Toxicité expérimentale
Toxicité aiguë [2, 3]
Par inhalation, la phosphine est à l’origine d’effets neurologiques, hématologiques, pulmonaires, hépatiques et rénaux ; des effets cardiaques sont observés par voie orale. Elle induit également une irritation respiratoire.
La CL50 est estimée chez le rat mâle à 15 mg/m3/ 4 h (11 ppm) ; chez le rat femelle, elle est de 55 mg/m3/ 4 h pour la phosphine issue de l’hydrolyse du phosphure d’aluminium.
La survie des animaux est fonction du produit de la dose par la durée d’exposition ; des expositions à 28 mg/m3 (20 ppm) pendant 4 heures, 140 mg/m3 (100 ppm) pendant 2,5 à 3 heures ou 700 mg/m3 (500 ppm) pendant 25 à 30 minutes sont létales pour le lapin.
Les animaux présentent des signes de dépression du système nerveux central et meurent d’un œdème du poumon ; l’examen anatomo-pathologique révèle bronchiolite et atélectasie pulmonaire. Il n’y a pas d’hémorragie bien que tous les organes soient hyperémiques ; le foie montre une infiltration graisseuse et les reins une turgescence des cellules tubulaires.
Des souris (mâles, 0 - 1 - 5 - 10 ppm, 6 h/j, pendant 4 jours) sont moribondes après la dernière exposition à 10 ppm ; elles présentent des lésions rénales (dégénérescence et nécrose tubulaire), hépatiques (présence de foyers hémorragiques et de nécrose) et myocardiques (dégénérescence). À 1 et 10 ppm, on observe une baisse du nombre de globules rouges, du taux d’hémoglobine et de l’hématocrite ; concernant les globules blancs, une diminution du nombre de lymphocytes et de monocytes est observée dès 1 ppm [18].
La DL50 est de 40,5 mg/kg chez le rat exposé au phosphure de zinc et de 27 mg/kg pour une solution de phosphure de zinc à 94 % de pureté.
Des rats exposés au phosphure d’aluminium par gavage (DL50 = 12 mg/kg) présentent des modifications de leur électrocardiogramme, une diminution de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle [19].
La DL50 cutanée du phosphure de zinc (94 % de pureté) est supérieure à 2000 mg/kg chez le lapin.
La phosphine provoque chez le rat (2 mg/kg, intrapéritonéale) une baisse significative de la concentration en glutathion et une augmentation de la peroxydation des lipides dans le cerveau, les poumons, les reins, le cœur et le foie, ainsi qu’une augmentation du taux de 8-hydroxydesoxyguanine dans l’ADN cérébral, rénal, cardiaque et hépatique. Cet effet est bloqué par des antioxydants, tels que la mélatonine ou la vitamine C, indiquant l’induction d’un stress oxydant [17, 20].
- Irritation, sensibilisation
La phosphine est un irritant respiratoire et provoque salivation, larmoiements, démangeaison de la face et dyspnée [13].
Toxicité subchronique, chronique [2, 3]
Une exposition répétée à la phosphine, à des concentrations non létales, provoque une légère modification des paramètres sanguins.
Une exposition répétée pendant 2 semaines à la phosphine (rats et souris, 0 - 1,25 - 2,5 - 5 ppm, 6 h/j, 5 j/sem) induit, à la plus forte dose, une légère augmentation du taux d’urée (chez les souris mâles) et une baisse de poids des poumons chez les mâles, une augmentation du poids du cœur chez les femelles, mais aucune létalité ; la NOAEL est de 2,5 ppm [18].
Des souris exposées à la phosphine (0 - 0,3 - 1 - 4,5 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 13 sem) présentent, pendant l’exposition à la plus forte concentration, des démangeaisons de la face, de la queue et des pattes et une baisse d’activité à la fin de chaque exposition. Après l’exposition, une relation linéaire inverse est observée entre le poids corporel et la concentration, indépendamment du sexe. La NOAEL est de 1 ppm [21].
Chez le rat (0 - 0,3 - 1 - 3 - 10 ppm, 6 h/j, 5 j/sem, 13 sem), on observe une forte létalité chez les femelles à 10 ppm après 3 jours d’exposition mais pas chez les mâles ni aux autres concentrations. Une nécrose tubulaire rénale (mâles et femelles) et une congestion pulmonaire (femelles) sont constatées chez les animaux morts (10 ppm). Chez les mâles, on note une très légère diminution de la concentration en hémoglobine, de l’hématocrite et du nombre de globules rouges à 3 ppm, ainsi qu’une légère baisse de la prise de poids dans les 2 sexes (à 1 et 3 ppm) [22]. Tous les paramètres hématologiques reviennent à la normale après 4 semaines de récupération.
Des rats exposés pendant 2 ans (0 - 0,3 - 1 - 3 ppm, 6 h/j, 5 j/sem) ne présentent ni modification clinique, hématologique ou macroscopique, ni effet sur le poids ou la prise de nourriture [23].
Effets génotoxiques
La phosphine n’est pas génotoxique in vitro ; in vivo, une légère augmentation des dommages chromosomiques est rapportée, mais uniquement aux concentrations proches des seuils de toxicité.
In vitro
La phosphine n’induit pas de mutation génique dans le test d’Ames, avec ou sans activation métabolique. De même, aucune augmentation du nombre d’aberrations chromosomiques n’est rapportée dans des cellules ovariennes de hamster, sans activation métabolique ; les résultats avec activation sont aussi négatifs mais le témoin positif n’ayant pas entrainé d’augmentation du nombre d’aberrations, ils ne peuvent pas être considérés comme fiables.
In vivo
In vivo, chez le rat et la souris, une exposition subaiguë (jusqu’à 15 ppm, 6 h ou 5 ppm, 6 h/j, 9 j sur une période de 11 j) n’est pas génotoxique (aberrations chromosomiques, échanges de chromatides sœurs et micronoyaux) [24] ; en revanche, une concentration de 4,5 ppm (6 h/j, 5 j/sem, pendant 13 semaines) induit l’apparition de micronoyaux dans les érythrocytes polychromatiques de la moelle osseuse et de la rate de souris [21].
Un test de létalité dominante conduit chez la souris mâle (5 ppm pendant 10 j) n’a pas montré d’effet sur les cellules germinales [24].
Effets cancérogènes [25]
Dans les tests pratiqués, la phosphine n’a pas induit d’augmentation du taux de tumeurs.
Par voie orale, il n’y a pas d’augmentation du taux de tumeurs chez le rat recevant une nourriture fumigée avec du phosphure d’aluminium équivalant à 0,27 mg de phosphine/kg de nourriture pour les semaines 1 à 16 et 0,51 mg/kg de nourriture pour les semaines 17 à 104 (soit respectivement 13,5 µg/kg/j et 25,5 µg/kg/j).
Le résultat est également négatif dans une étude réalisée chez le rat pendant 2 ans avec de la nourriture fumigée à la phosphine et contenant 5 ppb de phosphine résiduelle (correspondant à une administration de phosphine de 0,25 µg/kg/j).
Effets sur la reproduction [25]
Dans les tests pratiqués, la phosphine n’induit aucun effet sur la fertilité et le développement.
Fertilité
Des rates gestantes exposées à la phosphine (0,03 - 0,3 - 3 - 5 - 7 ppm, 6 h/j, du 6e au 15e jour de gestation) subissent une létalité importante à la plus forte concentration ; aux concentrations inférieures, le nombre d’implantations, le poids des ovaires et de l’utérus et le nombre de corps jaunes ne sont pas modifiés [22].
Chez la souris (5 ppm, 6 h/j, 10 jours), les accouplements de mâles exposés à des femelles non exposées sont sans effet sur le nombre de gestations, par rapport aux témoins [24].
Développement
Dans l’étude citée ci-dessus, on note une augmentation du taux de résorption à la plus faible concentration uniquement ; aucune malformation ni fœtotoxicité n’a été observée. La NOAEL est de 5 ppm pour la toxicité maternelle et fœtale [22].