Toxicité aiguë [3]
La butanone s'est révélée peu nocive lors des essais de toxicité aiguë. Une exposition orale provoque des atteintes hépatiques et rénales, et une exposition par inhalation une irritation respiratoire et un effet sur le système nerveux central. C’est un irritant modéré pour la peau et l'œil.
Voie | Espèce | DL50/CL50 |
orale | rats | 2737 à 5522 mg/kg |
souris | 4044 mg/kg |
inhalation | rats | 11 700 ppm (4 h) |
souris | 69 500 ppm (45 min) |
cutanée | lapin | > 8 g/kg |
Tableau I. Toxicité aiguë de la butanone [3, 4, 6]11https://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_14§ion=pathologieToxicologie#ancre_BiblioTexte
Une dose orale non létale (1,5 g/kg) provoque chez le rat, après 16 à 23 heures, une augmentation des triglycérides (63 %) dans le foie, sans modification histologique ou augmentation des activités d'enzymes comme l'alanine aminotransférase ou la glucose-6-phosphatase. Cette perturbation métabolique hépatique a également été montrée chez le cobaye. Chez le rat, une nécrose des tubules rénaux est rapportée suite à l’administration par gavage de 1082 mg/kg [36].
Après exposition par inhalation, une irritation rapidement réversible du tractus respiratoire se développe chez le cobaye exposé à des concentrations > 29500 mg/m3 (10 000 ppm) pendant 2 minutes. L'irritation est sévère chez le rat après quelques jours d'exposition (10 000 ppm, 8 h/j). Les cobayes présentent une respiration haletante après 180 minutes à 33 000 ppm et meurent après 200 à 260 minutes d’exposition [3]. Une modification du comportement, caractérisée par une augmentation du temps de réponse à un stimulus visuel, apparait chez le rat (74 - 2 360 mg/m3 (25 - 800 ppm) pendant 2 à 6 heures) et chez la souris (> 2950 mg/m3 (1000 ppm) pendant 30 minutes).
La RD50 chez la souris a été estimée à 10 745 ppm après 5 min d’exposition[37].
Irritation, sensibilisation [4]
Déposée pure (0,1 mL non couvert, 1 fois/j pendant 10 jours) sur la peau du cobaye ou du lapin, la butanone provoque un érythème et un œdème après 24 à 72 heures ; les effets sont plus marqués chez le lapin.
Instillée dans l'œil du lapin (0,1 mL), elle provoque une irritation minimale à modérée, réversible en 7 jours. Chez le cobaye, exposé à des vapeurs à 100 000 ppm (295 000 mg/m3) pendant 30 minutes, une opacité cornéenne apparaît ; elle est réversible en 4 à 8 jours.
La butanone n’est pas un sensibilisant cutané (test de Buehler, [2]).
Toxicité subchronique, chronique
En exposition prolongée ou répétée, la butanone n’a pas d’effet neurologique chez l’animal. En revanche, elle potentialise les effets induits par les substances hexacarbonées ou les solvants halogénés.
L'essentiel des études a consisté à rechercher un effet neurotoxique du produit : toutes les expériences faites en ce domaine ont échoué. Les études réalisées par inhalation (rats, 1254 – 2518 - 5041 ppm, 6 h/j, 5 j/sem pendant 90 jours) ont donné un résultat négatif[38]. Un résultat identique a été observé chez le poulet, le chat ou la souris exposés à 1500 ppm pour des périodes allant jusqu'à 12 semaines (toute la journée, 7 j/sem)[39]. Des effets passagers sur le comportement (légère augmentation du délai de réponse à un test) ont été détectés après une exposition répétée du babouin à des concentrations plus faibles (100 ppm, en continu pendant 7 jours – [40]).
Les seuls effets non neurologiques mentionnés sont une légère augmentation de poids du foie chez le rat exposé par inhalation, mais sans lésion histopathologique associée (5041 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 90 j), et une légère irritation locale après exposition cutanée du lapin ou du cobaye (80 mg, 1 fois/j, 10 j).
En revanche, la butanone a montré une action synergique en ce qui concerne [4] :
- la neurotoxicité avec les substances hexacarbonées : en particulier, chez le rat, administrée conjointement avec le n-hexane (200 ppm de butanone et 300 ppm de n-hexane, 8h/j jusqu'à 89 j), la 2-hexanone (2 000 ppm de butanone et 200 ppm de 2-hexanone, 8 h/j, 5 j/sem, 6 sem) et la 2,5-hexanedione (0,159 g/kg de butanone et 0,253 g/kg de 2,5-hexanedione par voie orale, 1 fois/j, 5 j/sem, 13 sem), la butanone provoque une réduction du temps de latence et une augmentation de la sévérité de la neuropathie engendrée par ces produits ;
- l'hépatotoxicité avec les solvants halogénés comme le tétrachlorure de carbone ou le chloroforme : une exposition orale à la butanone (1 à 1,5 g/kg), suivie 10 à 48 heures plus tard d'une injection intrapéritonéale (ip) de tétrachlorure de carbone (0,16 g/kg) ou de chloroforme (0,8 g/kg), induit, chez le rat, une modification sévère du foie avec nécrose, dégénérescence graisseuse, vacuolisation et augmentation des triglycérides.
Aucune étude n’est disponible par voie orale ou cutanée.
Effets génotoxiques [3]
Les tests de génotoxicité effectués in vitro et in vivo sont négatifs. La butanone n'est pas génotoxique pour S. typhimurium, elle n'induit ni aberration chromosomique ni échange entre chromatides sœurs dans les cellules ovariennes de hamster chinois.
In vitro
Les tests pratiqués in vitro : Ames (S. typhimurium ou E. coli), conversion génique (S. cerevisiae), aberrations chromosomiques (cellules hépatiques de rat (RL4) ou cellules ovariennes de hamster chinois) et transformation cellulaire (cellules de souris BALB/3T3) ont montré des résultats négatifs ; seule l'induction de l'aneuploïdie (S. cerevisiae) s'est révélée positive.
In vivo
Les tests du micronoyau donnent des résultats négatifs dans les érythrocytes de moelle osseuse de la souris (1,9 mL/kg, ip) et du hamster chinois (10 mL/kg, ip)[41, 42].
Effets cancérogènes
Aucune donnée n'est disponible chez l'animal à la date de publication de cette fiche toxicologique sur des essais de cancérogenèse avec la butanone.
Cependant, il existe une étude dans laquelle la butanone est utilisée comme solvant pour mesurer la contribution du soufre élément et des composés soufrés inorganiques dans la cancérogenèse cutanée chez la souris. Le dépôt de 50 mg d'une solution à 17 % de butanone sur la peau, 2 fois par semaine, pendant un an, n'engendre pas de développement de tumeur cutanée[43].
Effets sur la reproduction
Aucune donnée n'est disponible chez l'animal à la date de publication de cette fiche toxicologique sur des essais de fertilité avec la butanone. Des effets sur le développement (retard de croissance et variation squelettique) sont observés aux fortes concentrations, induisant une toxicité maternelle.
Fertilité
Aucune donnée n'est disponible chez l'animal à la date de publication de cette fiche toxicologique sur des essais de fertilité avec la butanone. L’examen histopathologique des organes reproducteurs, réalisé lors d’études subchroniques (jusqu’à 5000 ppm, 90 jours, 6 h/j, 5 j/sem), ne montre aucun effet [3].
Développement
Exposés in utero (400, 1000 et 3000 ppm, 7 h/j, du 6ème au 15ème jour de gestation), les fœtus du rat ont un retard d'ossification des os du crâne et des cervicales et des côtes surnuméraires à la plus forte concentration ; à cette concentration, les mères présentent seulement une diminution du poids corporel [44]. Chez la souris exposée dans les mêmes conditions, la toxicité maternelle se caractérise par une augmentation du poids du foie et des reins à 3000 ppm ; une fœtotoxicité (réduction de poids corporel mais pas de létalité) ainsi qu'un mauvais alignement des sternèbres (une variation squelettique) apparaissent à 3000 ppm [45]. Plusieurs types de malformations sont observés chez les fœtus à la plus forte concentration mais elles ne sont pas statistiquement significatives : fentes palatines, côtes fusionnées, vertèbres malformées, syndactylie. La NOAEL est de 1000 ppm pour les fœtus (rat, souris) et pour les mères (rat, souris).
De même, des rats ont été exposés à 1000-2000-4000 et 6000 ppm du 6ème au 20ème jour de gestation, 6 heures par jour. Aux 2 plus fortes doses, une diminution de la prise de nourriture et de la croissance pondérale est observée chez les mères, uniquement la 1ère semaine de traitement à 4000 ppm, et tout au long de la gestation à 6000 ppm. Le traitement n’a eu aucun effet sur le nombre d’implantations, le nombre d’implantations non viables, de fœtus vivants et de résorptions. L’examen des fœtus a révélé une baisse du poids liée à la dose à partir de 2000 ppm, un retard d’ossification des sternèbres et des côtes cervicales à 4000 et 6000 ppm. A partir de ces résultats, les NOAELs pour la toxicité maternelle et fœtale sont respectivement de 2000 et 1000 ppm[46].
Le 2-butanol, métabolite de la MEK, n’est à l’origine d’aucune malformation fœtale, même en présence de toxicité maternelle (baisse du poids corporel et de la consommation de nourriture à 7000 ppm) [7]. Seule une diminution du poids fœtal est observée à partir 3122 mg/kg pc/j de 2-butanol.
L’éthylbenzène (1000 ppm) et la butanone (3000 ppm) n'ont pas d'effet synergique sur la fœtotoxicité du rat (6 h/j, du 6ième au 20ième jour de gestation) [46].