Pathologie - Toxicologie
-
Toxicocinétique - Métabolisme [6, 7, 13, 14]
L’absorption du diéthylène-glycol est rapide et importante par voie digestive puis il est largement distribué dans l’organisme. Après métabolisation, il est éliminé sous forme inchangée ou de métabolites, principalement dans les urines et à un moindre degré dans les fèces. Il traverse la barrière hémato-encéphalique.
Chez l'animal
Absorption
Le diéthylène-glycol est essentiellement absorbé au niveau du tractus gastro-intestinal.
Distribution
Immédiatement après administration, il apparaît dans le sang, les reins, le foie, la rate puis le cerveau, les muscles et le tissu adipeux. Il est éliminé du sang avec une demi-vie de 3,6 h ; il franchit la barrière hémato-encéphalique et atteint une concentration maximale dans le cerveau après 3 à 4 h, ce qui expliquerait l’effet narcotique à forte dose.
Métabolisme
Plusieurs études ont montré que le diéthylène-glycol est métabolisé chez l’animal (14 à 41 % de la dose chez le rat) en acide (2-hydroxyéthoxy)acétique (2-HEAA) (voir figure ci-dessous).
Les études menées avec du 14C]-diéthylène-glycol chez le rat n’ont pas mis en évidence la présence de [14C]-acide oxalique dans les urines, ce qui indique que la voie métabolique passant par l’éthylène-glycol est peu probable. L’acide oxalique détecté quelquefois proviendrait d’une élimination endogène due à la diurèse osmotique induite par le caractère hygroscopique du diéthylène-glycol.
L’accumulation sanguine de 2-HEAA provoquerait une acidose métabolique compensée après 24 h aux faibles doses. À des doses supérieures, la concentration élevée de 2-HEAA formé entraînerait une acidose métabolique non compensée, aggravée par une accumulation d’acide lactique. Cette acidose inhibe la néoglucogenèse hépatique.
Schéma métabolique
Excrétion
L’élimination du [14C]-diéthylène-glycol chez le rat est essentiellement urinaire : plus de 85 % de la dose dont 61 à 65 % de diéthylène-glycol inchangé et 33 à 37 % de 2-HEAA sous forme d’acétate ; 0,7 à 2,2 % se retrouvent dans les fèces. Aux doses élevées, le pourcentage éliminé diminue (13 % pour une dose de 5 000 mg/kg) indiquant une saturation du métabolisme.
-
Mode d'actions
-
Toxicité expérimentale
Toxicité aiguë [6-8]
Le diéthylène-glycol ne se révèle toxique qu’à dose élevée par voie orale. Des atteintes rénales et hépatiques sont observées histologiquement. Il n’est pas irritant pour la peau ou l’œil.
La DL50 par voie orale est de 13,3 à 26,5 g/kg chez le rat et la souris, 7,8 à 14 g/kg chez le cobaye, 9 g/kg chez le chien et 3 g/kg chez le chat. Les signes sont identiques pour toutes les espèces : effet narcotique, refus de nourriture et soif, puis, à forte dose, s’ajoutent dyspnée, prostration, coma, hypothermie et mort 2 à 7 jours après l’administration du produit. La mort survient après une phase de diurèse accrue suivie d’oligurie et d’anurie, dans un tableau d’acidose métabolique non compensée et de coma urémique. L’autopsie montre des lésions rénales (nécrose tubulaire) et hépatiques (nécrose centrolobulaire).
L’exposition de rats pendant 8 h à une atmosphère saturée en diéthylène-glycol ou à un brouillard généré par nébulisation de diéthylène-glycol n’entraîne aucune mortalité.
Le diéthylène-glycol n’est irritant ni pour la peau ni pour l’œil.
Toxicité subchronique, chronique [6, 9, 10]
Chez le rat, l’exposition chronique par voie orale peut entrainer un ralentissement de la croissance, des atteintes rénales, hépatiques ainsi que des calculs vésicaux.
Chez le rat, l’administration orale (4 % dans la nourriture = 2 400 mg/kg/j, 2 ans) entraîne un ralentissement de la croissance des animaux, des lésions rénales (atrophie tubulaire, cylindres hyalins, concrétions cristallines dans les tubules, infiltration lymphocytaire et fibrose discrète) et hépatiques (atrophie centrolobulaire ou diffuse, prolifération des canalicules biliaires et dégénérescence graisseuse). En outre, il se forme, chez 30 % des mâles, des calculs vésicaux de diamètre variable, composés d’un noyau d’oxalate de calcium recouvert d’une couche comprenant 75 % d’ions phosphate. Ces calculs n’apparaissent pas chez le chien et le lapin. La dose orale sans effet est d’environ 180 mg/kg/j dans la nourriture pendant 30 jours ou 90 mg/kg/j dans l’eau de boisson pendant 9 semaines.
Effets génotoxiques [6]
Les tests réalisés sont négatifs.
Le diéthylène-glycol n’induit pas de mutation sur les bactéries ni d’aberration chromosomique ou d’échange entre chromatides sœurs sur les cellules ovariennes de hamster chinois.
Effets cancérogènes [9, 11]
Chez le rat, l’exposition à de fortes doses par voie digestive entraine des calculs vésicaux, à l’origine de tumeurs de la vessie.
À forte dose chez le rat (4 % dans la nourriture = 2 400 mg/kg/j, 2 ans), le diéthylène-glycol provoque chez les mâles la formation de calculs vésicaux, à l’origine de tumeurs de la vessie pour 1,7 % des animaux. Cet effet tumorigène non spécifique peut être provoqué par l’implantation dans la vessie d’un corps étranger. Dans les mêmes conditions, une dose de 2 % n’induit ni calcul vésical ni tumeur.
Toujours chez le rat (1,25 et 2,5 % dans l’eau de boisson = 1 230 et 2 460 mg/kg/j, 2 ans), l’incidence des tumeurs et des lésions non néoplasiques n’a pas augmenté ; aucun effet promoteur n’a pu être démontré sur le rein après initiation avec la N-éthyl-N-hydroxyéthylnitrosamine.
Effets sur la reproduction [8, 12]
Une étude chez la souris par voie orale montre un effet sur la fertilité à des doses toxiques pour les parents ; d’autres études chez le rat et la souris par voie orale sont négatives.
Plusieurs études n’ont montré aucun effet ni chez la souris (voie orale, 11,2 g/kg/j, 6e au 13e jour de gestation) ni chez le rat (5 % dans la nourriture, soit environ 3 g/kg/j, jour 0 à 20e jour de gestation; sur deux générations, par gavage, 2,2 g/kg/j).
Une étude sur deux générations, menée chez la souris (3,5 % dans l’eau de boisson, 6,1 g/kg/j), selon un protocole augmentant la sensibilité de la réponse, a montré qu’à des doses parentales faiblement toxiques, le diéthylène-glycol affecte la fertilité et les capacités de reproduction : diminution du nombre de portées, de la proportion de nouveau-nés vivants et de leur poids à la naissance. Toutefois, un effet spécifique sur le mâle ou la femelle n’a pu être mis en évidence.
-
Toxicité sur l’Homme
Les intoxications aiguës, décrites suite à l’utilisation du diéthylène-glycol comme excipient médicamenteux, associent des atteintes du système nerveux central, digestive, rénale et une acidose métabolique. Aucune donnée n’est disponible chez l’homme pour les effets chroniques, génotoxiques, cancérogènes ou sur la reproduction.
Toxicité aiguë [15-17]
Le peu de données concernant la clinique et la physiopathologie de l’intoxication isolée par le diéthylène-glycol laissent penser qu’une similitude existe entre les effets de cette substance et ceux de l’éthylène-glycol, bien connus.
Les intoxications décrites ne proviennent pas d’expositions professionnelles; elles font suite à l’utilisation du diéthylène-glycol comme excipient dans des médicaments et ont entraîné le décès d’environ 100 personnes (principalement en 1937) ; le tableau clinique et biologique se déroule en trois phases :
- atteinte du système nerveux central débutant peu après l’ingestion, rappelant l’intoxication éthylique aiguë (ébriété, dysarthrie, agitation ou torpeur avec évolution vers le coma). Des signes digestifs sont retrouvés (nausées, vomissements, diarrhées) ;
- acidose métabolique avec trou anionique et hyperpnée réactionnelle ;
- insuffisance rénale aiguë oligo-anurique, faisant toute la gravité de l’intoxication, liée à une tubulopathie aiguë due à la présence de cristaux d’oxalate de calcium précipitant dans la lumière tubulaire. Au cours de cette phase peuvent survenir les manifestations de cytolyse hépatique, d’œdème pulmonaire, voire d’atteinte myocardique.
Toxicité chronique [18]
Aucune information n’est disponible sinon une étude soviétique, qui met en évidence une augmentation de fréquence d’asthénie, de dermatoses et de neutropénies chez des ouvriers exposés au diéthylène-glycol et à des hydrocarbures (notamment du benzène), par rapport aux ouvriers exposés seulement aux hydrocarbures.
-
Interférences métaboliques
-
Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal