Accès rapides :

Vous êtes ici :

  1. Accueil
  2. Publications et outils
  3. Bases de données
  4. Fiches toxicologiques
  5. 2-Éthoxyéthanol (FT 58) (rubrique sélectionnée)

2-Éthoxyéthanol

Fiche toxicologique n° 58

Sommaire de la fiche

Édition : Mise à jour 2014

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme [4, 5, 7-9, 12, 13, 16]

    Le 2-éthoxyéthanol est rapidement absorbé chez l'homme et l'animal par voies respiratoire, cutanée et digestive ; il est distribué largement dans l'organisme. Il est métabolisé au niveau hépatique en substances dont certaines sont toxiques et éliminé principalement dans les urines.

    Chez l'animal

    L'absorption à travers la peau humaine est de 0,8 mg/cm2/h in vitro ; in vivo, elle est de 0,7 mg/cm2/h sous forme liquide et 0,074 mg/cm2/h sous forme vapeur.

    La rétention respiratoire, qui est fonction de l'activité physique, est d'environ 64 % de la concentration inhalée chez des volontaires exposés au repos à 5 ppm pendant 4 heures[5]. En exposition combinée inhalatoire-cutanée, la pénétration par la peau représente 42 % du 2-éthoxyéthanol absorbé[7].

    Après absorption, il se distribue dans tout l'organisme sans accumulation du composé parental, mais les méta­bolites s'accumulent.

    Le 2-éthoxyéthanol est métabolisé, chez l'homme comme chez l'animal, par deux voies oxydatives principales (cf. schéma) :

    • par action d'une monooxygénase à cytochrome P450 (voie 1) qui mène à l'exhalation de CO2 via l'éthylène glycol et le cycle de Krebs ;
    • par action de l'alcool et de l'aldéhyde déshydrogénase (voie 2) qui mène à la formation et à l'excrétion d'acide 2-éthoxyacétique. Cet acide est responsable des effets hématologiques, testiculaires et fœtotoxiques.

    Une faible partie (< 0,5 %) est éliminée dans l'air expiré sous forme inchangée et la majorité (environ 35 % de la quantité absorbée) est rapidement métabolisée en acide 2-éthoxyacétique.

    L'élimination du 2-éthoxyéthanol est principalement urinaire (76 - 80 % chez l'animal après 60 heures). Sa demi-vie biologique est estimée chez l'animal à 10 - 12,5 heures ; l'excrétion urinaire d'acide 2-éthoxyacétique (conjugué avec la glycine ou libre) est maximale dans les 12 pre­mières heures et complète en 48 heures [8]. La durée totale de l'élimination urinaire est fonction de la dose administrée, mais la demi-vie d'élimination de l'acide 2-éthoxyacétique est constante. Le pourcentage de conju­gué est indépendant de la dose, mais présente une varia­tion diurne et individuelle importante.

    Chez l'homme, le pic d'excrétion urinaire se situe dans les 12 premières heures, la baisse est ensuite plus lente que chez l'animal. La demi-vie d'élimination est d'environ 42 heures. Le taux d'excrétion est fonction de la dose ; il n'a pas été mis en évidence de conjugué d'acide 2-éthoxyacétique avec la glycine. Après l'arrêt de l'exposi­tion, la concentration respiratoire diminue rapidement dans les premières minutes, puis plus lentement ensuite, suggérant une clairance à au moins 2 compartiments. Il y a accumulation du produit tout au long de la semaine. La quantité de métabolites éliminés augmente avec l'inten­sité de l'effort physique, avec l'intensité de l'exposition et avec l'importance du contact cutané [9].

    Schéma métabolique

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Etant donné le risque de passage percutané du 2-éthoxyéthanol et sa faible volatilité, la mise en place d'une sur­veillance biologique est justifiée.

    Le dosage de l'acide 2-éthoxyacétique urinaire en fin de poste et fin de semaine de travail est le reflet de l'exposi­tion de la semaine. Ce paramètre est spécifique et est bien corrélé aux effets sur la santé.

    Le dosage du 2-éthoxyéthanol sanguin en fin de poste de travail a été proposé mais peu de données sont disponi­bles sur ce sujet.

    Des valeurs-biologiques de référence en population pro­fessionnellement exposée ont été établies pour l'acide 2-éthoxyacétique urinaire (Voir Recommandations - Au point de vue médical).

  • Mode d'actions

    L'acide 2-éthoxyacétique serait responsable de la toxicité du 2-éthoxyéthanol ; il affecte l'énergie de la cellule cible, en entrant comme faux substrat dans le cycle des acides tricarboxyliques (cycle de Krebs), et la biodisponibilité des petites unités carbonées nécessaires à la synthèse des bases puriques et pyrimidiques.

    Les deux mécanismes mènent à une rupture de la prolifé­ration cellulaire et de la différenciation normale de l'épi­thélium séminifère ou de l'embryon [4].

  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë [4, 10]

    La toxicité aiguë se traduit par une dépression du système nerveux cen­tral ainsi que des effets pulmonaires (œdème) et digestifs. Il est légèrement irritant pour la peau et les yeux.

    La DL50 par voie orale est comprise entre 2125 et 5500 mg/kg chez le rat et la souris et entre 1400 et 3100 mg/kg chez le lapin et le cobaye.

    La DL50 par voie cutanée est comprise entre 3300 et 3900 mg/kg chez le rat et le lapin.

    La CL50 chez le rat et la souris est d'environ 2000 ppm pour une exposition de 7 heures ; elle est, chez le rat, de 4300 ppm pour une exposition de 4 heures.

    Les effets observés dans toutes les espèces animales sont une dépression du système nerveux central, une réduction des fonctions respiratoires et, à forte dose, des lésions pulmonaires (œdème), gastro-intestinales (hémor­ragies) et rénales.

    Le 2-éthoxyéthanol est un irritant léger pour la peau du lapin ; l'instillation oculaire provoque une légère opaci­fication de la cornée et du cristallin qui disparaît en 24 heures [6].

    Toxicité subchronique, chronique [4]

    L'exposition répétée par inhalation entraîne des atteintes hématologiques, hépatiques et rénales ainsi qu'une atro­phie testiculaire.

    Des études variées en exposition subaiguë ou subchro­nique au 2-éthoxyéthanol, par voies orale, cutanée ou inhalatoire, chez le rat et la souris, ont montré principale­ment des modifications histopathologiques dans le foie, les reins, la rate et les testicules. Des altérations hémato­logiques (leucopénie) ont aussi été décrites. Par voie orale, la dose sans effet nocif observé est chez le rat de 150 mg/kg/j, 6 semaines par gavage ou 1250 ppm (envi­ron 100 mg/kg/j), 13 semaines dans l'eau de boisson ; elle est de 500 mg/kg/j, 5 semaines par gavage chez la souris. Par voie cutanée, elle est de 4428 mg/kg/j, 10 jours chez le rat. Par inhalation, 6 h/j, 5 j/sem, pendant 13 semaines, elle est de 400 ppm chez le rat et de 100 ppm chez le lapin.

    Une exposition chronique induit :

    • un effet primaire sur le système hématopoïétique responsable d'une anémie et d'une pancytopénie généra­lisée à partir de 2500 ppm (environ 200 mg/kg/j) dans l'eau de boisson pendant 13 semaines chez le rat ;
    • une baisse de la survie par ulcération stomacale (à 2000 mg/kg/j, par gavage chez le rat) ;
    • des altérations dégénératives des testicules avec atro­phie testiculaire et atteinte des spermatocytes chez le rat (à partir de 10 000 ppm - environ 800 mg/kg/j - dans l'eau de boisson pendant 13 semaines et à partir de 300 mg/kg/j pendant 6 semaines ou 186 mg/kg/j pen­dant 13 semaines par gavage) et chez la souris (à partir de 20 000 ppm - environ 5000 mg/kg/j - dans l'eau de bois­son pendant 90 jours et à partir de 1000 mg/kg/j pendant 5 semaines ou 500 mg/kg/j pendant 2 ans par gavage) ;
    • une diminution du poids du thymus (à partir de 205 mg/kg/j chez le rat) et une hypertrophie des surrénales (à partir de 500 mg/kg/j pendant 2 ans chez le rat mâle et à partir de 5000 ppm - environ 1250 mg/kg/j - dans l'eau de boisson pendant 90 jours chez la souris femelle) ;
    • des effets rénaux non spécifiques à forte dose (lésions tubulaires sans trouble fonctionnel) ;
    • une modification histopathologique du foie ;
    • une dépression du système nerveux central forte dose (léthargie).

    Il n'y a pas d'immunotoxicité au niveau du système lym­phatique, cependant une augmentation de la réponse immune cellulaire liée à un effet antitumoral a été obser­vée après 2 ans d'exposition.

    Effets génotoxiques [4]

    Certains tests de génotoxicité in vitro sont positifs, les tests in vivo sont négatifs.

    Le 2-éthoxyéthanol donne des résultats négatifs dans les tests de mutagenèse in vitro, en présence ou en absence d'activation métabolique, sur bactéries, cellules CHO de hamster chinois et cellules de lymphome de souris. Quelques résultats indiquent une activité clastogène : aug­mentation du taux d'aberrations chromosomiques dans les cellules CHO de hamster chinois, en absence de sys­tème d'activation métabolique, ce test est négatif sur cel­lules V79 de hamster syrien et sur lymphocytes humains ; augmentation du taux d'échanges entre chromatides sœurs dans les cellules CHO et les lymphocytes humains. Le test d'inhibition de la coopération métabolique sur cel­lules V79 est positif, le test de transformation des cellules embryonnaires de hamster syrien est négatif [11].

    In vivo, les tests effectués sur la drosophile (létalité récessive liée au sexe) ou la souris (aberrations chromosomiques et micronoyau dans la moelle osseuse) sont négatifs.

    Effets cancérogènes [4, 9]

    Les résultats de cancérogenèse sont négatifs.

    Le 2-éthoxyéthanol n'induit pas d'effet cancérogène par voie orale chez le rat et la souris (500 - 2000 mg/kg/j pendant 2 ans).

    Administré, dans un modèle de leucémie expérimentale, 55 à 65 jours après transplantation, il présente un effet anti-leucémique ; cet effet est en accord avec l'effet immunitaire observé. De plus, une étude sur 2 ans a montré une suspension de l'apparition des leucémies spontanées chez le rat des deux sexes[4].

    Effets sur la reproduction [4]

    Le 2-éthoxyéthanol diminue la fertilité masculine par action testiculaire. Il est embryotoxique, fœtotoxique et tératogène.

    Le 2-éthoxyéthanol diminue la fertilité par son effet testi­culaire ; il s'avère embryotoxique, fœtotoxique et térato­gène. Les effets sur le développement, y compris les mal­formations, sont observés chez la souris, le rat et le lapin à des doses faibles à modérées, indiquant une sensibilité importante du fœtus.

    Le 2-éthoxyéthanol est toxique pour la reproduction chez le mâle, il provoque la dégénérescence des spermatocytes avec une perte progressive de la population des spermatides (azoospermie après 7 semaines). Les effets testicu­laires ont été observés chez des animaux (souris, rat, lapin) exposés par inhalation et/ou par voie orale. Ces modifications se traduisent par une baisse de poids des testicules et une dégénérescence modérée à sévère de l'épithélium des tubes séminifères. Les lésions sont liées à la dose ; la réversibilité est complète 7 à 8 semaines après la fin de l'exposition [4, 9]. La fertilité de la femelle n'est pas affectée.

    Le 2-éthoxyéthanol est toxique pour le développement (embryolétalité, fœtotoxicité), en présence ou en absence de toxicité maternelle, par toutes les voies d'exposition et pour toutes les espèces étudiées ; le lapin semble être le plus sensible. L'exposition par inhalation des mères pro­duit des anomalies cardiovasculaires avec des vaisseaux manquants, transposés ou fusionnés, des malformations de l'abdomen et des variations du squelette en particulier chez le rat et le lapin ; chez la souris, on observe des exencéphalies et des fentes palatines.

    La dose sans effet fœtotoxique et tératogène observé est 23 mg/kg/j, du 1er au 21ième jour de gestation par voie orale chez le rat, 1000 mg/kg/j, du 8ième au 14ième jour de gestation, par voie orale chez la souris et 187 mg/m3 du 6ième au 18ième jour de gestation par inhalation chez le rat et le lapin.

    Des modifications comportementales ont été observées chez les rats nouveau-nés, traités in utero avec 100 ppm de 2-éthoxyéthanol du 7ième au 13ième ou du 14ième au 20ième jour de gestation. Des substances chimiques neurotransmettrices (acétylcholine, dopamine, norépinéphrine, 5-hydroxytryptamine) en concentration élevée sont présentes dans le cerveau des nouveau-nés et des petits âgés de 21 jours. L'éthanol réduit les effets du 2-éthoxyéthanol s'il est coadministré du 7ième au 13ième jour de gestation; par contre, coadministré du 14ième au 20ième jour de gestation, il les augmente [9].

    Les effets du 2-éthoxyéthanol sur la reproduction seraient dus à l'acide 2-éthoxyacétique, lui-même fortement embryotoxique et tératogène. L'éthanol semble diminuer cet effet en diminuant le taux d'oxydation du 2-éthoxyéthanol en acide 2-éthoxyacétique.

  • Toxicité sur l’Homme

    Les intoxications aiguës qui surviennent essentiellement par contact cutané ou ingestion se traduisent par des trou­bles digestifs et neurologiques associés dans certains cas à une acidose et des complications hépatique et rénale. Des anomalies hématologiques sont rapportées en cas d'expo­sition répétée. Des données limitées n'ont pas montré d'ef­fet génotoxique chez l'homme. Des anomalies du sperme, ainsi qu'une augmentation du nombre d'avortement sont notées chez des sujets exposés notamment au 2-éthoxyéthanol.

    Toxicité aiguë [4, 12, 16]

    Plusieurs cas d'intoxication aiguë par ingestion de 2-éthoxyéthanol ont été rapportés, dont l'un mortel. Ils associent des troubles digestifs (nausées, vomissements, gastral­gies, diarrhée), des signes neurologiques (céphalées, fai­blesse musculaire, agitation, troubles de conscience, convulsions), parfois sécheresse et hyperhémie cutanée avec cyanose, et dans un cas, un œdème pulmonaire. Une acidose métabolique est également notée et, dans certains cas, une atteinte hépatique et rénale (avec ano­malies biochimiques), des anomalies hématologiques (lymphopénie), voire une pancréatite ; ces effets sont le plus souvent réversibles [5].

    Toxicité chronique [4, 12, 16]

    Les effets connus proviennent soit de rapports de cas, soit d'études épidémiologiques pour lesquelles les sujets sont le plus souvent en contact avec des mélanges de solvants : il n'est donc pas facile d'apprécier la part de l'exposition au 2-éthoxyéthanol dans les effets décrits.

    Quelques cas d'intoxications subaiguës ou chroniques sont rapportés après exposition par inhalation et/ou par voie cutanée. Des anomalies hématologiques réversibles telles qu'une anémie ou une lymphocytose relative sont décrites chez certains sujets [4].

    Une étude chez 94 peintres professionnellement exposés au 2-éthoxyéthanol (concentration atmosphérique moyenne : 2,6 ppm) mais aussi à du 2-méthoxyéthanol a révélé une tendance à l'anémie (10 % des sujets) et à la granulopénie (5 % des sujets) versus 0 % chez les témoins.

    Effets génotoxiques [12]

    Dans une étude, aucune augmentation du nombre des échanges de chromatides sœurs et du nombre des micro­noyaux, dans les lymphocytes de sujets professionnelle­ment exposés à des vernis contenant du 2-éthoxyéthanol et de l'acétate de 2-éthoxyéthyle, n'a été notée; les concentrations en acide 2-éthoxyacétique urinaire étaient de l'ordre de 35,9 mg/I (environ 24 mg/g de créatinine) en fin de poste et fin de semaine.

    Effets sur la reproduction [4, 12]

    Dans toutes les données dont on dispose, les sujets étaient exposés à d'autres substances que du 2-éthoxyéthanol, ce qui rend difficile l'appréciation d'une relation causale.

    Certaines études épidémiologiques ont montré une tendance à l'oligospermie chez des sujets exposés à du 2-éthoxyéthanol et à d'autres éthers de glycol ; l'une de ces études concernait 73 peintres exposés à du 2-éthoxyéthanol à des concentrations atmosphériques moyennes de 2,6 ppm, mais aussi à du 2-méthoxyéthanol ; l'autre étude concernait 37 ouvriers fondeurs exposés à des concentrations atmosphériques moyennes de 2-éthoxyéthanol de 6,6 ppm. D'autres études épidémiologiques sont négatives [4, 15].

    Une étude cas-témoins chez 1019 patients venus consulter pour des problèmes de fertilité, retrouve la présence d'acide 2-éthoxyacétique urinaire, témoin d'une exposition à du 2-éthoxyéthanol et/ou son acétate, chez 39/1019 cas versus 6/479 témoins (odds ratio à 3,11) [12, 15].

    Une augmentation du nombre d'avortements spontanés est constatée dans certaines études chez des salariées de la microélectronique ou du livre ; ces anomalies sur­viennent chez des femmes utilisant plusieurs solvants dont des éthers de glycol (y compris du 2-éthoxyéthanol et de l'acétate de 2-éthoxyéthyle)[4, 14].

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
EN SAVOIR PLUS SUR LES FICHES TOXICOLOGIQUES