Toxicité aiguë
L’intoxication systémique comprend des troubles neurologiques, cardiovasculaires, rénaux, oculaires, une acidose métabolique voire un effet méthémoglobinisant. C’est un caustique puissant, notamment responsable de troubles oculaires voire de cécité.
Voie | Espèce | DL50/CL50 |
Orale | Rat | 1100-1830 mg/kg |
Souris | 700-1 076 mg/kg |
Chien | 4 000 mg/kg |
Inhalatoire | Rat | 15 000 mg/m3 pendant 15 min |
Souris | 6 200 mg/m3 pendant 15 min |
Tableau I : Toxicité de l'acide formique pour l'animal
Le tableau de l'intoxication systémique varie selon les espèces et associe :
- des troubles neurologiques : ataxie, somnolence, coma et convulsions ;
- des troubles cardiovasculaires : vasoconstriction initiale, puis vasodilatation et collapsus cardiovasculaire ;
- une atteinte rénale : diurèse augmentée ;
- une acidose métabolique entraînant dans un premier temps une compensation respiratoire qui se traduit par une hyperpnée, cette phase est suivie d’une dépression respiratoire d'origine centrale ;
- des troubles oculaires chez le lapin et le chien (accumulation de formiate dans les cellules gliales de la rétine)[21].
Des travaux anciens signalent également un effet méthémoglobinisant chez le chien (env. 50 mg/kg, voie orale) et le lapin (6 mg/kg, sous-cutané) ; cet effet dure environ 10 jours, puis disparaît lentement.
L'acide formique est un caustique puissant, responsable de lésions sévères des tissus avec lesquels il entre en contact. Chez le lapin, l'administration orale de 2 mL d'une solution à 5,7 % provoque une irritation intense des muqueuses digestives, puis des ulcérations gastriques. Chez le cobaye, l'acide formique, administré à raison de 0,3 à 42 ppm pendant 1 heure, est plus irritant pour les voies respiratoires que l'aldéhyde formique aux mêmes concentrations.
L'application sur la peau rasée de lapins est responsable d’une irritation légère à la dose de 610 mg et d'ulcérations sévères aux doses plus importantes.
Une instillation dans l’œil du lapin d’une solution à 10 % produit une opacification blanche, locale, immédiate de la cornée qui régresse légèrement après 5 jours. Une goutte d'acide pur déposée sur la cornée du lapin produit une opacité immédiate locale ainsi qu’une opacification du cristallin, une inflammation de l’iris et des lésions de la chambre antérieure de l’œil. Chez le singe, l’administration intraoculaire provoque le même type d’atrophie et de cécité que celui causé par une exposition au méthanol (œdème de la rétine et du nerf optique, puis atrophie de ce dernier)[19].
Toxicité subchronique, chronique [20]
L'acide formique, en administration répétée, a peu d'effet chez l'animal ; le tractus respiratoire supérieur est sa cible lors d'une administration par inhalation.
Chez le rat, l'administration d'acide formique dans l'eau de boisson à des concentrations comprises entre 0,01 % et 0,25 % (soit environ 0,2 mL/kg/j) pendant 2 à 4 mois ne produit aucun effet cliniquement décelable ; à 0,5 % (0,36 mL/kg/j), une anorexie et un ralentissement de la croissance pondérale sont notés. Les mêmes effets sont observés chez des rats dont les aliments ou l'eau de boisson contiennent 0,5 ou 1 % d'acide formique pendant 6 semaines.
L'exposition de rats à 20 ppm d'acide formique, 6 heures par jour pendant 3 ou 8 jours, est responsable d'un dysfonctionnement de certains systèmes enzymatiques hépatiques, rénaux ou cérébraux (enzymes de métabolisation, voie du glutathion...).
L’exposition par inhalation de rats et de souris pendant 2 semaines (0-31-62,5-125-250-500 ppm, 6h/j, 5j/semaine) et 13 semaines (0-8-16-32-64-128 ppm, 6h/j, 5j/semaine) engendre des effets toxiques systémiques minimes :
- les modifications hématologiques et biochimiques sont légères et révèlent une hémoconcentration ;
- les lésions macro ou microscopiques sont limitées au tractus respiratoire supérieur et sont similaires aux effets induits par des produits chimiques irritants administrés par inhalation. Après 2 semaines, la toxicité est limitée aux passages du nez, au pharynx, au larynx et à la trachée (nécrose et inflammation aux deux plus fortes concentrations) ; la souris est plus sensible que le rat. Après 13 semaines, les effets sur le larynx, le pharynx ou la trachée ne sont plus visibles mais on note, au niveau de l’épithélium respiratoire et olfactif, une métaplasie squameuse (chez le rat) et une dégénérescence (pour les deux espèces) minimales. La NOAEL est de 64 ppm.
Le manque d’effet systémique pourrait être lié à la faculté des rongeurs à métaboliser rapidement l’acide formique en CO2.
Effets génotoxiques [20]
L'acide formique, en solution tamponnée, n'est pas mutagène in vitro ou in vivo.
In vitro, l’acide formique, en solution tamponnée, n’est pas mutagène pour Salmonella typhimurium TA100, TA1535, TA97 ou TA98 avec ou sans activateurs métaboliques. Il n’induit pas d’échanges entre chromatides sœurs dans les cellules V79 de hamster chinois. En solution non tamponnée, il augmente le taux d’aberrations chromosomiques dans les cellules ovariennes de hamster chinois ; les auteurs parlent de faux-positif.
In vivo, l'application quotidienne pendant 50 jours d'une solution à 8 % d'acide formique sur les oreilles de souris n'a pas induit d'anomalie in situ. Des résultats positifs ont été obtenus dans le test de létalité récessive liée au sexe chez la drosophile, uniquement avec des solutions non tamponnées.
Effets cancérogènes [19]
Il n'y a pas de test d'effet cancérogène de l'acide formique rapporté dans la littérature (2011).
Un test d’effet promoteur après exposition cutanée (2 fois par semaine pendant 20 semaines) d’une solution d’acide formique à 8 % sur l’oreille de la souris prétraitée avec du diméthylbenzanthracène (1,5 %, une fois) a donné des résultats négatifs.
Effets sur la reproduction
L'acide formique n'a pas d'effet sur les organes de la reproduction. Il est toxique pour les embryons en culture in vitro.
Le sel de calcium, administré sur trois générations, n'est ni fœtotoxique ni tératogène.
Il n’y a pas d’effet de l’acide formique sur les paramètres de la reproduction (mobilité spermatique, poids des testicules ou de l’épididyme, durée du cycle œstral) évalués chez la souris et le rat des deux sexes exposés par inhalation (0-8-16-32-64-128 ppm, 6h/j, 5j/semaine, pendant 13 semaines) [20].
Au cours d'un essai ancien, l'administration sous forme de formiate de calcium (0,2 % dans l'eau de boisson) à des rats pendant 3 ans n'a provoqué aucun effet sur la croissance ou la fertilité des 5 générations obtenues [22].
L'injection de 20 mg d'acide formique dans des œufs de poule fertilisés n'est ni fœtotoxique ni tératogène.
Plusieurs essais in vitro, sur culture d’embryon de rat et de souris, ont montré une toxicité de l’acide formique (retard de croissance et de développement) et une augmentation des anomalies (neuropores antérieur et postérieur ouverts, anomalies de la queue, hypertrophie du péricarde et développement cardiaque retardé)[23].
Une exposition des rates à 1 % d’acide formique dans l’eau de boisson, pendant 7 mois, engendrerait une diminution de la survie des petits de 50 à 67 % [20].