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Acide perfluorooctanesulfonique et ses sels (PFOS et ses sels)

Fiche toxicologique n° 298

Sommaire de la fiche

Édition : 2013

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    Le PFOS est rapidement absorbé par voie orale. Il se distri­bue ensuite dans tout l’organisme, principalement au niveau du foie. Le PFOS est capable de traverser les barriè­res hémato-encéphalique et placentaire. Il est faiblement et lentement éliminé, par les urines et les fèces.

    Chez l'animal
    Absorption

    Le PFOS possède un fort taux d'absorption orale : après l'administration d'une dose de 4,2 mg/kg de PFOS à des rats, 95 % de la dose administrée est absorbée en 24 heu­res, au niveau du système gastro-intestinal [6]. L'exis­tence d'un cycle entéro-hépatique du PFOS a aussi été mise en évidence [7].

    L'absorption cutanée semble possible mais apparaît peu probable : au cours d'une étude menée chez des lapins, aucun signe clinique n'est observé après l'application de 0,5 g de PFOS sur la peau, suggérant son faible passage dans la circulation générale lors d'une exposition cutanée [8].

    Distribution

    Une fois absorbé, le PFOS se distribue rapidement dans l'organisme, principalement au niveau du foie (25 % de la dose administrée) ; viennent ensuite le plasma, les reins, les poumons, les os, la rate ou les testicules [9-12]. Une légère accumulation du PFOS dans le cerveau, surtout au niveau de l'hypothalamus, a aussi été mise en évidence [13, 14] : le PFOS traverse la barrière hémato-encépha­lique et pourrait interférer avec les hormones de la repro­duction au travers de l'hypothalamus stimulant leur production [13]. L'existence d'un transfert placentaire a aussi été démontrée, à la suite d'une exposition par gavage ou par voie intraveineuse [15].

    Métabolisme

    Le PFOS n'est pas métabolisé [8, 16, 17].

    Excrétion

    Son élimination est lente et faible, avec un temps de demi-vie d'élimination sérique compris entre 1 et 2 mois chez le rat et s'effectue via les urines (30 %) et les fèces (13 %). [10]

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage du PFOS sérique, à n'importe quel moment de la journée et de la semaine, a été proposé pour la sur­veillance biologique des salariés exposés ; il reflète l'expo­sition chronique car le PFOS s'accumule dans l'organisme. On se méfiera d'une contamination lors du prélèvement. Pour la population professionnellement exposée, la Com­mission allemande a fixé une valeur BAT (Biologischer Arbeit Toleranzwert) pour le PFOS sérique à 15 mg/L (moment de prélèvement non défini) ainsi que la mention « risque de passage percutané » [21].

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Une atteinte sévère du système digestif (particulièrement le foie) par voie orale ainsi que des signes de congestions pulmonaires par voie inhalatoire sont observés chez le rat. Aucune irritation cutanée n'est rapportée alors qu'une irri­tation oculaire modérée est observée.

    Après l'administration unique de doses comprises entre 100 et 1 000 mg/kg de PFOS par gavage à des rats, une DL50 de 251 mg/kg a été déterminée pour les 2 sexes [22]. Tous les rats exposés aux deux plus fortes doses (soit 464 et 1 000 mg/kg) sont morts avant la fin de l'étude. Les rats survivants présentaient des signes d'hypoactivité, d'a­taxie et une diminution de la tonicité des membres. Les autopsies ont mis en évidence des déformations de l'esto­mac, des signes d'irritation de la muqueuse glandulaire de l'estomac, des congestions pulmonaires ainsi qu'une colo­ration jaune de la région urogénitale.

    Un aérosol de PFOS a été administré à des rats pendant 1 heure, à des concentrations comprises entre 1,89 et 45,97 mg/L. Tous les animaux exposés aux plus fortes doses (soit 24,09 et 45,97 mg/L) sont morts avant la fin de l'étude ; 80 % des rats exposés à 7,05 mg/L sont aussi décédés. À partir de ces résultats, la CL50 a donc été fixée à 5,2 mg/L. Les rats survivants présentaient des signes cli­niques tels qu'un amaigrissement, la présence de sécré­tions rouges autour du nez et jaunes autour de la région urogénitale et une gène respiratoire. Les autopsies ont révélé une décoloration du foie ainsi qu'une distension au niveau de l'intestin grêle [23].

    Aucune donnée n'est disponible quant à la toxicité aiguë par voie cutanée du PFOS.

    Irritation, sensibilisation 24]

    Après application de PFOS sur la peau de lapin, aucun effet n'est détecté. Au niveau oculaire, des altérations de la cornée et de l'iris, de même que l'apparition de conjonc­tivites bulbaire et palpébrale, sont observées après l'ins­tillation de PFOS dans l'un des yeux des lapins : les scores déterminés sont à leur maximum entre 1 et 24 heures après l'administration et diminuent ensuite pendant le reste de l'étude. Toutefois, aucun détail n'est fourni en ce qui concerne la méthode de cotation des résultats obser­vés et le calcul des scores totaux.

    Toxicité subchronique, chronique

    À la suite d’expositions répétées chez le rat et la souris, les principaux effets du PFOS s’observent au niveau du foie et du système gastro-intestinal et sont consécutifs à l’activa­tion de récepteurs nucléaires. Une atteinte du système immunologique est aussi observée, avec une modulation de la réponse immunitaire.

    La majorité des études disponibles ont été réalisées par voie orale. Chez les rongeurs, le foie est le principal organe cible des composés perfluorés (cf. Tableau II). Son méca­nisme de toxicité implique l'activation du récepteur hor­monal nucléaire PPARα, à l'origine d'une cascade d'effets et se traduisant par une hépatomégalie avec une hyper­trophie hépatocellulaire, une prolifération du réticulum endoplasmique, une altération de plusieurs enzymes, notamment celles impliquées dans le métabolisme lipi­dique, et une augmentation de l'incidence des adénomes hépatocellulaires [25-28]. De récentes études montrent cependant que le récepteur nucléaire PPARα ne serait pas le seul impliqué dans la réponse toxique [27, 29].

    Chez des souris exposées par gavage à 0, 1, 5 ou 10 mg/kg/j de PFOS, pendant 3, 7, 14 ou 21 jours, l'aug­mentation du poids absolu du foie est liée à la dose et à la durée d'exposition ; hypertrophie et coloration jaunâtre apparaissent après 3 jours seulement [33]. L'augmenta­tion de la concentration en triglycérides dans le foie est aussi corrélée à la dose et la durée de l'exposition ; au niveau histologique, cela se traduit par l'observation d'une stéatose macrovésiculaire, avec accroissement du nombre et de la taille des vésicules avec la dose [33].

    Aucune altération morphologique ou modification de la fonction rénale n'a été observée suite à l'administration de 1,77 mg/kg/j de PFOS sous forme de sel de potassium à des rats, pendant 4 semaines. Par contre, après 14 semaines de traitement, une augmentation de l'urée san­guine du sang est observée, à la fois chez les mâles (+ 23 %) et les femelles (+ 41 %) mais sans modification histologique des reins ou des analyses d'urine [31]. L'administration de 1,5 mg/kg/j de PFOS dans la nourri­ture de rats, pendant 2 ans, n'entraîne aucune altération morphologique au niveau du tractus gastro-intestinal ou de la thyroïde [32].

    Très peu d'informations sont disponibles concernant les effets immunologiques du PFOS. Quelques études réali­sées chez les rats [31, 32] et le singe cynomolgus [34, 35] ne montrent aucun effet au niveau de la rate, du thymus ou des ganglions lymphatiques mésentériques, pour des concentrations inférieures ou égales à 2 mg/kg/j, pendant 4 semaines. Chez des souris exposées pendant 10 jours à 23,5 mg/kg/j de PFOS dans la nourriture, une atrophie de la rate et du thymus est rapportée (diminution du poids moyen de 18 et 50 %, respectivement) ; une réduction du nombre total de cellules présentes dans ces organes et dans la moelle osseuse est aussi notée (respectivement de 64, 96 et 23 %, dans la rate, le thymus et la moelle osseuse) [36]. Par ailleurs, le PFOS semble avoir la capacité de moduler la réponse immunitaire des rongeurs, à diffé­rents niveaux (suppression des réponses immunitaires T-dépendante et T-indépendante, modulation dans la production d'interleukines) [37].

    Exposition

    Effets

    Référence

    7 jours

    15 mg/kg/j

    • Augmentation du poids absolu du foie
    • Diminution des taux de cholestérol et de triglycérides sériques
    • Augmentation du taux de triglycérides hépatiques

    30

    28 jours

    1,51-1,77 mg/kg/j

    (Mâle-Femelle)

    • Augmentation du poids absolu du foie, sans prolifération cellulaire et peroxysomale

    31

    1,66 mg/kg/j (Mâle)

    • Diminution des taux de cholestérol et de triglycérides sériques
    • Pas de modification de l'activité ALAT sérique

    28

    14 semaines

    1,51-1,77 mg/kg/j

    (Mâle-Femelle)

    • Hypertrophie centrolobulaire avec vacuolisation, sans prolifération cellulaire et péroxysomale
    • Diminution du taux de cholestérol
    • Augmentation de l'activité ALAT sérique

    31

    2 ans

    0,4 mg/kg/j

    • Hypertrophie centrolobulaire avec vacuolisation, sans prolifération cellulaire et péroxysomale
    • Présence de granules éosinophiles dans la région centrale
    • Dégénérescence hépatocellulaire
    • Réversibilité en une année

    32

    Tableau II. Effets hépatiques observés chez le rat, à la suite d'expositions subchronique et chronique par voie orale

    Effets génotoxiques

    Aucune activité génotoxique n’est mise en évidence pour le PFOS. Toutefois, il est capable d’induire la transformation de cellules, l’apoptose de divers types cellulaires et est à l’origine d’une augmentation de la production d’espèces réactives de l’oxygène.

    Tous les tests in vitro réalisés ont montré des résultats négatifs : test d'Ames [38], test de mutation reverse [39], test d'aberrations chromosomiques sur lymphocytes humains [40] et essai de synthèse non programmée d'ADN, réalisé sur des cultures cellulaires primaires de foie de rat [41]. Toutefois, le PFOS induit une transformation des cellules embryonnaires de hamster syrien (cellules SHE) à des concentrations non cytotoxiques (0,2 et 2 µg/ml) [42].

    In vivo, un test du micronoyau réalisé par voie orale chez la souris s'est aussi révélé négatif [43].

    In vitro, le PFOS peut induire la mort de cellules du sys­tème nerveux central (cellules granuleuses du cervelet), à partir de concentrations relativement faibles : la concen­tration entraînant 50 % de mortalité dans les cultures de cellules est de 61 +/- 7,6 µM [44]. Le PFOS entraîne aussi l'apoptose de cellules pulmonaires de nouveau-nés [45] ou d'hépatocytes [26]. De plus, une augmentation de la production d'espèces réactives de l'oxygène, liée à la dose, est observée [44, 45].

    Effets cancérogènes

    Aux fortes doses d’exposition, le PFOS est cancérogène par voie orale : chez les rongeurs, il est à l’origine d’une aug­mentation de l’incidence des tumeurs hépatiques (adé­nome/carcinome) et de la thyroïde (adénome/carcinome). A contrario, il diminue la fréquence de survenue des tumeurs de la glande mammaire. Compte tenu de l’ab­sence de génotoxicité rapportée et de sa capacité de trans­formation cellulaire, le PFOS appartient aux substances cancérogènes non génotoxiques.

    Pendant 2 ans, des groupes de rats Sprague-Dawley ont été exposés à 0,03 - 0,1 - 0,4 ou 1,5 mg/kg/j de PFOS, via la nourriture [32]. Un groupe supplémentaire de rats mâles a reçu de la nourriture contaminée par 1,5 mg/kg/j de PFOS pendant 52 semaines seulement, puis de la nour­riture non contaminée pendant l'année restante. Une augmentation significative de l'incidence des adénomes hépatocellulaires a été mise en évidence chez les animaux exposés à la plus forte dose pendant 2 ans ; aucune tumeur de ce type n'a été observée chez les mâles expo­sés seulement 1 an au PFOS. Par contre, dans ce groupe, des adénomes et carcinomes de la thyroïde ont été mis en évidence chez les mâles. Chez les femelles, une associa­tion négative a été mise en évidence entre les adénomes ou adénofibromes des glandes mammaires et les femelles exposées à la plus forte dose (Tableau III).

    Une augmentation significative d'adénomes hépatocellu­laires est rapportée chez des rats mâles et femelles expo­sés à 0,98 (mâles) et 1,25 (femelles) mg/kg/j de K+ PFOS via la nourriture pendant 2 ans (7/60 chez les mâles et 5/60 chez les femelles, 0/60 chez les témoins) ; un seul carcinome hépatocellulaire est rapporté chez les femelles exposées à la plus forte dose (1,25 mg/kg/j). Une diminu­tion de l'incidence de fibroadénomes et d'adénomes des glandes mammaires est observée chez les femelles expo­sées à la plus forte dose (1,25 mg/kg/j) [27].

    L'hépatotoxicité du PFOS (et sa cancérogénicité) implique­rait les récepteurs nucléaires PPARα/CAR/PXR(1) [27, 42, 46].

    Par inhalation, aucune étude n'est disponible chez l'ani­mal.

    MÂLES

    Tumeurs

    0

    0,03 mg/kg/j

    0,1 mg/kg/j

    0,4 mg/kg/j

    1,5 mg/kg/j

    1,5 mg/kg/j

    52 semaines

    Foie

    Adénome

     

    0 (0/60)

     

    6 (3/50)

     

    6 (3/50)

     

    2 (1/50)

     

    11,7* (7/60)

     

    0 (0/40)

    Thyroïde

    Adénome

    Carcinome

    Combiné

     

    5 (3/60)

    5 (3/60)

    10 (6/60)

     

    10,2 (5/49)

    2 (1/49)

    12,2 (26/49)

     

    8 (4/50)

    2 (1/50)

    10 (5/50)

     

    8,2 (4/49)

    4,1 (2/49)

    10,2 (5/49)

     

    6,8 (4/59)

    1,7 (1/59)

    8,5 (5/59)

     

    23,1* (9/39)

    2,6 (1/39)

    25,6 (10/39)

    FEMELLES

    Tumeurs

    0

    0,03 mg/kg/j

    0,1 mg/kg/j

    0,4 mg/kg/j

    1,5 mg/kg/j

    Foie

    Adénome

    Carcinome

    Combiné

     

     

    0 (0/60)

     

    2 (1/50)

    0 (0/50)

    2 (1/50)

     

    2 (1/49)

    0 (0/49)

    2 (1/49)

     

    2 (1/50)

    0 (1/50)

    2 (1/50)

     

    8,3* (5/60)

    1,7 (1/60)

    10* (6/60)

    Thyroïde

    Adénome

    Carcinome

    Combiné

     

     

    0 (0/60)

     

     

    0 (0/50)

     

     

    0 (0/49)

     

    4 (2/50)

    2 (1/50)

    6* (3/50)

     

    1,7 (1/60)

    0 (0/60)

    1,7 (1/60)

    Glandes mammaires

    Adénome/Adénofibrome

    Carcinome

    Combiné

     

    38,3 (23/60)

    18,3 (11/60)

    48,3 (29/60)

     

    60* (30/50)

    24 (12/50)

    72* (36/50

     

    45,8 (22/48)

    31,2 (15/48)

    64,6* (31/48)

     

    52,04 (26/50)

    22 (11/50)

    58 (29/50)

     

    25 (15/60)

    23,3 (14/60)

    40 (24/60)

    Tableau III. Incidence des tumeurs en % (nombre cas / nombre total d'animaux) chez les rats mâles et femelles exposés au PFOS

    (1) PPAR : récepteur activé par les proliférateurs de péroxysomes / CAR : récepteur constitutif des androstanes / PXR : pregnane X recep­tor

    (*) :Significativité, p < 0,03 

    Effets sur la reproduction

    Aucune atteinte de la fertilité ou des organes reproduc­teurs n’est mise en évidence. Toutefois, une modification des taux d’hormones thyroïdiennes est rapportée lors d’é­tudes multigénérations chez les mères exposées. En ce qui concerne le développement, le PFOS induit une morbidité importante, des malformations plus ou moins sévères et des retards d’ossification, en présence de toxicité mater­nelle. Des altérations du développement neurologique ou immunologique sont aussi observées chez les nouveau-nés.

    Fertilité

    Les études multigénérations réalisées ne montrent aucune atteinte de la fertilité et des organes reproduc­teurs. L'exposition de rats à 3,2 mg/kg/j de PFOS par gavage, avant l'accouplement et durant la gestation, ne modifie aucun paramètre d'accouplement ou de fertilité, que cela soit chez les parents ou de la génération F1 [47, 48]. L'administration, via la nourriture, de 1,8 et 1,3 mg/kg/j de PFOS sous forme de sel de potassium pendant 4 ou 14 semaines respectivement n'induit aucune altéra­tion macro ou microscopique des organes reproducteurs [31, 32]. Cette absence d'effet est aussi rapportée chez les singes, pour des doses d'exposition similaires [35].

    L'administration par gavage de 0,4 mg/kg/j de PFOS, à des rates gestantes au cours d'une étude sur 2 générations, entraîne une diminution du taux de TT4(1) sérique, alors que les concentrations en FT4 et TSH sériques restent inchangées[48]. Des rates exposées par gavage à 1 mg/kg/j de PFOS, du 2e au 20e jour de gestation, présen­tent une diminution significative des taux de TT4 et FT4 sériques, et une diminution moins marquée du taux de T3 sérique, particulièrement au 7e jour de gestation ; aucun effet sur le taux de TSH sérique n'est rapporté [49].

    (1) TT4 thyroxine totale ; FT4 thyroxine libre ; TSH thyréostimuline ; T3 triiodothyronine

     
    Développement

    Plusieurs études réalisées chez le rat, la souris ou le lapin, mettent en évidence des effets sur le développement des fœtus.

    L'exposition de rats Sprague-Dawley à 0, 1, 5 ou 10 mg/kg/j de PFOS par gavage, du 6e au 15e jour de ges­tation, est à l'origine d'une diminution du poids moyen des fœtus dès 5 mg/kg/j [50]. À la plus forte dose testée, une augmentation significative du nombre de portées avec des fœtus présentant des anomalies viscérales ou squelettiques et des retards dans l'ossification est observée. Les fœtus présentent des anomalies de la fente palatine, des œdèmes sous-cutanés, une cryptorchidie (migration incomplète du testicule) et des retards dans l'ossification du crâne, de la cage thoracique, de la cein­ture pectorale, de la colonne vertébrale et de la ceinture pelvienne. Des anomalies squelettiques sont aussi obser­vées au niveau des côtes et des vertèbres. Ces effets sur le développement sont observés en présence d'une toxicité maternelle marquée pour les deux plus fortes doses tes­tées (prostration, anorexie, diminution du poids, alopécie, pertes vaginales sanguines, lésions gastro-intestinales). La diminution du poids des nouveau-nés [46] et de leur viabilité [44, 51] est aussi mise en évidence : pour les plus fortes doses d'exposition des mères (5 et 10 mg/kg/j), 95 % des nouveau-nés meurent dans les 24 premières heures.

    Les mêmes types d'effets sont aussi rapportés chez le lapin à partir de 2,5 mg/kg/j de PFOS, administré par gavage, en présence de toxicité maternelle (avortements, diminution du poids moyen des mères et de la consom­mation de nourriture) [52].

    Une étude sur 2 générations a été réalisée sur des rats, exposés par gavage à 0 - 0,1 - 0,4 - 1,6 et 3,2 mg/kg/j de PFOS (mâles : 42 jours avant l'accouplement et jusqu'à la fin de l'accouplement ; femelles : 42 jours avant l'accou­plement et jusqu'au 21e jour après la mise bas) [53]. Les mâles et les femelles de la génération F0 ne présentent aucun signe clinique lié au traitement, exceptées une diminution du poids moyen, une alopécie localisée chez les femelles dès 0,4 mg/kg/j ainsi qu'une diminution du poids moyen des vésicules séminales et de la prostate chez les mâles exposés aux plus fortes doses. La descen-dance F1 montre une diminution importante de sa viabi­lité, pour les deux doses les plus fortes : l'index de viabilité est de 0 % pour la plus forte dose et de 66 % pour 1,6 mg/kg/j. De plus, pour la plus forte dose, la durée de gestation est réduite, de même que le nombre d'implan­tations, la taille des portées et le poids moyen des nou­veau-nés. Compte tenu de la faible viabilité de la descendance exposée à 1,6 et 3,2 mg/kg/j de PFOS, seuls les groupes recevant 0,1 et 0,4 mg/kg/j de PFOS sont uti­lisés pour la 2e génération. La génération F2 présente une diminution du poids moyen des nouveau-nés, significa­tive dès 0,4 mg/kg/j.

    Une étude d'allaitement croisé (cross fostering) a ensuite été réalisée afin de déterminer si les effets observés sur les nouveau-nés (importante mortalité) étaient le résultat de l'exposition au PFOS in utero (effet prénatal) ou pen­dant la lactation (effet postnatal) [54]. Les conclusions de cette étude montrent que la diminution du taux de survie des nouveau-nés est principalement liée à une exposition in utero au PFOS ; l'exposition uniquement pendant la lac­tation n'est à l'origine d'aucune modification de ce taux de survie. L'association d'une exposition via le lait mater­nel, consécutive à une exposition in utero, accentue la réduction du taux de survie des nouveau-nés.

    Chez la souris, aucune altération neurologique n'a été mise en évidence après une exposition par gavage à 6 mg/kg/j de PFOS du 12e au 18e jour de gestation [55, 56]. Toutefois, de jeunes souris âgées de 10 jours, ayant reçu par gavage une dose unique de PFOS de 0,75 ou 11,3 mg/kg, présentent une diminution de l'activité motrice spontanée et une altération de leurs capacités d'adaptation [57].

    Des effets immunologiques ont été observés chez des jeu­nes souris âgées de 4 et 8 semaines, suite à l'exposition de leurs mères par gavage durant la gestation à 1 et 5 mg/kg/j de PFOS (diminution de l'activité des cellules tueuses naturelles et des populations de lymphocytes au niveau de la rate et du thymus) [58].

  • Toxicité sur l’Homme

    Il n'y a pas de donnée publiée concernant la toxicité aiguë du PFOS chez l'homme. Les études disponibles lors d’exposition chronique ne met­tent pas en évidence d’effets systémiques spécifiques, en dehors d’effets possibles sur les hormones stéroïde. Les données disponibles ne permettent pas de conclure sur un éventuel effet cancérogène du PFOS chez l’homme. Les préoccupations liées aux résultats d’études chez l’homme concernent d’éventuels effets sur la fertilité et le développement fœtal bien que les résultats des études soient contradictoires. Il en est de même pour le dévelop­pement pour lequel il existe des préoccupations ; néan­moins aucune malformation n'est rapportée chez l'homme.

    On ne dispose pas d'information sur la toxicité aiguë du PFOS chez l'homme

    Toxicité aiguë

    On ne dispose pas d'information sur la toxicité aiguë du PFOS chez l'homme

    Toxicité chronique

    Peu d'études sont disponibles chez l'homme sur les effets chroniques du PFOS.

    Dans une étude réalisée en 1997 chez 1 400 salariés expo­sés depuis au moins 1 an au PFOS (avec des concentra­tions sériques estimées de PFOS autour de 0,4 à 2 mg/L), aucune augmentation de l'incidence des effets généraux (à type de symptômes vésicaux, hépatiques, prostatiques, gastro-intestinaux) appréciés par questionnaire n'est retrouvée [59] ; dans cette étude, les effets cancérogènes n'ont pas été recherchés.

    Une étude chez 652 salariés danois d'une usine de pro­duction de fluorures de PFOS (PFOSF) (métabolisés en PFOS), comparés à 659 salariés non directement exposés, a recensé les « atteintes à la santé » autodéclarées entre 1993 et 1998 ; un excès d'atteintes biliaires mais aussi de cystites et de polypes bénins du colon est retrouvé chez les sujets exposés au PFOS et dans une sous-population de 211 travailleurs les plus exposés, en durée et en inten­sité (taux de PFOS sériques estimés de l'ordre de quelques mg/L). Ces données sont à interpréter avec prudence dans la mesure où il s'agit d'autodéclarations, aucun examen clinique ni biologique n'ayant été fait [60].

    Quelques études ont tenté d'évaluer les effets de l'exposi­tion professionnelle au PFOS sur les fonctions hépatiques et les profils lipidiques. Dans la plupart des cas, aucune association n'a été observée entre les taux de PFOS sériques (le plus souvent voisins de 1 mg/L pour les moyennes géométriques) et les enzymes hépatiques (ASAT, ALAT, phosphatases alcalines, GGT) ni avec les lipi­des (cholestérol total, HDL cholestérol et triglycérides) [61].

    Ces données sont confirmées dans une étude plus récente chez les 179 salariés exposés au PFOS entre 2000 et 2002 lors de la démolition d'une usine fabriquant des compo­sés perfluorés ; aucune association entre l'augmentation des taux de PFOS sériques et les modifications des bilans hépatiques (ASAT, ALAT, phosphatases alcalines, biliru­bine) et lipidiques (cholestérol total, HDL et non HDL cho­lestérol) n'est observée mais les niveaux d'imprégnation sont très bas (médiane des taux de PFOS sériques de 18 à 365 µg/L) [62].

    Concernant les effets thyroïdiens, des études dans la population générale américaine retrouvent une associa­tion entre les taux sériques de PFOS (moyennes géomé­triques de 17 à 29 µg/L) de 52 296 adultes et l'élévation de la thyroxine totale sérique et la baisse de la capture de la T3 [63] ; ces données sont confirmées par un autre auteur [64]. Une autre étude dans la population générale coréenne chez des sujets âgés de 12 à plus de 60 ans ne retrouve pas d'association entre les taux sériques de TSH et de T4 libre et ceux de PFOS sériques (médianes de 8 µg/L) [65].

    Ces effets sur la thyroïde ne sont pas retrouvés dans une étude chez des sujets professionnellement exposés (avec des niveaux moyens de PFOS sériques de l'ordre du mg/L) [61].

    Pour les effets sur les hormones stéroïdes, une étude récente dans une population de 25 957 femmes américai­nes non professionnellement exposées fait état d'une association inverse entre les taux de PFOS sériques (médiane autour de 17 µg/L) et les taux sanguins d'œs­tradiol chez les femmes ménopausées et en péri-ménopause [66].

    Une étude chez 247 hommes adultes de la population générale danoise retrouve une association négative entre les taux de PFOS sériques (moyenne à 8,46 µg/L) et les taux sanguins de testostérone totale et libre [67]. D'autres auteurs (cités dans Joensen 2013 [67]) ne retrou­vent pas cette association entre taux sanguins d'hormo­nes stéroïdes et taux sériques de PFOS.

    Effets génotoxiques

    Il n'existe pas de données disponibles chez l'homme.

    Effets cancérogènes

    Grice et al ne mettent pas en évidence de relation entre l'exposition professionnelle de salariés au PFOS (avec des concentrations sériques estimées de PFOS autour de 0,4 à 2 mg/L) et l'augmentation du risque de cancers du colon, de la prostate ou de la peau (appréciés par questionnaire) [59].

    Dans une étude chez 2 083 salariés d'une usine de pro­duction de fluorures de PFOS (PFOSF) (métabolisés en PFOS) aux USA, avec des concentrations sériques moyen­nes de PFOS de 0,9 mg/L et 821 « non exposés » avec des taux moyens de PFOS sériques de 0,1 mg/L, une augmen­tation dose dépendante statistiquement significative du risque de mortalité par cancer de la vessie (SMR à 12,77 ; 95 % CI 2,63 - 37,75) est retrouvée chez les 65 sujets les plus exposés [68].

    Un réexamen de cette cohorte (1 400 sujets) retrouve un excès de risque de décès par cancer de vessie non signifi­catif, même chez les 706 sujets dont les taux sériques de PFOS sont les plus élevés (Standard incidence ratio SIR à 1,74 ; 95 % CI 0,64 - 3,79) [69] ; les raisons de cette dis­cordance ne sont pas clairement discutées par les auteurs [69].

    Une étude prospective récente dans une population géné­rale de 146 femmes Inuit au Groenland, retrouve des taux de PFOS sériques mesurés entre 2002 et 2003 positive­ment associés au risque de cancers du sein ; les niveaux d'imprégnation en PFOS étaient relativement élevés (concentrations sériques médianes de PFOS à 45,7 µg/L chez les 31 cas et à 31,1 µg/L chez les contrôles) ; cette même relation est retrouvée avec les taux sériques d'a­cide perfluorosulfonique (PFSA) et de PCB [70].

    Il semble difficile de conclure à partir de ces données sur une relation causale entre exposition au PFOS et excès de risque de cancers.

    Effets sur la reproduction

    Effets sur la fertilité

    Une étude chez 588 sujets européens et arctiques non professionnellement exposés a recherché les associations entre l'exposition aux composés perfluorés (PFOS, mais aussi acide perfluorooctanoïque (PFOA), perfluorohexane sulfonique et acide perfluorononanoïque) et la qualité du sperme. Aucune association entre les taux de PFOS sériques (médiane à 18,4 µg/L) et la concentration de spermatozoïdes, le volume de sperme et le comptage spermatique n'est observée tandis qu'une association négative non statistiquement significative est notée entre taux de PFOS sérique chez les Européens et la morphologie des spermatozoïdes (qualité du sperme) [71]. D'autres études (citées dans Joensen 2013 [67]) dans la population générale retrouvent ce type d'association (qualité du sperme) chez les sujets les plus exposés au PFOS (avec exposition combinée au PFOA).

    D'autres études réalisées dans des populations générales d'adultes ne retrouvent pas d'association entre qualité du sperme et exposition au PFOS (citées dans Toft 2012 [71], Joenssen 2013 [67]).

    Une étude danoise sur la fécondabilité chez 430 couples (1er essai de grossesse) entre 1992 et 1995, ne retrouve pas d'association significative entre les taux de PFOS sériques de 222 femmes (médiane à 36 µg/L) et le délai à concevoir (mesuré sur 6 mois), ni avec le ratio de fécondité (comparées aux 208 femmes n'ayant pas eu de dosage de PFOS) [72].

    Tandis qu'une étude menée entre 1996 et 2002 retrouve une association significative entre les taux de PFOS sériques (mesurés entre les semaines 4 et 14 de la gros­sesse ; moyenne à 35,5 µg/L) de 1 240 femmes danoises et le délai à concevoir (mesuré sur 12 mois) ; cette étude présente cependant des limitations épidémiologiques [73, 74].

    Effets sur le développement fœtal

    Plusieurs études épidémiologiques (dont 2 en population professionnellement exposée) se sont intéressées à l'as­sociation entre l'exposition au PFOS (appréciée sur les taux sanguins de PFOS chez les mères ou au cordon ombi­lical) et les effets sur le développement fœtal, en étudiant le plus souvent le poids à la naissance mais aussi l'indice pondéral, la taille des nouveau-nés et/ou le périmètre crâ­nien ; les résultats de ces études sont contradictoires. Une revue de ces différentes études a été faite par Olsen en 2009 [74] ; elle est complétée par des études plus récen­tes [75, 76].

    Apelberg [77] aux USA observe une association négative entre les taux de PFOS au niveau du cordon ombilical de 293 mères-enfants (médiane des taux de PFOS de 5 µg/L) et le poids de naissance des nouveau-nés, l'indice pondé­ral (ratio poids/taille des nouveau-nés) et/ou le périmètre crânien tandis qu'aucune association avec la taille des nouveau-nés ou la durée de la grossesse n'est observée ; en raison de nombreux facteurs confondants (rôle notam­ment de la co-exposition au PFOA), les effets observés sont à prendre avec précaution.

    Washino trouve une association statistiquement signifi­cative entre les taux de PFOS du sang maternel (au 2e tri­mestre de grossesse) et la diminution du poids de naissance uniquement chez les nouveau-nés de sexe féminin dans une étude réalisée au Japon chez 428 fem­mes et leurs enfants (moyenne géométrique des taux de PFOS sériques de 4,9 µg/L) [78].

    Une étude comparable à celle de Washino réalisée au Danemark retrouve cette association inverse entre taux de PFOS du sang maternel (au 2e trimestre de grossesse) et poids et indice de masse corporelle de plus de 1 000 enfants de sexe masculin (association non retrouvée chez les filles) âgés de 12 mois (médiane des taux de PFOS sériques de 33 µg/L) [75].

    Une association négative statistiquement significative, dose dépendante, entre les taux de PFOS au niveau du cordon ombilical (429 mères-enfants) et le poids de nais­sance des nouveau-nés, l'indice pondéral, le périmètre crânien et la durée de la grossesse est également obser­vée par Chen [76] à Taiwan (moyenne géométrique des taux de PFOS de 5,9 µg/L).

    D'autres études en population générale (citées dans les articles référencées 76, 79 à 81) ne mettent en évidence aucune association entre les taux de PFOS au cordon ombi­lical et/ou au niveau sanguin chez les mères et les effets sur la durée de la grossesse et le développement (poids, taille, périmètres crâniens et abdominaux) des nouveau- nés exposés in utero (médianes des taux de PFOS sérique au 1er trimestre de grossesse chez 1 399 mères danoises voisines de 35 µg/L et moyenne des taux au cordon ombi­lical de 8,9 µg/L chez 15 femmes japonaises).

    Deux études en population professionnellement exposée ne retrouvent pas d'association entre les taux de PFOS sériques (estimés dans les 2 études de l'ordre de quelques mg/L) et le poids de naissance (263 femmes exposées) [59] ni avec certains paramètres de la reproduction comme le pré-travail, les anomalies congénitales, le déroulement de la grossesse et de l'accouchement chez les 122 salariées exposées comparées aux 101 « non exposées » (informa­tions recueillies par autodéclarations) [60].

    Le développement neurocomportemental a fait l'objet d'une étude transversale par une équipe danoise ; les auteurs ne retrouvent pas d'association entre les taux de PFOS sanguins chez les mères au 1er trimestre de gros­sesse (médiane des taux de PFOS à 34 µg/L) et les effets sur le développement neurocomportemental (comporte­ment social, émotion, hyperactivité, coordination motrice) des jeunes enfants de 7 ans de la cohorte (mais aussi de 6 et 18 mois dans une étude antérieure de la même équipe) [82].

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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