Toxicité aiguë [10]
La toxicité aiguë du n-hexane est relativement faible ; c’est un dépresseur du système nerveux central et un irritant respiratoire et cutané. Il est légèrement irritant pour les yeux.
Chez le rat, la toxicité orale est relativement faible : le n-hexane entraîne une salivation excessive et une dépression du système nerveux central. Les DL50 sont de 15840 mg/kg pour les rats jeunes (âgés de 14 jours) et 28700 mg/kg pour les rats adultes (âgés de 12 mois). Par ailleurs, il existe un risque d’aspiration du liquide dans les poumons : l’aspiration de 0,2 mL est létale en quelques secondes par arrêt cardiaque, paralysie respiratoire et asphyxie.
L’inhalation de fortes concentrations de n-hexane (2000 à 8000 ppm pendant 8 h) provoque, pendant l’exposition chez le rat, des signes de dépression du système nerveux central (sédation, hypothermie, paralysie des paupières) et une irritation du système respiratoire, réversibles après l’exposition. A partir de 48000 ppm, des crampes et une paralysie totale surviennent. Chez la souris, l’exposition à 32000 ppm pendant 30 à 60 min déclenche une anesthésie profonde et une exposition de 34000 à 42000 ppm, un arrêt respiratoire dans les 4 à 5 min. La CL50 4 heures chez le rat est de 73680 ppm.
Une application cutanée d’hexane commercial (1320 - 3300 mg/kg, n-hexane à 45 %, 4 h sous occlusion) perturbe le comportement et la coordination des lapins exposés, mais sans entraîner la mort (DL50 > 3300 mg/kg) [1].
Irritation, sensibilisation
L’application cutanée unique de 0,5 mL de n-hexane pendant 24 h sous occlusion provoque une légère irritation sur la peau de lapin. Cette réaction devient plus sévère en cas d’applications répétées (10 jours de suite).
L’instillation dans l’œil de lapin de 0,1 mL du produit pur ou de qualité commerciale n’entraîne qu’une légère irritation (rougeur de la conjonctive réversible en 24 heures) [11]1.1https://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_113§ion=pathologieToxicologie#
L’exposition aux vapeurs de n-hexane supérieures à 1500 ppm entraîne une irritation des yeux et des voies respiratoires supérieures [8].
Un test de stimulation locale des ganglions lymphatiques chez la souris (LLNA) est négatif [37].
Toxicité subchronique, chronique [33, 38]
L’exposition répétée ou à long terme au n-hexane induit une neuropathie périphérique, qui peut progresser vers la paralysie et éventuellement une quadriplégie, une irritation respiratoire, des atteintes cardiaques et pulmonaires.
Par voie orale, des rats mâles ont été exposés à 568-1135 ou 3973 mg/kg pc/j de n-hexane (gavage, 5 j/sem, 90 à 120 jours). Une diminution significative du gain de poids a été mesurée chez les animaux exposés à 1135 et 3973 mg/kg pc/j. A la plus forte dose, les animaux présentaient de plus une dilatation multifocale des axones et des atteintes de la myéline, une paralysie des membres postérieurs après 100 jours d’exposition [39]. Dans une autre étude, des rats ont été exposés à 40-200-1000 ou 5000 mg/kg pc/j de n-hexane (gavage, 13 semaines). A partir de 200 mg/kg pc/j, les animaux présentaient une augmentation des poids relatifs des reins et du foie, ainsi qu’une augmentation des taux de cholestérol et de triglycérides ; à la plus forte dose, des modifications histopathologiques (non détaillées) ont été observées au niveau du foie et des reins, des glandes surrénales, de la rate, des testicules, du thymus et des nerfs périphériques. A partir de ces résultats, une NOAEL autour de 1000-1135 mg/kg pc/j a été déterminée pour les effets neurologiques chez le rat.
Des effets cardiaques ont été rapportés chez le rat, exposé par gavage à 189 mg/kg pc/j pendant 30 jours (réduction du seuil de fibrillation ventriculaire, baisse des taux de magnésium et de potassium dans le myocarde et modifications histopathologiques du cœur). Récemment, différentes atteintes ont été observées au niveau des poumons de rats mâles exposés à 300-600 ou 1200 mg/kg pc/j pendant 8 semaines : à partir de 300 mg/kg pc/j, atteintes hématologiques (augmentation des lymphocytes, des globules blancs, des granulocytes et des éosinophiles), biochimiques (augmentation des taux de malonaldéhyde et baisse du taux de glutathion) et histopathologiques (lésions de type pneumonie interstitielle aiguë puis bronchopneumopathie multifocale et lésions fibronécrotiques), dont la sévérité et l’intensité augmentent avec la dose [40].
Par inhalation, les effets neurotoxiques visibles sont précédés par des modifications histopathologiques des fibres nerveuses. Ainsi, à partir de 200 – 500 ppm (12 h/j, 24 sem), les rats mâles exposés présentaient une dégénérescence des gaines de myéline et des axones, une diminution de la vitesse de conduction nerveuse au niveau des nerfs moteurs et des nerfs mixtes et une diminution de la latence distale. Des rats exposés en continu à 400-600 ppm de n-hexane (pouvant aller jusqu’à 162 jours) ont développé une neuropathie centrale des fibres myélinisées[41]. A partir de 1200 à 3000 ppm (rats mâles, 12 h/j, 16 sem), un gonflement paranodulaire est observé ; la force de préhension des animaux est diminuée ainsi que leur activité motrice et leurs mouvements sont ralentis. La LOAEC pour les effets neurologiques est de 200 ppm chez le rat [42].
Au cours d'une étude de 13 semaines réalisée sur des souris, des gonflements paranodulaires du nerf tibial ont été observés chez les 2 sexes, ainsi qu’une diminution de l'activité motrice chez les femelles à 10000 ppm [43].
Selon la sévérité de la lésion, les effets neurotoxiques peuvent être réversibles ; ils sont augmentés en présence de méthyléthylcétone, de méthylisobutylcétone ou de composés du plomb, et diminués en cas d’exposition simultanée au toluène. La 2,5-hexanedione serait responsable de la neurotoxicité induite en se liant aux groupements ɛ-aminés de la lysine des protéines. La neurotoxicité, observée lors d’expositions continues, est peu présente lors d’expositions intermittentes.
On observe également une irritation du tractus respiratoire supérieur chez la souris (500 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 13 sem) et une atteinte pulmonaire, légère chez le rat mâle (dégénérescence graisseuse de l’épithélium alvéolaire, 500 ppm, 8 h/j, 48-70 j), sévère chez le lapin mâle (emphysème, fibrose ; 3 000 ppm, 8 h/j, 5 j/sem, 24 sem ; [44]).
Effets génotoxiques [10]
La majorité des tests in vitro réalisés avec le n-hexane sont négatifs. In vivo, suite à des expositions par inhalation chez le rat, le n-hexane induit des aberrations chromosomiques et des anomalies spermatiques.
In vitro
Les résultats des différents tests in vitro disponibles sont présentés dans le tableau ci-dessous.
Test | Souche ou lignée | Résultats | |
Mutation bactérienne | S. typhimurium, B. subtilis, E. coli | Négatif +/- activation métabolique | [43] |
Mutation cellules de mammifères | Cellules de lymphome de souris | 200 µg / plaque : négatif +/- activation métabolique 500 µg/plaque : légère augmentation des mutations en l’absence d’activation métabolique | [33] |
Aberrations chromosomiques | Cellules ovariennes de hamster chinois (CHO) Fibroblastes de hamster chinois | Négatif +/- activation métabolique Augmentation de la polyploïdie, sans activation métabolique | [43] [45] |
Echange de chromatides soeurs | Cellules ovariennes de hamster chinois (CHO) | Positif uniquement avec activation métabolique (mais sans lien avec la dose) | [43] |
In vivo
Les résultats des différents tests in vivo disponibles sont présentés dans le tableau ci-dessous.
Test | Souche ou lignée / espèce | Résultats | |
Essai de létalité dominante | Souris (0-100-400 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 8 sem) | Négatif | [10] |
Souris (0-200-1000-5000 ppm, 20 h/j, 5 sem) | Négatif | [46] |
Mutagénicité cellules germinales | Rat (0-5000 ppm, 16 h/j, 2 à 8 jours) | Anomalies spermatiques présentes | [47] |
Souris (0-200-1000-5000 ppm, 20 h/j, 5 jours) | Pas d’anomalie spermatique | [48] |
Echanges de chromatides sœurs | Souris (injection ip, 0-500-1000-2000 mg/kg), cellules de moelle osseuse | Négatif | [43] |
Aberrations chromosomiques | Rats (0-150-300-600 ppm, 6 h/j, 5j), cellules de moelle osseuse | Positif | [49] |
Rats (0-100-400 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 4 sem), cellules de moelle osseuse | Positif | [38] |
Souris (injection ip, 500-1000-2000 mg/kg), cellules de moelle osseuse | Négatif | [43] |
Micronoyaux | Souris (0-1000-4000-10000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 13 sem), érythrocytes | Négatif | [43] |
Souris (injection ip, 500-1000-2000 mg/kg), érythrocytes | Négatif | [43] |
Effets cancérogènes
Chez le rat et la souris, le n-hexane ne présente pas d'effets cancérogènes lorsqu'il est inhalé ; chez la souris femelle, une augmentation de l’incidence des tumeurs hépatiques est rapportée à la plus forte concentration.
Une exposition de 2 ans par inhalation (hexane commercial, 52,2 % de n-hexane, 0-900-3000-9000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem.) induit, chez le rat, une hyperplasie épithéliale nasale due à l’irritation et, chez la souris femelle, une augmentation des adénomes et carcinomes hépatocellulaires à la plus forte concentration [50]. Ces résultats sont difficiles à interpréter puisqu'il s'agit d'un hexane commercial contenant d'autres composants.
Par voie cutanée, il n’est pas tumorigène chez la souris en présence d’huile de croton, ni promoteur après induction avec du diméthylbenz[a]anthracène [51].
Effets sur la reproduction
Le n-hexane est toxique pour les cellules germinales du rat mâle et de la souris femelle, embryotoxique et fœtotoxique mais pas tératogène.
Fertilité
Par voie orale, une atrophie de l’épithélium germinal testiculaire est observée à la plus forte dose testée (rat, gavage, 570-1140-4000 mg/kg pc/j, 5 j/sem, 90 jours) [39]. Aucun effet sur le sperme ou les testicules n’est rapporté à la suite d’une exposition à 10000 mg/kg pc/j pendant 5 jours ou 20000 mg/kg pc pendant un jour seulement [52].
Des souris femelles ont été exposées par inhalation à 0-3-15,1-75,8 ppm de n-hexane pendant 5 semaines (4 h/j, 7 j/sem). A la plus forte concentration, les animaux ont perdu du poids, ils sont léthargiques, sans appétit et présentent des ulcères et une rhabdomyolyse au niveau de l’abdomen. A la plus forte concentration, l’œstrus est modifié (notamment, une diminution de la durée du diœstrus) et le développement folliculaire est perturbé (diminution du nombre de follicules matures dans les ovaires et augmentation du nombre de follicules dégénérescents). Pour toutes les femelles exposées, le nombre d’ovules fécondés et le taux sérique de progestérone sont diminués par rapport aux témoins [53].
Chez le rat mâle, l’exposition par inhalation (5000 ppm, 24h ou 16 h/j pendant 2 à 8 jours ou 16 h/j, 6 j/sem pendant 6 semaines) provoque des lésions testiculaires, au niveau de l’épithélium germinatif après 24 heures seulement (spermatocytes primaires et spermatides matures), qui augmentent avec la concentration ; les lésions progressent après arrêt de l’exposition jusqu’à une disparition complète des cellules germinales dans les tubes séminifères. Les effets testiculaires apparaissent avant les effets neurologiques (polyneuropathie observée après 4 semaines de traitement, dans le 3è groupe) ; ils sont réversibles après une exposition unique et irréversibles pour les expositions répétées [47]. Une atrophie des tubes séminifères et une diminution du poids des testicules sont rapportées chez des rats 10 mois après avoir été exposés à 1000 ppm (18 h/j, 7 j/sem, pendant 61 jours) ; 14 mois après l’exposition, une perte totale de cellules germinales est observée chez quelques rats [54].
A contrario, aucun effet n’est observé au niveau des organes reproducteurs de rats mâles et femelles (0-3000-6500-10000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 13 semaines) (Cavender et al 1984) ou de souris (0-500-1000-4000-10000 ppm, 6h/j, 5 j/sem, 13 semaines) (Dunnick et al 1989 dans [43]).
Au cours d’une étude sur 2 générations menée avec du n-hexane commercial (rat, 900-3000-9000 ppm, 6 h/j, 5 j/sem), aucun effet sur la fertilité n’est rapporté (rapport industriel dans [5]). Il n’y a pas d’effet sur la fertilité chez la souris mâle lors d’un test de létalité dominante à la concentration de 100 ou 400 ppm, 6 h/j, 5 j/sem., 8 sem (Litton Bionetics 1980 dans [8]).
Développement
Par voie orale, chez la souris, seule une diminution du poids fœtal est rapportée aux concentrations toxiques pour les mères (7900 et 9900 mg/kg pc/j, 3 fois/j, du 6è au 15è jour de gestation) [55].
Lorsqu’il est administré par voie respiratoire, le n-hexane provoque un retard de croissance chez le rat et la souris. Suite à une exposition à 0-200-1000 ou 5000 ppm de n-hexane (20 h/j, du 6è au 19è jour de gestation), aucun effet n'est rapporté sur le nombre d’implantations, le sexe ratio et le pourcentage de nouveau-nés vivants ou de résorptions par portée. Une diminution du poids fœtal est rapportée chez les mâles aux 2 plus fortes concentrations et chez les femelles, seulement à 5000 ppm. Un retard d’ossification est observé à 5000 ppm, concentration entraînant une diminution du gain de poids des mères. Aucune malformation n’est constatée. A partir de ces résultats, la NOAEC pour le développement est de 200 ppm chez le rat [56].
Chez la souris, une diminution du poids fœtal et une baisse du nombre de fœtus vivants par portée sont observées uniquement à la plus forte concentration testée, en présence de toxicité maternelle (5000 ppm, 20 h/j, du 6è au 17è jour de gestation) : à partir de ces résultats, la NOAEC est de 1000 ppm [48]. Une augmentation des résorptions a pu être observée mais seulement à 200 ppm [57].
Chez des ratons, exposés in utero (0-800-1000 ppm, 23 h/j, 7 j/sem, du 1er au 21ème jour de gestation) et pendant la période postnatale (jusqu’au 21ème jour postnatal), une diminution du poids des nouveau-nés est observée ainsi qu’un retard dans le développement du cortex cérébelleux. A ces 2 doses, les mères présentaient une neurotoxicité [58].