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Dioxyde de chlore

Fiche toxicologique n° 258

Sommaire de la fiche

Édition : Mai 2022

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    La toxicocinétique du dioxyde de chlore n’a pas été étudiée chez l’homme. Chez l’animal, il est absorbé par ingestion et par voie cutanée, largement distribué dans l’organisme, transformé essentiellement en ions chlorures et chloreux et éliminé dans l’urine et les fèces.

    Chez l'animal
    Absorption

    Chez l'animal, aucune donnée n'est disponible sur l'absorption par inhalation.

    Après ingestion, le dioxyde de chlore est rapidement absorbé dans le tractus gastro-intestinal ; un pic de molé­cules radiomarquées est observé dans le plasma une heure après une exposition par gavage au 36[Cl]O2 (rat, 1,4 mg/kg); l'absorption peut être estimée à plus de 30 % de la dose et sa demi-vie à 0,18 heure.

    Chez le rat, le pic plasmatique en 36[Cl] est atteint 72 heures après un dépôt cutané d’Alcide (produit antimicrobien composé de solutions de 36[Cl]chlorure de sodium et d'acide lactique qui, mélangées, produisent du dioxyde de chlore) ; la demi-vie d'absorption est d'environ 22 heures.

    Distribution

    Chez le rat, le 36[Cl], absorbé dans le tractus gastro-intesti­nal après une dose de 36[Cl]O2 administrée par gavage, est éliminé du sang avec une demi-vie de 44 heures et se distribue largement dans l'organisme ; la demi-vie d'élimi­nation sanguine est raccourcie (31 heures) par une expo­sition préalable (eau de boisson) pendant 2 semaines. Après 72 heures, les concentrations les plus fortes sont retrouvées dans le sang, l'estomac et l'intestin grêle, mais des taux élevés sont également mesurés dans les pou­mons, les reins, le foie, les testicules, la rate, le thymus et la moelle osseuse.

    Métabolisme

    Le dioxyde de chlore est rapidement réduit en ion chlorure (36[Cl]-) dans l'estomac (87 % des molécules marquées dans l'urine et 80 % de celles du plasma, 72 heures après une dose orale de 100 mg/L de 36[Cl]O2 chez le rat) et en ion chloreux (36[Cl]O2-) (11 % dans l'urine et 21 % dans le plasma). L'ion chlorate (36[Cl]O3-) est un métabolite mineur présent dans l'urine (env. 2 %).

    Schéma métabolique

    Excrétion

    L'urine est la première voie d'excrétion du dioxyde de chlore administré par voie orale. Chez le rat, 72 heures après gavage de 36[Cl]O2, 31-35 % des molécules marquées administrées sont excrétées dans l'urine et 4,5-10 % dans les fèces, essentiellement sous forme d'ion chlorure; aucun composé parental n'a été décelé.

    Après dépôt cutané d’Alcide chez le rat, l'excrétion urinaire est la plus importante dans les premières 24 heures, avec une demi-vie de 64 heures. Les molécules excrétées sont des ions chlorures et chloreux en quantités égales. Il n'y a pas d'excrétion dans les fèces ou l'air expiré.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Le dioxyde de chlore est toxique par voie orale et par inha­lation; c’est un irritant sévère des yeux et du tractus respiratoire.

    La DL 50 par voie orale est de 292 mg/kg chez le rat et supérieure à 5000 mg/kg chez la souris. Les animaux présentent des difficultés respiratoires, une corrosion du tractus gastro-intestinal et une ataxie.

    La CL 50 moyenne calculée est de 32 ppm/4 h (90 mg/m3) chez le rat. Les animaux larmoient, saignent du nez et sont en détresse respiratoire; à l'autopsie, on observe un œdème pulmonaire et un emphysème dont l'incidence est fonction de la concentration.

    Sous forme gazeuse, le dioxyde de chlore est irritant pour le tractus respiratoire et les yeux ; sous forme liquide, il est irritant pour la peau.

    Toxicité subchronique, chronique

    Le dioxyde de chlore, en expositions répétées ou prolon­gées, agit essentiellement par irritation sur le tractus exposé.

    Par voie orale, le dioxyde de chlore (100 mg/L dans l'eau de boisson du rat pendant 2 ans) induit une diminution de la survie, une baisse de la consommation d'eau et de nourri­ture, du poids corporel et de la prise de poids, du poids absolu du foie (mâles, 50 mg/L, 90 j) et de la rate (femel­les, 25 mg/L, 90 j), une augmentation des lésions nasales qui seraient dues aux vapeurs formées ainsi que des alté­rations hématologiques non reliées à la dose. La NOAEL a été établie, chez le rat, à 10 mg/L pendant 2 ans. Chez le singe, par voie orale (9 mg/kg/j dans l'eau de boisson pendant 6 semaines), il provoque des lésions au niveau des muqueuses, un écoulement nasal et une baisse du taux de l'hormone thyroïdienne T4 sérique. La NOAEL est de 30 mg/L pendant 6 semaines.

    Les rats, exposés par inhalation (5 - 10 - 15 ppm, 15 min, 2 - 4 fois/j pendant 30 jours), présentent un écoulement nasal et des yeux rouges ; à partir de 10 ppm apparaissent des lésions du tractus respiratoire (bronchite, bronchiolite, irritation alvéolaire avec épaississement de la paroi et œdème), un taux élevé du nombre d'érythrocytes et de leucocytes et une létalité à 15 ppm. Les effets observés au niveau du tractus respiratoire sont liés à la concentration. La NOAEL pour les effets respiratoires est de 5 ppm (14 mg/m3). Chez le lapin (2,5 ppm, 4 h/j pendant 45 jours), les poumons, observés 15 jours après l'exposition, montrent des alvéoles hémorragiques et des capillaires congestionnés ; ces lésions sont réversibles.

    Effets génotoxiques

    Le dioxyde de chlore présente quelques effets génotoxiques dans les tests pratiqués in vitro mais aucun dans les tests in vivo.

    Test

    Souche, cellules ou espèce

    Dose

    Résultat

    In vitro

    Ames

    S. typhimurium TA1535

    10 - 100 - 1000 µg/mL +/- activation métabolique

    Négatif

    Mutation

    Cellules L5178Y TK+/-de lymphome de souris

    0 à 65 µg/mL

    +/- activation métabolique

    Positif, fonction de la dose avec et sans activateurs métaboliques

    Cytogénétique :

    • aberrations chromosomiques

    Cellules ovariennes Hamster chinois

    0 à 75 µg/mL

    +/- activation métabolique

    Positif :

    • sans activateurs métaboliques à partir de 2,5 µg/mL
    • avec activateurs métaboliques à 50 µg/mL

    Transformation cellulaire

    Cellules BALB/3T3

    0 à 6 µg/mL

    Négatif

    In vivo

    Cytogénétique :

    • index mitotique
    • aberrations chromosomiques

    Souris CD1 (moelle osseuse)

    0, 2, 5 ou 15 mg/kg ip

    Négatif

    Cytogénétique :

    • micronoyaux
    • aberrations chromosomiques

    Souris CD1 (moelle osseuse)

    0, 5, 10 ou 20 mg/kg, gavage pendant 5j

    Négatif

    Cytogénétique :

    • échanges entre chromatides-sœurs

    Souris ICR (moelle osseuse)

    0, 9, 21, 28 ou 39 mg/kg ip

    Négatif

    Létalité dominante

    Rat

    0 à 20 mg/kg ip

    Négatif

     

    Effets cancérogènes

    Le dioxyde de chlore n’a pas été testé dans les tests clas­siques de cancérogenèse. Quelques tests à court terme sont négatifs par voie orale; par voie cutanée, il induit une hyperplasie épidermique.

    Il n'y a pas d'étude de cancérogenèse chez l'animal par inhalation. Par voie orale, des tests à court terme ont été effectués avec de l'eau de boisson traitée par le dioxyde de chlore et concentrée 2000 ou 4000 fois :

    • test d'initiation/promotion : négatif chez la souris SENCAR (0,5 mL du concentré 4000 fois, 3 fois/semaine pendant 2 semaines, suivi d'application cutanée de 12-tétradécanoylphorbol-13-acétate (TPA) 3 fois/semaine pendant 20 semaines) ;
    • test d'induction d'adénomes pulmonaires : négatif chez la souris de souche A/J (0,25 mL de concentré par gavage 3 fois/semaine pendant 8 semaines) ;
    • test de développement de foyers positifs en γ-glutamyltranspeptidase dans le foie : négatif chez le rat partiellement hépatectomisé (1 dose de solution concentrée par gavage puis, après 1 semaine, 500 mg/L de phénobarbital de sodium dans l'eau de boisson pendant 56 jours).

    Un test d'induction de prolifération épithéliale chez la souris, après exposition par voie cutanée (0, 1, 10, 100, 300 ou 1000 ppm de dioxyde de chlore liquide, 10 min/j pen­dant 4 jours), montre une augmentation de l'épaisseur épidermique interfolliculaire et une hyperplasie des cellu­les basales à la forte dose.

    Effets sur la reproduction

    Le dioxyde de chlore n’est pas toxique pour la fertilité ou le développement; il induit chez les nouveaux-nés une baisse d’activité en corrélation avec une baisse de thyroxine.

    Fertilité

    Chez le rat, le dioxyde de chlore n'a pas d'effet sur la ferti­lité jusqu'à 10 mg/kg/j par gavage (7 j/sem. avant et pen­dant l'accouplement pour les deux sexes, pendant la gestation et la lactation pour les femelles) ; les mâles exposés à 13 mg/kg/j dans l'eau de boisson, accouplés avec des femelles non exposées, induisent une légère diminution du nombre d'implants. Une baisse de syn­thèse d’ADN a été mesurée dans les testicules des ani­maux exposés à ≥ 1,3 mg/kg/j dans l'eau de boisson pendant 3 mois.

    Chez la souris, un gavage pendant 5 jours jusqu'à 16 mg/kg/j ne modifie pas la morphologie de la tête des spermatozoïdes.

    Développement

    Des rates exposées à des doses ≤ 13 mg/kg/j dans l'eau de boisson ne présentent qu'une légère baisse de prise de poids à partir de 7 mg/kg/j ainsi qu'une faible baisse du nombre d'implants et de fœtus vivants ; les fœtus n'ont aucune anomalie. Les nouveau-nés, exposés in utero à 13 mg/kg/j, présentent une légère baisse de poids entre les jours 4 et 21, une baisse d'activité locomotrice en cor­rélation avec une baisse de thyroxine (hormone thyroï­dienne T4) sérique. Des nouveau-nés de parents non exposés, exposés du 5e au 21e jour par gavage à 14 mg/kg/j de dioxyde de chlore, ont une baisse du poids corporel, de l'activité locomotrice et du taux de T4 sérique, du poids du cerveau et du contenu en ADN ainsi que du nombre de cellules du cerveau antérieur et du cervelet.

  • Toxicité sur l’Homme [12-14]

    Les intoxications aiguës se traduisent par des irritations des muqueuses du tractus respiratoire et des yeux. Des séquelles respiratoires sont possibles. L’exposition répétée occasionnelle est responsable d’irritations modérées du tractus respiratoire. Aucune donnée n’est disponible sur d'éventuels effets génotoxiques ou cancérogènes. Concernant la toxicité sur la reproduction, des effets mineurs ont été rapportés après exposition environnementale mais les données sont insuffisantes. 

    Toxicité aiguë

    Quelques publications ont rapporté des cas d'exposition humaine aiguë par inhalation. Irritations oculaire, nasale et respiratoire ainsi que des céphalées sont observées avec parfois des séquelles respiratoires. Dans un cas, une femme a été victime d'une détresse respiratoire aiguë sept heures après exposition, réversible sous traitement symptomatique. Les observations sont cependant de qua­lité variable, avec parfois des expositions conjointes au dioxyde de soufre. Une publication de 1959 rapporte deux décès sans indication sur leur cause et les lésions obser­vées; elle signale que le niveau d'exposition était de 19 ppm sans en préciser la durée.

    Une observation rapporte des anomalies nasales (injec­tion, télangectasie, aspect pavimenteux, pâleur des muqueuses, œdème et mucosités épaisses à l'examen cli­nique) chez treize personnes exposées accidentellement à du dioxyde de chlore et présentant une hyper-réactivité nasale aux irritants respiratoires. Des biopsies nasales ont révélé une inflammation chronique de la lamina propria chez 11 des 13 personnes. Seul l'un des trois sujets contrôles présentait les mêmes signes.

    Il n'a pas été rapporté, dans la littérature, d'effet sensibili­sant que ce soit par voie cutanée ou par inhalation.

    Toxicité chronique

    Plusieurs auteurs ont examiné l'état de santé respiratoire de travailleurs exposés occasionnellement au dioxyde de chlore. De la toux, une respiration sifflante, des essouffle­ments ont été observés. Des expositions conjointes au chlore sous forme gazeuse ou au dioxyde de soufre ne per­mettent pas d'imputer ces effets au dioxyde de chlore.

    Plusieurs études ont rapporté des observations sur des hommes ingérant, volontairement ou non, de l'eau conte­nant du dioxyde de chlore pendant plusieurs semaines (concentration maximale correspondant à 0,34 mg/kg de poids corporel chez des volontaires). Aucun effet sur la santé n'a été rapporté. L'intégrité des fonctions hématolo­giques, hépatiques et rénales a été vérifiée par des exa­mens biologiques.

    Effets génotoxiques

    Aucune étude n'a été rapportée.

    Effets cancérogènes

    Aucune étude n'a été rapportée.

    Effets sur la reproduction

    Seules quelques études épidémiologiques ont observé l'effet sur la grossesse de femmes habitant dans des zones où l'eau potable est désinfectée par du dioxyde de chlore. Certaines études rapportent des modifications mineures telles qu'une augmentation des cas de jaunisses périnatales, des périmètres crâniens et des tailles de nouveau-nés inférieurs à la moyenne. Les nombreux biais (absence de données sur l'exposition, sur la composition des eaux...) ne permettent cependant pas de prendre en compte ces effets en l'absence de résultats d'autres études.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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