Toxicité aiguë [22, 23]
La MIBK possède une faible toxicité ; aux fortes concentrations, sa principale cible est le système nerveux central. Elle est faiblement irritante pour l’œil et la peau, qu’elle dessèche lors d’applications répétées.
La cible principale est le système nerveux central. L'exposition de rats et de souris (3000 ppm, 6 h/j, 10 j pendant la gestation) provoque perte de coordination, paralysie partielle, hypoactivité et ataxie [27, 28].
Les cobayes exposés à 16800 et 28000 ppm pendant 24 heures présentent immédiatement des signes d'irritation des yeux et du nez suivis de salivation, larmoiements, ataxie, narcose progressive et mort ; à 28000 ppm, la moitié des animaux meurent en 45 minutes [28]. Les autopsies réalisées sur certains animaux ont révélé une congestion du cerveau, des poumons et de la rate, ainsi qu'une dégénérescence graisseuse du foie.
Une exposition en continu pendant 2 semaines induit, chez le rat, une augmentation du poids relatif et absolu des reins (100 ppm) et du foie (200 ppm) ainsi qu'une néphrose toxique des tubes proximaux ; une exposition identique n'a aucun effet chez le chien ou le singe Rhésus [9]. À des concentrations plus élevées (500 ou 2000 ppm), l'autopsie a révélé, dans les reins du rat mâle uniquement, un épithélium régénératif et des gouttelettes hyalines [29].

DL50/CL50 chez différentes espèces.
Irritation, sensibilisation [5]11https://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_56§ion=pathologieToxicologie#ancre_BiblioTexte
Une application cutanée de MIBK pure (0,5 ml de MIBK pure pendant 4 heures, sous pansement semi-occlusif) n’engendre aucune réaction sur la peau du lapin. Des applications journalières de 10 ml pendant 7 jours induisent le dessèchement et la desquamation de la surface cutanée. Chez le cobaye, la MIBK non diluée (5 ou 10 ml) sous occlusion, en contact pendant 24 heures, entraine une irritation légère.
Son instillation dans l'œil du lapin (0,1 ml de MIBK pure) provoque une faible irritation de la conjonctive, une légère inflammation avec gonflement de la conjonctive et un exsudat dans les 4 heures suivant l’instillation ; ces effets sont réversibles en 24 heures.
Une étude de sensibilisation cutanée (maximisation chez le cobaye - GPMT) a donné des résultats négatifs.
Toxicité subchronique, chronique
La MIBK, en exposition subchronique à des concentrations relativement élevées, a pour cibles le foie, les reins et le système nerveux central des animaux.
Des rats exposés par voie orale (gavage, 0, 50, 250 ou 1000 mg/kg/j pendant 90 j) présentent, à la plus forte dose, une baisse de poids corporel en absence de baisse de prise de nourriture, un état léthargique, une augmentation de poids du foie, sans lésion histologique, ainsi qu'une toxicité rénale caractérisée par une augmentation du poids des reins et de l'incidence des néphropathies. Ces effets apparaissent à un degré moindre à la dose de 250 mg/kg/j ; la NOAEL est de 50 mg/kg/j [28].
Des rats et des souris exposés par inhalation (0, 50, 250 ou 1000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem pendant 90 j) ne présentent pas de signe clinique de toxicité ; seule une augmentation du poids relatif et absolu du foie (dès 250 ppm pour la souris, 1000 ppm pour le rat), sans lésion histologique, est observée chez les animaux mâles. Les rats mâles, exposés à 250 et 1000 ppm, développent une néphropathie à gouttelettes hyalines liée à la présence d'α2µ-globuline spécifique du rat mâle et non extrapolable à l’homme (les quantités d'α2µ-globuline produites chez l’homme sont non significatives). La NOEL est de 50 ppm [29].
Dans une étude plus récente, des rats et des souris des 2 sexes ont été exposés à la MIBK pendant 2 ans (corps entier, 0-450-900 ou 1800 ppm, 6 h/j, 5 j/sem) [30]. Les effets suivants sont rapportés :
- chez la souris femelle, augmentation de l’incidence de foyers éosinophiles dans le foie à 450 et 1800 ppm ;
- chez les rats,
- augmentation de l’incidence et/ou la sévérité de néphropathies chroniques progressives, en lien avec la concentration, chez les mâles et les femelles,
- chez les mâles uniquement, une hyperplasie des tubules rénaux et dépôts de minéraux dans les papilles rénales à toutes les concentrations ; à 1800 ppm, hyperplasie de la médullo-surrénale et mortalité accrue.
A 1800 ppm, le développement d’une néphropathie chronique progressive chez tous les rats mâles et chez 70 à 88 % des femelles est le signe de l’implication de mécanismes autres que celui lié à l’α2µ-globuline, spécifique du rat mâle.
Par voie cutanée, la MIBK (application de 5940 mg/kg/j, 5 j/sem, 31 sem) induit, chez le cobaye au site d'application, une desquamation légère à modérée de la peau.
Concernant la neurotoxicité de la MIBK, les résultats des différentes études divergent et ne permettent pas de conclure ; en revanche, cette substance favorise la neurotoxicité périphérique induite par les hydrocarbures comme le n-hexane [31].
Effets génotoxiques
La MIBK ne présente pas de potentiel génotoxique dans les tests effectués in vitro et in vivo.
In vitro
Une batterie de tests, effectués in vitro, donne des résultats négatifs :
- test d'Ames sur S. typhimurium (TA98, TA100, TA1535, TA1537 et TA1538) et E. coli en présence ou en absence d'induction métabolique ;
- test de conversion génique mitotique sur S. cerevisiæ avec et sans activation ;
- mutation des cellules de lymphome de souris en présence d'activation métabolique (résultat équivoque en absence d'activation) ;
- synthèse non programmée de l'ADN dans les hépatocytes primaires de rat ;
- transformation morphologique sur cellules embryonnaires de souris, avec ou sans activation métabolique (résultats positifs seulement à la plus forte dose sans activation) ;
- aberrations chromosomiques dans les cellules hépatiques de rat en culture.
In vivo
Le test du micronoyau dans la moelle osseuse de souris est négatif pour une dose de 0,73 ml/kg par voie intrapéritonéale [32, 33].
Effets cancérogènes [30]
La MIBK est à l’origine de tumeurs rénales chez le rat et hépatiques chez la souris.
Des rats et des souris des 2 sexes exposés à la MIBK pendant 2 ans (corps entier, 0-450-900 ou 1800 ppm, 6 h/j, 5 j/sem) présentent les effets suivants :
- chez les rats
- mâles uniquement, augmentation de l’incidence des adénomes et adénomes/carcinomes combinés au niveau des tubules rénaux à 1800 ppm (continuum de la néphropathie progressive chronique), tendance à la hausse concernant les phéochromocytomes bénins et malins,
- femelles, tumeurs mésenchymateuses rénales (tumeurs rares, non présentes chez les témoins historiques),
- chez les souris mâles et femelles :
- augmentation de l’incidence des adénomes et des adénomes/carcinomes combinés au niveau du foie à 1800 ppm.
A partir de ces données, le Centre international de recherche sur le cancer [34] a classé la MIBK comme cancérogène possible pour l'homme (groupe 2B), probablement par un mécanisme non génotoxique.
Effets sur la reproduction
La MIBK n’induit aucun effet sur la fertilité ; en revanche, elle est fœtotoxique à des concentrations entraînant une toxicité maternelle.
Fertilité
Dans une étude sur 2 générations chez le rat (exposition corps entier, 0-500-1000 ou 2000 ppm, 6 h/j, 7 j/sem, avant l’accouplement jusqu’à la lactation), aucune atteinte spermatique ni effet sur certains paramètres de reproduction ne sont observés (nombre de nouveau-nés vivants par portée et proportion de nouveau-nés vivants) [35].
Dans une étude de toxicité subchronique (rat et souris, 0 – 50 - 250 - 1000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem pendant 14 semaines), les testicules (histopathologie ou poids) ne sont pas impactés [2].
Développement
Une étude sur 2 générations chez le rat (exposition à des concentrations allant jusqu'à 2000 ppm (0- 500-1000-2000 ppm), 6 h/j, 7 j/sem, avant l’accouplement jusqu’à la lactation) n'a pas montré d'effet sur le nombre de petits malformés, la néomortalité, le poids des nouveau-nés ou leur survie [35].
Une exposition pendant la gestation (rat ou souris, 300 - 1000 - 3000 ppm, 6 h/j, du 6e au 15e jour de gestation) induit une toxicité maternelle à la plus forte concentration testée (chez le rat, diminution du poids corporel, du gain de poids et de la consommation de nourriture et augmentation du poids relatif des reins ; chez la souris, augmentation de la mortalité et du poids du foie). A cette même concentration, un retard d'ossification et une diminution du poids fœtal par portée sont observés chez les rats ; à ces effets, s’ajoute une augmentation de l'incidence de mortalité fœtale chez les souris. Aucune augmentation de l'incidence des malformations externes, viscérales, squelettiques ou totales n’est détectée [27]. La NOAEL est de 1000 ppm pour la toxicité maternelle et fœtale et supérieure à 3000 ppm pour la tératogenèse.