Toxicité aiguë [4, 9 à 11]
L’ingestion de composés de zinc provoque des troubles du système digestif, des modifications hématologiques ainsi que des lésions du foie, du pancréas et des reins. L'inhalation de composés de zinc (environ 1 mg/m3), en particulier les fumées d'oxyde de zinc, engendre une irritation et une inflammation pulmonaires. De fortes concentrations induisent une pneumonie chronique et la mort probable par détresse respiratoire, insuffisance rénale et acidose respiratoire et métabolique.
Le système digestif est la cible principale du zinc par ingestion ; les animaux exposés présentent des vomissements, des diarrhées, des hémorragies intestinales et des ulcères du pré-estomac. La souris est plus sensible à l'effet létal du sulfate de zinc que le rat ; les autres composés se comportent de façon identique pour les deux espèces (tableau II).
Composé | Espèce | DL50 orale | CL50 |
Chlorure de zinc ZnCl2 | Rat | 350 mg zinc/kg | 1260 mg/m3/30 minutes |
Souris | 329 mg zinc/kg | 354 mg/m3/30 minutes |
Cobaye | 200 mg zinc/kg | |
Oxyde de zinc ZnO | Rat | > 5000 mg/kg | |
Souris | 7 950 mg/kg | 2500 mg/m3 |
Sulfate de zinc ZnSO4 | Rat | 623 mg zinc/kg | |
Souris | 245 - 337 mg zinc/kg | |
Lapin | 2000 mg/kg | |
Sulfate de zinc dihydraté ZnSO4, 2H2O | Rat | 1710 mg/kg | |
Souris | 926 mg/kg | |
Sulfate de zinc heptahydraté ZnSO4, 7H1O | Rat | 1260 mg/kg | |
Souris | 200 mg/kg | |
Tableau II : Toxicité aiguë des composés du zinc.
Le zinc, en induisant la synthèse de métallothionéine intestinale, diminue l'absorption du cuivre alimentaire, ce qui entraîne une anémie sidéroblastique avec pour conséquence une baisse du taux d'hémoglobine, de l'hématocrite, du nombre d'érythrocytes et de leucocytes, et une augmentation des infections, des plaies, des ulcérations de la bouche ou de la gorge, ainsi qu'une faiblesse générale. Des lésions apparaissent dans le pancréas (nécrose des cellules acinaires, métaplasie, fibrose, pancréatite) et les reins (augmentation du poids, néphrose diffuse).
Le système respiratoire est la cible principale du zinc par inhalation, les composés les plus étudiés sont le chlorure et l'oxyde de zinc. Chez le cobaye exposé à des fumées d'oxyde de zinc (1 mg/m3, 3 h/j pendant 3 jours), on observe :
- une inflamation des alvéoles et des canaux alvéolaires avec fonction macrophagique altérée,
- une modification morphologique des poumons (épaississement interstitiel),
- et une altération de la fonction pulmonaire (baisse de la compliance, de la capacité pulmonaire totale et de la capacité de diffusion).
Le rat, le lapin et le chat, exposés pendant 3 heures à 110 - 600 mg zinc/m3, ne présentent qu'une chute de température corporelle et une augmentation du nombre des leucocytes ; à l'autopsie, on observe des signes de bronchopneumonie aux fortes concentrations. Après exposition à des fumées de chlorure de zinc de concentrations ≥ 950 mg zinc/m3 ( 1980 mg/m3 ZnCl2), le rat développe graduellement une détresse respiratoire ; à l'autopsie, on note atélectasie, hyperémie, hémorragies et œdème au niveau pulmonaire.
Irritation
La réponse de la peau reflète la balance entre les effets physiologiques et les effets toxiques du composé de zinc appliqué ; elle dépend du potentiel de ce composé à dénaturer la kératine épidermique et de la capacité du tissu à répondre ou à tolérer l'overdose de zinc. Le chlorure de zinc (solution à 1 % dans l'eau) appliqué en patch ouvert sur le dos des souris, des lapins et cobayes induit une irritation sévère (inflammation locale dermique et épidermique, ulcérations, acanthose folliculaire et hyperkéra- tose) [15]. L' oxyde de zinc (20 % dans du Tween 80) et le sulfate de zinc (1 % dans l'eau) ne sont pas irritants pour le lapin, le cobaye et la souris, mais induisent une hyperplasie épidermique marginale.
L'irritation oculaire chez le lapin est, elle aussi, fonction du composé : le chlorure de zinc est fortement irritant (une solution à 10 % induit larmoiements et conjonctivite réversible, une solution à 50 % provoque une opacité cornéenne) ; le sulfate de zinc (420 mg) et l'oxyde de zinc (500 mg) provoquent une irritation modérée.
Le sulfate de zinc, en irrigation intranasale (0,05 - 1 %) chez la souris, produit après 24 heures une anosmie dont la sévérité est fonction de la concentration (déclin rapide de la faculté de trouver la nourriture et des propriétés olfactives). L'épithélium olfactif est complètement détruit en quelques jours après le traitement ; il se régénère lentement, par petites surfaces, après plusieurs mois. De même, chez le rat, une application de solution de sulfate de zinc sur le pourtour du nez provoque la perte de l'odorat.
Toxicité subchronique, chronique [9, 11]
Les composés du zinc, en exposition prolongée, induisent par voie orale, une irritation gastro-intestinale et une anémie, et par inhalation, une irritation pulmonaire.
Des expositions orales à 174 - 191 mg zinc/kg/j pendant 3 à 12 mois n'affectent pas le poids corporel du lapin et du rat ; par contre, les systèmes digestif et sanguin restent la cible privilégiée d'une exposition prolongée aux composés du zinc.
Le sulfate de zinc, en exposition répétée pendant 13 semaines par voie orale, agit au niveau du tractus gastrointestinal des rats (510 mg zinc/kg/j) et des souris (1120 mg zinc/kg/j) en provoquant :
- des ulcères de l'estomac,
- une anémie suite à des hémorragies intestinales,
- des effets rénaux (augmentation du poids et lésions) chez la souris,
- des altérations structurales et fonctionnelles du pancréas endocrine (altérations cellulaires des îlets, nécrose cellulaire, métaplasie, fibrose, pancréatite) chez le rat et la souris,
- la létalité chez 5 animaux sur 12.
Le NOAEL, pour une exposition de 13 semaines, est de 230-240 mg/kg/j chez la souris mâle et le rat des deux sexes, et de 479 mg/kg/j chez la souris femelle [11]. À dose plus faible (70 mg zinc/kg/j dans l'eau de boisson), le sulfate de zinc induit chez la souris, après 3 mois d'exposition, une hypertrophie du cortex surrénalien et une augmentation de son contenu lipidique, ainsi qu'une hypertrophie de l'hypophyse [11].
Le chlorure de zinc provoque chez le rat une baisse du taux d'hémoglobine et du nombre d'érythrocytes (25 mg/kg/j, 4 sem dans l'eau de boisson), une modification de poids du cerveau et des testicules (5 690 mg/kg de nourriture/j, soit environ 114 mg zinc/kg/j, pendant 13 semaines).
Des expositions répétées au chlorure de zinc par inhalation occasionnent chez le cobaye (248 mg/m3 soit 119 mg zinc/m3, 1 h/j, 5 j/sem, 3 sem), le rat et la souris (254 mg/m3 soit 121,7 mg zinc/m3, 1 h/j, 5 j/sem, 20 sem) une inflammation pulmonaire chronique avec modification de la fonction pulmonaire, infiltration de leucocytes et de macrophages et fibrose[16]. Il n'y a pas d'effets gastro-intestinal, hépatique, rénal ou cardiaque à ces concentrations.
L'oxyde de zinc produit une inflammation pulmonaire chez le rat, à la concentration de 15 mg/m3, 8 h/j, 5 j/sem, pendant 84 jours.
Effets génotoxiques [9]
Les composés inorganiques du zinc ont tendance à être dissociés, le zinc, se fixant aux constituants du milieu cellulaire, devient inactif. Les études de génotoxicité dans de nombreux systèmes n'ont pas montré d’effet mutagène induit par les composés du zinc, mais un effet clastogène, faible in vitro et fonction de la dose in vivo.
In vitro, l'exposition aux composés du zinc n'augmente pas la fréquence des mutations dans les tests bactériens (chlorure de zinc faiblement positif, sulfate et oxyde de zinc négatifs) ou cellulaires (mutation : lymphome de souris, chlorure de zinc négatif ; synthèse non programmée de l'ADN : hépatocytes de rat, chlorure et sulfate de zinc négatifs). Cependant, le chlorure de zinc semble avoir un faible effet clastogène sur les lymphocytes humains en culture.
In vivo, des aberrations chromosomiques et des échanges entre chromatides sœurs ont été observés dans la moelle osseuse de rats exposés au chlorure de zinc dans l'eau de boisson (14,8 - 17,5 mg zinc/kg/j). Administré par voie intrapéritonéale chez la souris, ce composé induit une augmentation significative des aberrations chromosomiques dans les cellules de la moelle osseuse, à toutes les concentrations testées (7,5 - 10 et 15 mg zinc/kg en exposition aiguë ou 1 et 3 mg zinc/kg en exposition chronique) ; le degré de clastogénicité est directement proportionnel à la concentration, et indirectement proportionnel à la durée du traitement [4, 17]. Des souris exposées par inhalation à l'oxyde de zinc présentent une augmentation des aberrations chromosomiques dans les cellules de la moelle osseuse [11].
Effets cancérogènes [9 à 11]
Les composés minéraux du zinc étudiés dans cette fiche toxicologique ne semblent pas être cancérogènes par voie orale ou inhalatoire.
Le zinc est un élément trace essentiel, impliqué dans de nombreuses fonctions biologiques. C'est un cofacteur enzymatique qui, en excès, peut augmenter la successibilité aux cancérogènes.
L'incidence des hépatomes, des lymphomes malins et des adénomes pulmonaires chez les souriceaux nouveaux-nés exposés par voie orale (0, 1000 et 5000 ppm sulfate de zinc dans l'eau de boisson, pendant 1 an, soit 0,170 et 850 mg zinc/kg/j) n'est pas significativement différente de celle des témoins, bien que le taux d'hépatomes soit supérieur (30,4 % pour 12,5 %). Une hypertrophie du cortex surrénalien et des îlets pancréatiques, mais sans tumeur correspondante, est observée chez la souris C3H ayant reçu 500 mg/L de sulfate de zinc pendant 14 mois dans l'eau de boisson. Une étude peu détaillée, menée pendant 3 ans et sur 5 générations de souches de souris sensibles ou résistantes aux tumeurs, montre qu'une concentration de 10 - 20 mg zinc/L dans l'eau de boisson augmente la fréquence des tumeurs dans la souche résistante, quelle que soit la génération ; une concentration supérieure est moins tumorigène.
Parmi des rats, des souris et des cobayes, exposés à un mélange de fumées d'oxyde de zinc et d'hexachloroéthane, seules les souris femelles présentent une augmentation de tumeurs (carcinomes alvéolaires) à la concentration de 123 mg/m3, 1 h/j, 5 j/sem, pendant 18 mois [16].
Des injections intra-testiculaires de chlorure ou de sulfate de zinc chez le coq provoquent des tumeurs malignes (sarcomes) des testicules. Chez le rat, les résultats obtenus après de telles injections (0,15 mL de chlorure de zinc à 5 %, ou de sulfate de zinc à 10 %) sont équivoques. Chez le hamster, 10 semaines après l'injection, se développe une nécrose focale s'étendant sur 25 % de chaque testicule [14, 17, 18].
Effets sur la reproduction
Les composés du zinc, à forte dose, diminuent la capacité de reproduction par perte préimplantatoire et réduisent la croissance des fœtus et des nouveaux-nés.
Fertilité [9, 11]
Une exposition orale au sulfate de zinc avant l'accouplement n'a pas d'effet sur les gonades du rat (250 mg zinc/kg/j pendant 14 - 17 semaines) ou de la souris (1110 mg/kg/j, soit environ 450 mg zinc/kg/j, pendant 13 semaines ) ni sur le taux d'implantation, alors qu'une exposition du 1er au 18ième jour de gestation à 200 mg zinc/kg/j augmente le taux de pertes préimplantatoires et qu'une exposition à 500 mg zinc/kg/j pendant 5 mois abroge la capacité reproductrice du rat.
Par inhalation, 18 mois après l'exposition de rats, de souris et de cobayes à des concentrations de 119,3 ou 121,7 mg/m3 de fumées de chlorure de zinc, 1 h/j, 5 j/sem, pendant 20 semaines, aucun effet n'est observé sur les glandes mammaires, les ovaires ou l'utérus [16].
Développement [9, 11]
Le zinc, en concentrations normales, est nécessaire à la croissance et au développement fœtal.
Une exposition à de fortes doses dans la nourriture, avant ou pendant la gestation, est associée à une augmentation des résorptions, une baisse du poids fœtal, une altération des concentrations tissulaires fœtales en cuivre et en fer, et, chez les petits, à une réduction de la croissance, une baisse de l'hématocrite, une déficience en cuivre et une alopécie. Le NOAEL chez le rat est de 25 à 100 mg/kg/j, 20 à 36 jours avant l'accouplement et du 1er au 20ième jour de gestation [4].
L'injection de fortes doses non létales de zinc (souvent sulfate) chez les mères aux premiers jours de la gestation est associée à un retard d'ossification, à la formation d'anomalies squelettiques axiales et de côtes fusionnées (souris 12,5 - 25 mg chlorure de zinc/kg, 8ième - 9ième - 10ième ou 11ième jour de gestation par voie intrapéritonéale).