Eléments de prévention médicale (décembre 2014)
I. Examen médical initial
Cet examen a surtout pour but d'informer et de sensibiliser le salarié au risque amiante et aux moyens de s'en protéger, et doit évoquer les risques pour la santé associés, ainsi que l’effet d’éventuelles coexpositions conjointes (tabac en particulier). Depuis le décret n° 2012-135 du 30 janvier 2012 (relatif à l’organisation de la médecine du travail), le médecin du travail doit « tenir compte des bonnes pratiques existantes » pour organiser le suivi médical des agents dont il assure la surveillance. Il peut proposer une radiographie thoracique de face et des explorations fonctionnelles respiratoires (bilan de référence) dans le contexte évoqué.
Des atteintes cardiaques et/ou respiratoires sévères contre-indiquent le port des équipements de protection individuelle. Mais il n'existe aucun consensus sur des critères précis.
II. Examen médical périodique
Le médecin du travail doit « tenir compte des bonnes pratiques existantes » pour organiser le suivi médical. En l’occurrence, et même si la Commission d'Audition réunie par la Haute Autorité de Santé en 2010 concernait la surveillance post-professionnelle (SPP) après exposition à l'amiante (et non la surveillance post-exposition ou SPE), il est légitime d'extrapoler les préconisations de la SPP formulées par cette Commission aux personnes relevant d’une SPE. Dans ces conditions, la pratique de radiographie pulmonaire ou d’épreuves fonctionnelles respiratoires n’est pas recommandée pour le dépistage des affections liées à l’amiante.
La pratique d’un examen tomodensitométrique thoracique peut être proposée, en respectant plusieurs précautions importantes : l’examen doit être précédé de la délivrance d’une information spécifique sur l’examen et ses résultats et bénéfices attendus, ainsi que sur les conséquences en termes de morbi-mortalité des explorations diagnostiques invasives qui pourraient découler des résultats de l’examen (en particulier, la mise en évidence fréquente de nodules justifie souvent au minimum d’un suivi spécifique) . L’examen devrait être réalisé dans des centres respectant les recommandations du protocole spécifique d’imagerie proposé par la Haute autorité de santé en octobre 2011 (conditions techniques, compte rendu, protocole de relecture par un radiologue ayant suivi une formation appropriée).
L’objectif actuel de l’examen tomodensitométrique thoracique est la mise en évidence de pathologies pleuro-pulmonaires bénignes (essentiellement plaques pleurales). Il ne devrait être proposé qu’aux personnes ayant été exposées à l’amiante de manière active pendant une durée minimale cumulée de 1 an, avec une latence minimale de 30 ans à partir du début de cette exposition pour les expositions dites «intermédiaires» (au sens du jury de la Conférence de consensus de 1999 sur la surveillance médicale des personnes exposées ou ayant été exposées à l’amiante), et de 20 ans pour les expositions «fortes». Lorsque l’examen tomodensitométrique thoracique initial est normal, il est recommandé de le renouveler au bout de 10 ans chez les sujets dont l’exposition cumulée est «intermédiaire», et au bout de 5 ans en cas d’exposition «forte».
La surveillance médicale, selon les mêmes modalités, doit être poursuivie en cas de cessation de l'exposition, même en cas de changement d'entreprise (suivi post expositionnel).
Lors du départ du salarié de l'établissement, une attestation d'exposition au risque, complétée par l'employeur et le médecin du travail, doit être remise au salarié, précisant notamment la nature et la durée de l'exposition, les paramètres de l'empoussièrement et les principales constatations médicales.
Le dossier médical , comme tout dossier concernant des cancérogènes, doit être conservé 50 ans après la cessation de l’exposition.
III. Surveillance post-professionnelle
La personne qui a été exposée à l'amiante peut demander, si elle est inactive, demandeur d'emploi ou retraitée, à bénéficier d'une surveillance médicale post professionnelle prise en charge par la Caisse de Mutualité sociale agricole (MSA) au titre de l'arrêté du 28 février 1995 modifié.
Selon des dispositions du code de la Sécurité sociale, une attestation d’exposition au risque doit être remise au salarié lors de la cessation de l’activité. Remplie par l’employeur, elle précise notamment la nature, le niveau et la durée de l’exposition.
L'intéressé adresse ce document à sa Caisse de MSA et peut ensuite bénéficier d'une surveillance médicale par le praticien de son choix selon les modalités suivantes : une consultation médicale et un examen tomodensitométrique (TDM) thoracique réalisés tous les 5 ans pour les personnes relevant de la catégorie des expositions fortes et 10 ans pour celles relevant de la catégories des expositions intermédiaires dans les conditions prévues par le protocome de suivi validé par la Haute autorité de santé.
Il est à noter que tant lors du suivi post-exposition (SPE) que lors de la surveillance post-professionnelle (SPP), le protocole de suivi par examen tomodensitométrique (en particulier sa périodicité) n’est pas adapté au dépistage des affections thoracique malignes liées à l’amiante. S’il est actuellement admis qu’il n’est pas recommandé de procéder à un dépistage d’une affection comme le mésothéliome, le cas du cancer bronchopulmonaire fait l’objet de débats. Un large essai nord-américain a démontré un bénéfice du dépistage du cancer bronchopulmonaire par examen tomodensitométrique, dans des populations sélectionnées (âgées de 55 à 74 ans, et ayant un tabagisme élevé à plus de 30 paquets-années, arrêté depuis moins de 15 ans), avec une diminution de la mortalité spécifique par cancer bronchopulmonaire. Plusieurs sociétés savantes nord américaines ont recommandé un tel dépistage s’appuyant sur l’examen tomodensitométrique thoracique dans des populations considérées à haut risque de cancer bronchopulmonaire, mais ce dépistage ne fait pas encore l’objet de recommandations par les autorités sanitaires françaises.
Le contenu de la surveillance médicale pour un éventuel dépistage du cancer bronchopulmonaire est susceptible d’évoluer en fonction des recommandations de bonnes pratiques élaborées par plusieurs Sociétés savantes françaises (Société Française de Médecine du Travail, Société de Pneumologie de Langue Française, Société Française de Radiologie).