à vélo, menuisiers, coiffeurs : les indépendants exercent des activités diverses au sein de secteurs variés qui ont évolué avec le temps. Entre 1970 et 2021, les effectifs d’indépendants du secteur agricole ont été divisés par plus de 5 tandis qu’ils ont été multipliés par 1,3 dans le secteur tertiaire. On constate par ailleurs une progression des professions libérales et intermédiaires parmi les indépendants au détriment des artisans et des commerçants.

En matière de santé au travail quels sont les enjeux spécifiques liés au travail indépendant ? 

À activité similaire, les indépendants sont exposés aux mêmes risques professionnels que les salariés. Ils sont toutefois surexposés aux pénibilités physiques du fait de la surreprésentation en son sein d’agriculteurs et d’artisans. Toutefois, les indépendants sont également soumis à des facteurs de risques propres à leur statut : dépendances économiques plurielles, absence de collectifs, autonomie relative. Les contraintes économiques, qui pèsent à la fois sur l’emploi et/ou sur les revenus, sont centrales. Elles impactent notamment les manières dont les indépendants pratiquent leur activité. Ils sont ainsi souvent contraints de travailler plus vite ou de façon plus intense. On note également une extension des horaires et du nombre de jours travaillés par semaine. Les indépendants sont aussi plus fréquemment soumis au stress que les salariés et plus souvent exposés à une emprise du travail sur la vie privée. En parallèle, leur réticence à s’arrêter de travailler peut également les conduire à négliger leur santé. Cela peut se traduire par exemple par une absence de consultation médicale ou encore le non-respect des arrêts de travail… 

Comment améliorer la prévention des risques professionnels chez les travailleurs indépendants

Depuis 2021, les services de prévention et de santé au travail interentreprises (SPSTI) sont tenus de proposer une offre de services aux travailleurs indépendants. Pourtant, beaucoup d’indépendants ignorent cette nouvelle disposition. Un des enjeux est notamment de les informer de la possibilité pour eux de s’affilier aux SPSTI. Le rapprochement entre les SPSTI et les organisations publiques et professionnelles qui structurent le champ du travail indépendant pourrait y contribuer. Ce rapprochement permettait également aux services de santé de bénéficier de l’expertise et des connaissances « métiers » de ces organisations.


De manière générale, le déploiement de la prévention à destination des indépendants nécessite de repenser au moins partiellement les messages, outils et pratiques usuellement destinés aux salariés. Cela implique notamment une sensibilisation des travailleurs à la question des risques professionnels. 


Les équipes pluridisciplinaires des SPSTI peuvent s’appuyer sur certaines ressources déjà existantes, et transférables. Il s’agit par exemple des ressources relatives aux métiers exercés à la fois par les indépendants et les salariés. On peut également penser aux ressources relatives à certaines situations de travail présentant des similitudes (par exemple sur le télétravail pour les indépendants qui exercent à domicile). Mais une certaine transposition des messages et des outils s’avère nécessaire. Elle doit notamment tenir compte des spécificités du travail indépendant :

  • l’environnement économique (contraintes, risques, opportunités) et ses effets indirects ;
  • les facteurs de risques spécifiques : dépendances plurielles (aux clients, fournisseurs…), emprise du travail sur la vie privée, isolement, extension des horaires, intensification du travail.

Une vigilance particulière doit s’appliquer pour les travailleurs les plus vulnérables : indépendants économiquement dépendants, travailleurs de plateformes numériques. De même, les artisans étant particulièrement exposés aux pénibilités physiques, leur suivi de santé doit en tenir compte. Enfin, pour tous, la question des risques psychosociaux doit faire l’objet d’une attention spécifique. 

Pour en savoir plus :

   

Mis à jour le 26/03/2025