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Crésols

Fiche toxicologique n° 97

Sommaire de la fiche

Édition : 2004

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [11, 12]

    Les crésols peuvent pénétrer par voies digestive, respiratoire ou cutanée. Les métabolites urinaires sont éliminés essentiellement par voie urinaire.

    Chez l'animal

    Les crésols peuvent pénétrer dans l'orga­nisme par voies percutanée, digestive ou pul­monaire (sous forme de vapeurs à haute tem­pérature ou d'aérosols). Les conditions d'ab­sorption, de détoxication et d'excrétion sont très semblables à celles du phénol.

    La vitesse d'absorption cutanée dépend plus de la surface exposée que de la concen­tration du produit en contact.

    La voie principale de métabolisation com­porte une oxydation puis une conjugaison avec les acides sulfurique ou glucuronique.

    L'excrétion se fait principalement dans l'urine mais des quantités non négligeables sont élimi­nées dans la bile et des traces se retrouvent dans l'air expiré. Chez le lapin ayant reçu 200 à 250 mg/kg de crésol par voie orale, les composés conjugués représentent, selon l'isomère, 70 à 87 % des métabolites excrétés dans l'urine, le glucuronide de méthylphényle représentant à lui seul 60 à 72 %, le sulfate 10 à 15 %.

    Dans le cas des isomères ortho ou méta, on a également un dérivé hydroxylé : le 2,5-dihydroxytoluène. Dans le cas de l'isomère para, on retrouve de l'acide p-hydroxybenzoïque libre ou conjugué.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [9-15]

    L'administration par voies orale ou cutanée provoque une dépression du système nerveux central ainsi que des lésions corrosives soit du tube digestif soit de la peau. Les crésols induisent de graves lésions, parfois irréversibles, sur la peau et les yeux.

    Par voie orale, les DL50 des 3 isomères sont comprises entre 120 et 240 mg/kg chez le rat si le produit est ingéré non dilué, entre 1350 et 1800 mg/kg s'il est administré en solution à 10 % dans l'huile d'olive ; dans ces dernières condi­tions, la sensibilité du lapin est proche de celle du rat, celle de la souris est un peu plus grande (DL50 comprises entre 344 et 828 mg/kg).

    Par voie percutanée, les DL50 sont com­prises entre 620 et 1100 mg/kg chez le rat, entre 300 et 2050 mg/kg chez le lapin.

    Les effets systémiques observés sont iden­tiques dans les 2 cas ; ils consistent essentiel­lement en une dépression du système nerveux central avec hypoactivité, tremblements et convulsions. Les crésols exercent d'autre part, localement, une action corrosive très marquée qui se manifeste, selon le cas, au niveau de la peau ou du tractus gastro-intestinal par une nécrose cellulaire. L'autopsie des animaux décédés révèle un œdème pulmonaire hémor­ragique, des hyperémies hépatique (avec nécrose cellulaire), rénale (avec atteintes tubulaires) et pancréatique.

    La voie respiratoire a été beaucoup moins étudiée en raison notamment des difficultés techniques liées à la faible tension de vapeur des crésols à la température normale. On a rapporté toutefois des survies de rat après une exposition d'une heure à 710 mg/m3 (isomères méta ou para) ou à 1220 mg/m3 (isomère ortho), après 8 heures dans une atmosphère saturée en crésol à 25 °C et après 24 heures à 2,4 mg/m3. Dans le cas d'un mélange vapeurs-aérosols, une CL50 a pu être déterminée chez la souris : 179 mg/m3 pour une exposition de 2 heures.

    D'une façon générale, l'isomère méta semble un peu moins toxique que les 2 autres.

    En solutions concentrées, les crésols ont un effet corrosif sur la peau.

    Les expérimentations sur le lapin révèlent que, si des concentrations de l'ordre de 2 à 3 % ne provoquent sur l'œil qu'une kératite réver­sible, dès 10 % on peut noter des effets ocu­laires sévères et définitifs [16].

    Toxicité subchronique, chronique [9-12]

    Une dépression du système nerveux central, une irritation des muqueuses et des effets hépatiques, rénaux et hématologiques ont été rapportés.

    L'application quotidienne pendant 6 se­maines d'une solution à 0,5 % d'ortho- ou de méta-crésol sur la peau de la souris est bien tolérée.

    L'inhalation par la souris 2 heures/jour, 6jours/semaine, pendant 1 mois, d'un mélange vapeurs-aérosols de crésols à une concentra­tion moyenne de 50 mg/m3 (26 à 76 mg/m3) pro­voque des effets semblables à ceux que l'on observe en intoxication aiguë : irritation des muqueuses, dépression du système nerveux central, hyperémies pulmonaire, hépatique et rénale ; on note en plus une réduction de la croissance pondérale et une dégénérescence des cellules nerveuses et myocardiques.

    Chez des rats exposés 6 heures/jour, 5 jours/semaine, pendant 2 mois, puis 4 heures/jour, 5 jours/semaine, pendant 2 autres mois, à une concentration de vapeurs de 9 mg/m3, on note des effets neurologiques (perte du réflexe de défense) et hématolo­giques (hyperleucocytose). Chez ce même ani­mal, une exposition de 3 mois (durée quoti­dienne non précisée) à une concentration de 0,05 mg/m3 aurait provoqué une réduction de la croissance pondérale et des effets neurolo­giques (excitabilité) ; histologiquement, on aurait observé une dénaturation des protéines du tissu pulmonaire.

    Effets génotoxiques

    Ils n'induisent pas d'effet génotoxique dans les tests classiques in vitro et in vivo.

    Les 3 isomères donnent des résultats néga­tifs dans le test de Ames avec les souches TA 98, TA 100, TA 1535 et TA 1537 de Salmonella typhimurium, avec ou sans activa­tion métabolique [17]. Ils n'induisent pas d'augmentation significative de la fréquence des échanges de chromatides sœurs in vitro chez des fibroblastes humains (sauf pour l'iso­mère ortho à concentration cytotoxique) ni in vivo chez la souris [18].

    Le méta-crésol inhibe in vitro la polymérase réparatrice d'ADN de cellules HeLa en culture [19].

    À concentration élevée, les 3 isomères - mais surtout l'isomère méta - induisent des aberrations chromosomiques dans les racines d'Allium cepa (C-mitose, mais peu de frag­mentation de chromosomes) [20].

    Effets cancérogènes [12]

    Pas de donnée disponible

    L'application 2 fois par semaine pendant 19 semaines d'une solution à 20 % de crésol dans le benzène sur la peau de la souris favo­rise très significativement la formation de papillomes, induite par une application préa­lable de diméthylbenzanthracène (application unique une semaine avant l'administration de crésol). Elle ne fait pas en revanche apparaître de carcinomes.

    Aucune étude de cancérogénèse n'a été publiée.

    Effets sur la reproduction

    Pas de donnée disponible

  • Toxicité sur l’Homme

    Comme chez l'animal, les intoxications aiguës provoquent une atteinte neurologique ainsi que des effets corrosifs sur le tube digestif ou la peau ; ces signes peuvent se compliquer de lésions cardiovasculaires, hépatiques et rénales. L'inhalation se traduit par une irritation et une sécheresse de la muqueuse respiratoire. Les crésols provoquent des lésions cutanées et oculaires sévères. L'intoxication chronique se caractérise par une altération de l'état général associée à des altérations hépatique, rénale et également pancréatique. Une dermatose chronique peut être observée avec parfois des altérations de la pigmentation.

    On ne dispose pas, chez l'homme, d'obser­vations sur les isomères séparés. Compte tenu des résultats expérimentaux, il faut considérer qu'ils exercent des effets biologiques voisins.

    Toxicité aiguë [3, 11, 12, 22]

    Les intoxications peuvent se produire par ingestion, inhalation ou lors de projections du produit sur de grandes surfaces de peau.

    Les signes les plus importants sont rappor­tés lors d'ingestions (même accidentelles) où l'on peut noter, après une phase de latence de l'ordre de 20 à 30 minutes, des troubles diges­tifs liés à l'effet caustique du produit (brûlures bucco-œsophagiennes, douleurs abdominale et rétrosternale, nausées, vomissements), puis une atteinte systémique avec des troubles neuro-musculaires (coma, myoclonies, convul­sions), cardio-vasculaires (hypotension et bra­dycardie) et, dans certains cas, une méthémo­globinémie, une acidose métabolique et une coagulopathie de consommation. Ultérieure­ment, ces cas peuvent se compliquer d'une cytolyse hépatique, d'une nécrose tubulaire rénale (par action directe ou par précipitation de myoglobine dans les tubules) et d'œdème aigu du poumon parfois retardé.

    En raison de la faible tension de vapeur des crésols, il est rare que les concentrations atmosphériques soient assez fortes dans l'in­dustrie, sauf en cas de travail sur le produit à température élevée, pour provoquer des atteintes graves. Des volontaires exposés à 6 mg/m3 se sont plaints d'une sécheresse des muqueuses respiratoires, d'une constriction nasale et d'une irritation de la gorge.

    Localement, les crésols ont une action caus­tique sur la peau et les muqueuses. Sur la peau, les lésions, au début douloureuses, deviennent ensuite indolentes. Les tissus tou­chés ont un aspect blanchâtre, épaissi et ridé, puis ils prennent un aspect noirâtre ou brun signant la nécrose.

    Sur l'œil, on peut observer une conjonctivite et une kératite avec parfois une réduction séquellaire de l'acuité visuelle. L'importance des troubles est liée à la concentration de la solution et à la rapidité du lavage oculaire [16].

    Toxicité chronique [12, 22]

    Une absorption prolongée ou répétée de faibles quantités de crésols à travers la peau ou par voie respiratoire peut provoquer, à terme, une intoxication systémique : les troubles fonc­tionnels consistent essentiellement en cépha­lées, nausées, dysphagie, hypersalivation, diar­rhée, anorexie, hypertension, tremblements. Le pronostic est réservé lorsque surviennent des lésions hépatiques, rénales ou pancréatiques.

    Localement, des dermatoses peuvent surve­nir par contact répété avec des solutions de cré­sols faiblement concentrées (jusqu'à moins de 0,1 % pour certains sujets hypersensibles). Ces lésions peuvent aboutir à des nécroses tissu­laires et, exceptionnellement, à des troubles de pigmentation (ochronose) intéressant la peau, la sclérotique, le nez, les oreilles et certains tis­sus fibreux.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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