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Hydrazine, hydrate d’hydrazine et solutions aqueuses

Fiche toxicologique n° 21

Sommaire de la fiche

Édition : Novembre 2022

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    L’hydrazine est rapidement absorbée à travers la peau, par inhalation ou par ingestion, puis distribuée dans les tissus, principalement au niveau des reins. Plusieurs voies de métabolisation existent, enzymatique et non enzyma­tique, conduisant à la formation de métabolites majoritai­rement excrétés via les urines (acétyl- et diacétylhydrazine). L’élimination de l’hydrazine peut aussi se faire sous forme inchangée dans les urines ou d’azote dans l’air expiré.

    Chez l'animal
    Absorption

    L'hydrazine est facilement absorbée à travers la peau, par inhalation ou par ingestion. À la suite de l'administration d'une dose unique d'hydrazine à des rats par voie orale (3 à 81 mg/kg pc), au moins 19 à 46 % de la dose administrée est absorbée après 24 heures. Cette estimation se base sur les quantités d'hydrazine et de métabolites, excrétées dans les urines et détectées par les méthodes analytiques employées : l'absorption réelle est donc supérieure à 19 - 46 % [20]. Chez des rats exposés par voie inhalatoire (exposition nasale uniquement) à 10 - 60 ou 500 ppm d'hydrazine, les quantités d'hydrazine et de métabolites retrouvées dans les urines après 48 heures permettent d'estimer l'absorption par cette voie au minimum à 8,4 - ­29,5 % [21]. Chez le chien, le produit a pu être mis en évi­dence dans le plasma 30 secondes après une application cutanée ; la concentration plasmatique était maximale 3 heures après l'exposition [22]. Chez le lapin, l'applica­tion de 12 mg/kg pc d'une solution d'hydrazine sur la peau met en évidence une absorption rapide de la sub­stance : le pic de concentration sérique est atteint après 50 à 60 minutes [23]. 42 % de la dose appliquée est absor­bée à travers la peau chez le lapin après 6 minutes [24].

    Distribution

    Le produit absorbé est rapidement distribué dans les tis­sus, de façon pratiquement uniforme sauf pour les reins où la plus forte concentration est retrouvée. Chez le rat, 8 heures après l'injection en sous-cutanée de 10 mg/kg d'hydrazine, les concentrations les plus importantes sont retrouvées dans les reins [25].

    À la suite d'une exposition par voie orale, les concentra­tions maximales plasmatiques et hépatiques sont mesu­rées après 30 minutes, chez le rat[20].

    Métabolisme

    On connaît principalement 2 voies de métabolisation :

    • la N-acétylation, processus de détoxication qui conduit à l'acétylhydrazine puis à la diacétylhydrazine beaucoup moins toxique que le produit de départ ; cette réaction, catalysée par une acétylase, existe chez le lapin, la souris et le rat, mais pas chez le chien ;
    • l'hydrolyse qui fait intervenir des hydrolases non spéci­fiques, sans détoxication ; cette voie de métabolisation est observée chez le chien.

    Mais l'hydrazine peut aussi être oxydée en azote sous l'ac­tion de l'oxyhémoglobine érythrocytaire ou d'oxygénases hépatiques.

    Excrétion

    L'élimination de l'hydrazine et de ses métabolites se fait rapidement : après une injection sous-cutanée ou intra­péritonéale chez le chien de 15 mg/kg de produit marqué par 15N, on retrouve, en 24 à 48 heures, 25 % de l'azote marqué dans l'air expiré sous forme d'azote gazeux, 50 % dans les urines sous forme d'hydrazine inchangée (deux tiers à trois quarts) et de métabolites divers (un tiers à un quart).

    À la suite d'injection sous-cutanée de 10 mg/kg d'hydra­zine chez le rat, les demi-vies suivantes ont été détermi­nées : 3,3 heures pour le foie, 2,7 heures pour les reins, 3 heures pour les poumons et 2,3 heures pour le plasma. Après 48 heures, 30 % de la dose est retrouvée dans l'u­rine, 24 % sous forme d'hydrazine inchangée et 3 % sous forme d'acétyl- et de diacétylhydrazine [25].

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Le dosage urinaire de l’hydrazine en fin d’exposition ou fin de poste peut être proposé pour la surveillance biologique de l’exposition professionnelle. Le dosage plasmatique de l’hydrazine peut être utile pour documenter une exposition aiguë. Une variabilité interindividuelle est observée, pouvant être liée aux différences de métabolisme (acétylation et méthylation) et de voie d’exposition (respiratoire et cutanée).

    Des valeurs EKA (Exposure equivalents for carcinogenic substances) ont été établies par la Commission allemande DFG pour ces deux indicateurs : 35 µg/g de créatinine pour l’hydrazine urinaire et 27 µg/L pour l’hydrazine plasmatique en fin d’exposition ou fin de poste, correspondant à une exposition à 0,013 mg/m3 d’hydrazine atmosphérique.

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    L'hydrazine et son hydrate sont toxiques quelle que soit la voie d'administration. Le principal organe cible est le sys­tème nerveux central mais des atteintes hépatique, rénale ou hématologique sont aussi observées. L’hydrazine est un irritant cutané et respiratoire, et un sensibilisant cutané.

    Par voie orale, la DL50 de l'hydrazine est de 60 mg/kg chez la souris ou le rat. Par voie percutanée, elle est de 93 mg/kg chez le lapin, de 190 mg/kg chez le cobaye [28]. Par inhalation, après une exposition de 4 heures, la CL50 est de 250 ppm chez la souris, de 570 ppm chez le rat [29] ; après une exposition d'une heure, elle est de 3192 ppm chez le rat [30].

    Concernant l'hydrate d'hydrazine, chez le rat, après une heure d'exposition par inhalation, la plus faible CL50 rap­portée est de 3400 mg/m3 [31]. Par voie orale, une DL50 de 55 mg/kg pc a été déterminée chez le lapin [32].

    Quelles que soient l'espèce et la voie d'administration étu­diées, les manifestations observées traduisent principale­ment une action sur le système nerveux central (agitation ou inactivité, convulsions surtout cloniques, difficultés respiratoires) [33]. Les chiens, exposés à des doses sublétales par voie intraveineuse, ne présentent pas de convulsion mais une augmentation de l'activité neuromus­culaire, une hypersalivation, des diarrhées, des vomisse­ments et une hyperventilation [33]. Sont aussi observées des atteintes rénale (diminution du taux de filtration glo­mérulaire, présence de mégamitochondries), hépatique (augmentation des activités enzymatiques sériques, pré­sence de mégamitochondries) et hématologique (hémo­lyse, anémie) ; l'examen histopathologique montre une dégénérescence graisseuse des reins et du foie, en lien notamment avec la présence de mégamitochondries[32].

    Dans l'intoxication par inhalation, on note en plus une irri­tation des yeux et du tractus respiratoire ; les poumons sont congestifs et sont le siège de foyers œdémateux et hémorragiques, ainsi que d'atélectasie [33].

    Dans le cas de l'application cutanée comme dans celui par voie intraveineuse, une hypoglycémie sévère et une aci­dose lactique ont été mises en évidence chez le chien [32].

    Irritation, sensibilisation

    L'hydrazine est à l'origine d'une irritation cutanée et respi­ratoire [33, 34]. Localement, la réponse cutanée varie d'une irritation légère à un érythème maculopapulaire, avec œdème transitoire et décoloration persistante de la peau [36]. Sur l'œil du lapin comme du rat, les solutions contenant 25 % ou plus d'hydrazine peuvent occasionner des lésions sévères et irréversibles (conjonctivite, éry­thème des paupières, opacités cornéennes persistantes).

    Toxicité subchronique, chronique

    Dans l'intoxication chronique par l'hydrazine, le phéno­mène majeur est l'hépatotoxicité qui se manifeste quelle que soit la voie d'intoxication. Des effets rénaux, neurolo­giques et pulmonaires sont aussi observés.

    À la suite d'une exposition continue pendant 6 mois, des effets hépatique, hématologique et neurologique sont observés [37]. Ainsi, les souris, les chiens et les singes inhalant 0,2 ppm d'hydrazine en continu pendant 6 mois présentent une dégénérescence graisseuse du foie. Parmi les animaux exposés à 1 ppm, seuls les chiens montrent une atteinte du système nerveux central (convulsions toniques) et du sang (diminution des taux d'hématocrite, d'hémoglobine et de globules rouges). À la suite d'une exposition pendant un an, 5 jours par semaine, 6 heures par jour, l'atteinte hépatique est aussi présente : anoma­lies cellulaires, augmentation du taux de transaminases sériques, prolifération des voies biliaires, hémosidérose et amylose sont observées chez les rats, les chiens et les hamsters exposés à 0,25 et 1 ppm [38]. Aux mêmes concentrations, une amylose et une minéralisation réna­les sont rapportées, seulement chez les hamsters. Aux plus fortes concentrations (5 ppm), apparaissent chez toutes les espèces étudiées des atteintes pulmonaires (inflammation, hyperplasie et métaplasie au niveau de la partie supérieure de l'arbre respiratoire) [38].

    Par voie orale, des souris exposées à 1,1 mg/kg pc d'hy­drazine pendant 25 semaines, présentent une dégénéres­cence des glandes surrénales ; aucun effet n'est rapporté chez les hamsters à ce niveau [39]. À partir de 4,9 mg/kg pc, une atteinte hépatique est observée seulement chez les hamsters, avec cirrhose atrophique et prolifération des cellules réticuloendothéliales, et prolifération des voies biliaires. Chez des souris et des rats recevant pendant 10 jours une nourriture contenant 10 mg/kg d'hydrazine, les examens histopathologiques révèlent au niveau du foie l'existence de mégamitochondries, des vacuolisations graisseuses et la prolifération locale du réticulum endo­plasmique [40].

    Par voie cutanée, seules des convulsions sont observées chez des chiens exposés à une dose unique de 96 à 480 mg/kg d'hydrazine [22].

    Effets génotoxiques [17]

    La génotoxicité de l’hydrazine est observée in vitro et in vivo.

    L'hydrazine induit des mutations géniques et/ou des aberrations chromosomiques dans un grand nombre de tests in vitro sur bactéries (5 souches de S. typhimurium, E. coli, H. influenzae), levures (S. cerevisiae), phages, plantes supérieures, Drosophila melanogaster, cellules de mam­mifères ; le plus souvent l'action mutagène ne nécessite pas une activation métabolique préalable. L'hydrazine induit in vitro des transformations cellulaires et une syn­thèse non programmée d'ADN (fibroblastes humains), des micronoyaux (cellules de hamsters chinois, sans acti­vation métabolique) ainsi que des cassures des brins d'ADN (hépatocytes de rats)[31]. De même, les tests in vitro réalisés avec l'hydrate d'hydrazine s'avèrent en majorité positifs, avec et sans activation métabolique : mutations géniques, aberrations chromosomiques (cellu­les de hamster chinois) ou synthèse non programmée de l'ADN (hépatocytes de souris) [31].

    In vivo, les tests des comètes réalisés chez la souris s'avè­rent positifs pour de nombreux organes (foie, poumon, rein, cerveau, moelle osseuse, muqueuses), à la suite d'une exposition par voie orale (100 et 150 mg/kg pc, dose unique), par intubation gastrique (30 mg/kg pc, dose unique) ou par injection intrapéritonéale (100 mg/kg pc, dose unique)[41, 42]. Des adduits à l'ADN sont observés chez des rats ayant reçu de 0,01 à 10 mg/kg pc d'hydra­zine en dose unique, par gavage, avec formation de N7- méthylguanine et O6-méthylguanine au niveau de l'ADN hépatique [43]. La demi-vie de ces bases méthylées géné­rées est courte : 13 à 17 heures pour la O-méthylguanine, 40 à 50 heures pour la N-méthylguanine [32].

    Mutations géniques et dommages à l'ADN sont aussi rap­portés avec l'hydrate d'hydrazine[31].

    En revanche, le produit n'induit ni mutation dominante létale, ni micronoyau dans les cellules de moelle osseuse de souris traitées in vivo.

    Effets cancérogènes

    L’hydrazine est cancérogène, quelle que soit la voie d’ex­position considérée. Par voie orale, des tumeurs peuvent apparaître dans plusieurs organes (poumons, foie, glandes mammaires). Par inhalation, les tumeurs sont principale­ment localisées au niveau du tractus respiratoire, mais aussi au niveau de la thyroïde.

    L'inhalation d'hydrazine accroît l'incidence des tumeurs nasales et des bronches, chez des rats des 2 sexes (tumeurs épithéliales bénignes, mais aussi carcinomes muco-épidermiques et papillomes), et des carcinomes de la thyroïde chez les mâles, à la suite d'une exposition 6 heures/jour, 5 jours/semaine, pendant 1 an, à 1 et 5 ppm[37]. Une exposition intermittente d'une heure par semaine pendant 10 semaines est à l'origine de métapla­sie, d'hyperplasie et de néoplasie des cavités nasales, chez les rats et hamsters exposés à 750 ppm. L'incidence de ces lésions est toutefois relativement faible (aucune lésion proliférative n'est constatée dans le groupe témoin) [44].

    Par voie orale, une augmentation de l'incidence des tumeurs pulmonaires a été observée chez des souris mâle et femelle exposées à 1,87 mg/kg pc/j d'hydrazine pen­dant 2 ans [45 à 47]. Administrée à 50 ppm dans l'eau de boisson pendant toute la vie des animaux, l'hydrazine ne montre d'effet cancérogène qu'à la dose moyenne calcu­lée de 3 mg/kg pc/j, qui est nettement toxique ; cet effet se traduit par l'apparition de tumeurs hépatiques, en majorité bénignes [48]. Chez le hamster, l'exposition à 8,3 mg/kg/j d'hydrazine augmente l'incidence des tumeurs du foie et des reins [49]. Le potentiel cancéro­gène de l'hydrazine a de plus été mis en évidence dans plusieurs études subchroniques [27]. Une augmentation de l'incidence des tumeurs du poumon, du foie et des glandes mammaires a été observée chez des souris expo­sées de 0,46 à 16,7 mg/kg pc/j d'hydrazine, pendant 24­-48 semaines.

    Aucune étude n'est disponible par voie cutanée.

    Effets sur la reproduction

    Très peu d’études traitent des effets de l’hydrazine sur la fertilité mais elles suggèrent la présence d’effets à la suite d’une exposition par inhalation (atrophie des organes reproducteurs, aspermie). Concernant la toxicité pour le développement, les effets varient en fonction de la voie d’exposition. Par voie orale, une augmentation du nombre de résorptions est observée mais à des doses toxiques pour les mères. A la suite d’une exposition par inhalation, des malformations fœtales sont rapportées. Résorptions fœta­les, diminution du nombre et de la taille des fœtus, et mal­formations sont observées à la suite d’expositions par voies cutanée, sous-cutanée ou intrapéritonéale.

    Fertilité

    À la suite d'une exposition à 1 ou 5 ppm d'hydrazine, 6 heures/jour, 5 jours/semaine, pendant un an, les rats femelles exposés à 1 ppm présentent une atrophie des ovaires ainsi qu'une inflammation de l'endomètre et des trompes de Fallope. Chez les hamsters mâles exposés à la même concentration, une atrophie des testicules est rap­portée ; à la plus forte concentration, la production de sperme est absente[38].

    Par voie orale, aucune modification histologique au niveau des ovaires de souris ou hamsters, exposés respec­tivement à 9,3 ou 5,3 mg/kg/j d'hydrazine, pendant 15 - 25 semaines, n'est rapportée [39]. Toutefois, l'absence d'éva­luation des fonctions reproductrices limite l'interpréta­tion de ces résultats.

    Développement

    À la suite d'une exposition à une dose unique de 166 mg/kg d'hydrazine, administrée à des hamsters femelles au 12e jour de gestation, aucun effet sur le déve­loppement n'est rapporté [50]. Une augmentation du nombre de résorptions est observée chez des rates expo­sées par gavage à 18 mg/kg pc/j d'hydrate d'hydrazine, deux semaines avant l'accouplement, toute la période de gestation et jusqu'au 3e jour de lactation (soit 39 jours) [31]. Toutefois, une toxicité parentale (aucune précision donnée sur sa nature) est rapportée par les auteurs à par­tir de 6 mg/kg pc/j, concomitante à une réduction du poids des fœtus et de l'indice de viabilité des nouveau-nés au 4e jour de lactation.

    Le produit est fœtotoxique chez la rate par voie cutanée, sous-cutanée ou intrapéritonéale. L'application unique de 50 mg/kg pc d'hydrazine sur la peau de rates gravides, au 9e jour de gestation, entraîne une résorption fœtale totale chez 10 des 12 femelles exposées[51]. À la dose de 5 mg/kg, les femelles présentent une absence de gain de poids et une nécrolyse épidermique au niveau de la zone d'application, 24 heures après le traitement ; aucune ano­malie n'est rapportée concernant l'implantation, le poids des fœtus ou la présence de malformation. L'application de 8 mg/kg par jour d'hydrazine (monochlorure d'hydra­zine), par voie sous-cutanée, du 11e au 20e jour de gesta­tion, provoque une diminution du nombre et de la taille des fœtus, apparaissant pâles et avec un œdème généra­lisé ; chez les nouveau-nés, une mortalité périnatale de 100 % est rapportée [52]. Des résultats semblables sont obtenus chez le rat par voie intrapéritonéale.

    La dose de 10 mg/kg par jour administrée par voie intra­péritonéale, du 7e au 9e jour de gestation, est sans effet sur le nombre d'implantations mais augmente le nombre de résorptions et accroît de façon significative l'incidence des anomalies fœtales (côtes surnuméraires et fusion­nées, retard dans l'ossification, hydronéphrose, dilatation des ventricules cérébraux) [51]. Des effets tératogènes ont aussi été montrés chez la souris : à la suite d'une exposition à 12 et 20 mg/kg pc/j d'hydrazine entre le 6e et le 9e jour de gestation, le nombre de portées présentant des anomalies (exencéphalie, hydronéphrose et côtes sur­numéraires) augmente avec la dose. Pour les doses les plus fortes, l'embryotoxicité est évidente [53].

    L'exposition de rates gestantes à une atmosphère conte­nant 0,7 à 5 ppm d'hydrazine entraîne des malformations fœtales ; la sensibilité est maximale au 10e jour de gesta­tion [32].

  • Toxicité sur l’Homme

    Les vapeurs d’hydrazine sont très irritantes pour les muqueuses oculaires et respiratoires. De graves brûlures peuvent survenir en cas de projections sur la peau ou dans les yeux. Une sensibilisation cutanée est possible en cas de contacts répétés avec la peau. En plus des effets locaux, l’intoxication aiguë est caractérisée par une atteinte du système nerveux central et du foie, une hémolyse et des troubles métaboliques. Une atteinte rénale peut être asso­ciée aux troubles neurologiques et hépatiques en cas d’ex­position chronique. Les données disponibles ne permettent pas de se prononcer sur un éventuel effet cancérogène de l’hydrazine chez l’homme.

    Toxicité aiguë [54-58]

    Par voie orale ou par inhalation, l'intoxication aiguë se tra­duit essentiellement par une atteinte neurologique (som­nolence ou coma avec convulsions importantes) ; une hypoglycémie est souvent présente ainsi qu'une acidose métabolique. Dans les suites, on peut observer une hémo­lyse et une atteinte hépatique cytolytique. Des troubles neurologiques séquellaires, sensitifs et moteurs, sont pos­sibles. Ils sont lentement régressifs.

    Selon la voie d'entrée, on note en plus des troubles diges­tifs (vomissements) ou respiratoires (dyspnée et/ou œdème pulmonaire) liés à un effet direct de la substance. L'exposition à une concentration élevée de vapeurs peut également induire des lésions oculaires inflammatoires et éventuellement surinfectées, avec possibilité de cécité temporaire.

    Localement, les projections d'hydrazine sous forme liquide peuvent provoquer des lésions cutanées ou oculai­res sévères.

    Toxicité chronique [36, 54-56, 59, 65]

    Un cas mortel d'intoxication a été observé chez un tra­vailleur ayant manipulé de l'hydrazine une fois par semaine pendant 6 mois (concentration atmosphérique vraisemblablement faible mais possibilité d'exposition cutanée). Chaque contact avec le produit déterminait chez ce travailleur des nausées, des tremblements et une conjonctivite. Le décès est intervenu à la suite d'un syn­drome digestif associant fièvre, diarrhée, vomissements, ictère, ainsi qu'une obnubilation. L'autopsie a mis en évi­dence une trachéobronchite sévère, un syndrome pleural, une pneumonie ainsi qu'une atteinte rénale (nécrose tubulaire, hémorragies interstitielles) sans lésion hépa­tique. La relation de causalité n'a toutefois pu être for­mellement établie.

    Dans un autre cas d'exposition prolongée (3 mois) à des vapeurs d'hydrate d'hydrazine en milieu confiné, on a observé un coma hépatique réversible après 3 jours d'hospitalisation. Le bilan biologique initial mettait en évi­dence un syndrome de cholestase et la ponction-biopsie hépatique, une nécrose centrolobulaire. La concentration d'exposition n'a pas été indiquée par les auteurs.

    Un certain nombre de cas d'irritation et d'allergie ont été signalés à la suite de contacts répétés avec le produit. La fréquence des dermatoses peut être importante à cer­tains postes, notamment chez les soudeurs à l'étain. La localisation la plus fréquente concerne le dos des mains et les espaces interdigitaux, mais on rencontre aussi cou­ramment des dermatoses de la face. Le délai d'apparition de l'allergie est court (3 semaines à plusieurs mois). Une allergie croisée entre les dérivés de l'hydrazine a été rap­portée.

    Effets génotoxiques

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

    Effets cancérogènes [54, 60-64, 66-71]

    Des cas de cancers de diverses origines (mélanome choroïdien, leucémies myéloïdes chroniques, sarcome épithé­lioïde, carcinomes basocellulaires) ont été rapportés chez des sujets exposés à l'hydrazine, par voies cutanée et/ou respiratoire, de façon chronique. Cependant, ces observa­tions ne permettent pas d'établir de lien de causalité, notamment en raison des données d'exposition limitées.

    L'étude de la mortalité chez 427 travailleurs employés depuis plus de 6 mois dans une usine ayant fabriqué de l'hydrazine entre 1945 et 1971 et comportant un suivi initialement jusqu'en 1982, puis jusqu'en 1992, n'a pas montré d'augmentation significative de la fréquence des décès dus à des cancers, en particulier pulmonaires. La signification de cette étude est toutefois limitée par la fai­blesse du nombre des travailleurs et du nombre de morts. Elle ne permet notamment pas de détecter de faibles excès de risque.

    Plus récemment, un excès de mortalité statistiquement significatif par cancers du poumon, du colon et du rectum a été mis en évidence dans plusieurs études réalisées dans le secteur aérospatial chez des salariés exposés à l'hydra­zine et à ses dérivés méthylés notamment lors du ravi­taillement et des phases de tests des moteurs. D'autres auteurs ont contesté ces résultats après une nouvelle analyse des données, estimant que ceux-ci pouvaient s'expliquer par la méthodologie employée (mauvaise esti­mation de l'exposition, tabagisme et autres coexpositions insuffisamment prises en compte,...). Bien que ces études ne permettent pas de conclure de façon définitive, celles- ci doivent toutefois alerter sur la possibilité d'éventuels effets cancérogènes liés à l'hydrazine et à ses dérivés méthylés. Il est important d'en tenir compte dans le cadre des démarches de substitution.

    Effets sur la reproduction

    Aucune donnée n’est disponible chez l’homme à la date de publication de cette fiche toxicologique.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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