Toxicité aiguë
Le nitrobenzène entraine des atteintes hématologiques (méthémoglobinémie) avec modifications du tissu splénique, hépatiques parfois nécrotiques et neurologiques pouvant aboutir à un coma. Son effet irritant sur la peau et sur l'œil est modéré.
La DL50 chez le rat est environ de 700 mg/kg et 590 mg/kg chez la souris par voie orale et 2100 mg/kg chez le rat par application cutanée [20].
Les atteintes observées sont d’intensité variable selon l’espèce considérée :
- hématologiques [18, 19, 21, 22] : le nitrobenzène produit une méthémoglobinémie (chez le lapin, le chien, le rat et la souris ; cette dernière espèce est plus résistante que les autres), associée à une sulfhémoglobinémie qui la précède et persiste après son retour à la normale. Chez le rat, la méthémoglobinémie est obtenue pour des doses orales uniques supérieures à 200 mg/kg ; elle est influencée par l’état de la flore intestinale. La rate est le siège de modifications histologiques (hématopoïèse extramédullaire, congestion sinusoïdale, macrophages remplis d’hémosidérine). Ces modifications spléniques qui sont absentes chez la souris semblent correspondre au piégeage intra-splénique d’érythocytes anormaux à partir d’un certain seuil de méthémoglobinémie.
- hépatiques [19] : l’administration orale d’une dose unique de 450 mg/kg produit chez le rat des nécroses centrolobulaires. Aux doses plus faibles (110 mg/kg), le nitrobenzène provoque des hypertrophies nucléoaires hépatocellulaires ;
- neurologiques 1[15, 19] : les symptômes relevés expérimentalement sont un nystagmus, une paralysie, des tremblements, une aréflexie et un coma.
On trouve des lésions dégénératives des cellules de Purkinje du cervelet chez le lapin, des hémorragies au niveau du tronc cérébral et du cervelet ainsi qu’un ramollissement et une vacuolisation du tissu des pédoncules cérébelleux chez le rat et de la moelle épinière chez le rat et le lapin. Chez le rat, la dose orale unique responsable de ces lésions, est supérieure à 550 mg/kg. On ne sait si ces lésions reflètent une encéphalopathie anoxique secondaire à la méthémoglobinémie, une encéphalopathie hépatique ou une action propre du nitrobenzène ou de l’un de ses métabolites. - testiculaires (voir § « Effets sur la reproduction »).
L’application, chez le lapin, d’une dose de 500 mg pendant 24 h sur la peau ou dans l’œil provoque une irritation modérée [20].
1https://www.inrs.fr/publications/bdd/fichetox/fiche.html?refINRS=FICHETOX_84§ion=pathologieToxicologie#ancre_BiblioTexte
Toxicité subchronique, chronique [27 à 29]
L'inhalation répétée induit une méthémoglobinémie, une encéphalopathie et des atteintes hépatique et rénale.
Chez le rat et la souris, l’exposition par inhalation (10 à 15 ppm ou 5 à 50 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, resp. 2 et 13 sem) est responsable de méthémoglobinémie, d’encéphalopathies compliquées de lésions dégénératives ou adaptatives du foie, des reins et de la rate chez les deux espèces, et de dégénérescences testiculaires chez le rat. Des effets systémiques identiques ont été retrouvés après exposition par inhalation de rats et de souris (respectivement 1 à 25 ppm et 5 à 50 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 2 ans) avec en plus une hyperplasie thyroïdienne et une dégénérescence, voire une aplasie, de l’épithélium olfactif.
Effets génotoxiques [19, 30 à 32]
Certains essais in vitro sont positifs, les tests in vivo sont négatifs.
Le nitrobenzène ne provoque pas de mutation génique ponctuelle chez Salmonella typhimurium en présence ou en l’absence d’activation métabolique ainsi que dans les conditions anaérobies d’essai garantissant l’activité nitro- réductase bactérienne. Toutefois, la volatilité du nitrobenzène n’a pas été contrôlée dans ces essais. Il augmente l’incidence des mutations récessives liées au sexe chez la drosophile et exerce une activité mutagène chez Salmonella typhimurium TA 98 en présence simultanée d’un système d’activation métabolique et d’un agent comutagène (norharman).
Les conditions expérimentales insuffisamment précisées dans le premier cas et singulières dans le second, empêchent de conclure à la génotoxicité du nitrobenzène.
Chez le rat, l’inhalation d’une concentration hématotoxique (50 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 4 sem) ne produit pas d’effet clastogène au niveau des lymphocytes spléniques et circulants.
Effets cancérogènes [29]
Le nitrobenzène provoque des tumeurs dont le site et la nature varie selon l'espèce traitée et le sexe (poumons, thyroïde, sein, utérus).
L’exposition par inhalation d’une part chez la souris B6C3F1 des deux sexes, d’autre part chez le rat Fischer 344 des deux sexes et Sprague-Dawley (CD) mâle (respectivement 5 à 50 ppm et 1 à 25 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 2 ans) n’a pas sérieusement affecté les animaux, hormis une perte de poids occasionnelle inférieure à 10 %.
Outre la méthémoglobinémie et des altérations non néoplasiques du foie, de la rate, du tractus respiratoire, de la thyroïde et des testicules, une augmentation de l’incidence des tumeurs, dont le site est différent selon l’espèce, la souche et le sexe a été associée au traitement.
On a trouvé une incidence anormalement élevée d’adénomes alvéolaires, bronchiques et thyroïdiens (50 ppm) chez les souris mâles, d’adénocarcinomes mammaires (50 ppm) chez les souris femelles, d’adénomes hépatiques (25 ppm) chez les rats mâles CD et Fischer 344 et de tumeurs de l’utérus (25 ppm) chez les rats femelles Fischer 344.
L’incidence des tumeurs testiculaires n’est pas augmentée chez le rat mâle CD, espèce particulièrement sensible aux effets toxiques du nitrobenzène sur les testicules et souche de rat présentant spontanément une faible incidence de ce type de tumeurs.
La variabilité des localisations néoplasiques est probablement à mettre en relation avec la forte variabilité de la métabolisation du nitrobenzène en fonction de l’espèce, de la souche et du sexe et incite à la prudence pour extrapoler à l’homme les effets cancérogènes expérimentaux du nitrobenzène.
Effets sur la reproduction
Le nitrobenzène est la cause d'une atteinte testiculaire avec réduction de la spermatogenèse qui induit une baisse de fertilité ; cette atteinte semble réversible. Des effets embryo- et foetotoxiques sont notés à des doses toxiques pour les femelles.
Fertilité
Le nitrobenzène induit des effets testiculaires qui peuvent avoir un retentissement sur la fertilité. Administré à une dose orale unique supérieure à 200 mg/kg, le nitrobenzène produit chez le rat des lésions des tubes séminifères (vacuolisation et hypertrophie des spermatocytes primaires et secondaires suivie de nécrose et d’une diminution du nombre de spermatozoïdes dans l’épididyme). Il en découle un blocage de la spermatogenèse d’installation lente (30 jours). Au 100ième jour après le traitement, 90 % de l’épithélium des tubes séminifères sont régénérés[19, 23 à 26]. Des lésions identiques sont produites chez le rat, mais pas la souris, par inhalation de nitrobenzène (50 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 90 j). Dans les études par inhalation, la souris s’est révélée une espèce particulièrement résistante aux effets testiculaires du nitrobenzène.
L’exposition par inhalation de deux générations de rat CD (40 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 10 sem pour les mâles de chacune des deux générations) a été responsable d’une hypofertilité réversible, imputable aux effets testiculaires. La concentration sans effet était de 10 ppm [34].
Développement
L’injection quotidienne de nitrobenzène par voie sous- cutanée à des rates entre le 4ième et 6ième ou entre le 9ième et 12ième jour de la gestation, à la dose de 125 mg/kg, a été responsable de retards d’ossification (3 cas sur 30), d’hydrocéphalie (1 cas sur 30) et d’absence de membre postérieur (1 cas sur 30). Toutefois ces essais insuffisamment contrôlés ont utilisé un nombre limité d’animaux ; leur interprétation en terme d’effet tératogène est par ailleurs difficile du fait de la voie d’administration employée.
L’absence d’embryotoxicité, de fœtotoxicité et de tératogénicité a été montrée en présence de toxicité maternelle après exposition de rats CD à 40 ppm de nitrobenzène, 6 h/j, du 6ième au 15ième jour de la gestation [33].