Pathologie - Toxicologie
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Toxicocinétique - Métabolisme [2]
L’acide borique et les tétraborates de sodium sont facilement absorbés par voie orale et par inhalation, et largement distribués dans l’organisme, avant d’être excrétés, essentiellement par les urines, sous forme d’acide borique.
Chez l'animal
Absorption
L’absorption par voie digestive est rapide et quasi complète (95 %). Le passage à travers la peau intacte est très faible mais il peut devenir important en cas de contact avec de la peau abimée [22]. L’absorption par les voies respiratoires est avérée mais non quantifiée.
Distribution
Chez le rat, le bore absorbé est distribué dans tout l’organisme, notamment dans le foie, les reins, le cerveau, les muscles, les glandes surrénales, les testicules ou le sang (61 mg B/ kg pc/j, 28 jours). L’état d’équilibre est atteint en 3 à 4 jours pour tous les tissus exceptés les os (équilibre atteint après 4 semaines) et le tissu adipeux, dans lequel de très faibles concentrations sont mesurées (seulement 20 % de la concentration en bore dans le plasma) [23].
Métabolisme
L'acide borique n'est pas métabolisé chez l’animal.
Excrétion
Comme chez l’Homme, le bore est rapidement excrété, principalement par voie urinaire : chez le lapin, 50 à 66 % d’une dose absorbée par voie orale sont excrétés dans les urines en 24 heures. La demi-vie plasmatique du bore est de l’ordre de 3 heures chez le rat et de 1 heure chez la souris [24].
La clairance rénale du bore est trois fois plus rapide chez le rat que chez l’Homme [25].
La clairance du bore est plus faible que celle de la créatinine, suggérant, une réabsorption tubulaire de l'acide borique chez le rat [24].
Chez l'Homme
[5, 26, 27]
- Absorption
L'acide borique et les tétraborates de sodium sont rapidement et presque entièrement absorbés par voie digestive (81-92 %), quel que soit le véhicule dans lequel ils sont dissous [28]. Le passage à travers la peau intacte est faible : 24 heures après le dépôt, il a été estimé à 0,23 % pour l’acide borique et à 0,21 % pour le tétraborate de sodium décahydraté (solutions à 5% appliquées sur la peau de volontaires, pendant 24 heures, sous conditions non occlusives) [29].
Par inhalation, aucune donnée quantitative n’est disponible mais l’augmentation des concentrations de bore dans les tissus, le sang et son élimination par les urines traduisent leur absorption.
- Distribution
Dans l'organisme, les composés boratés existent sous forme d'acide borique indissocié. L'acide borique diffuse dans tout l'organisme ; il traverse les barrières hémato-encéphalique et placentaire. Après une administration unique par voie orale, c'est au niveau du sang, des reins, du foie et du cœur que sont mesurées les concentrations les plus élevées. De faibles concentrations sont observées dans les tissus adipeux et il s'accumule dans les os.
En cas d'administrations répétées, l'acide borique est retrouvé préférentiellement au niveau des reins, des glandes surrénales, du cœur, du cerveau et du foie.
Par voie respiratoire, les tissus cibles identifiés sont les mêmes que ceux observés lors d'une administration par voie orale.
- Métabolisme
L'acide borique n'est pas métabolisé chez l’Homme. Les tétraborates de sodium se dissocient en acide borique à pH physiologique, au niveau de la couche aqueuse recouvrant les muqueuses, avant leur absorption.
- Elimination
L'élimination est rapide, principalement urinaire, avec plus de 90 % de la dose administrée éliminée dans les urines, quelle que soit la voie d’administration. L'élimination est presque complète 5 jours après l’administration par voie intraveineuse d'une dose unique de 562 à 611 mg d’acide borique. La demi-vie plasmatique du bore a été estimée à 21 heures par un modèle pharmacocinétique.
De faibles quantités de bore sont excrétées dans la salive, les fèces, le lait et la sueur [21].
Surveillance Biologique de l'exposition
Le dosage du bore urinaire en fin de poste de travail peut être intéressant pour la surveillance biologique des salariés exposés. La concentration urinaire dépend de l’intensité de l’exposition mais cette corrélation n'est pas bien caractérisée.
Le dosage sanguin de bore est surtout intéressant lors d'exposition accidentelle.
Pour une exposition à l’acide borique et aux tétraborates, la Commission allemande DFG propose de faire la différence entre les concentrations de bore urinaire en début et en fin de poste, sans valeur chiffrée.
Des valeurs biologiques d’interprétation issues de la population générale, correspondant au 95e percentile des valeurs mesurées, sont disponibles pour le bore urinaire et sanguin (ou plasmatique).
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Mode d'actions
L'acide borique et les tétraborates de sodium interfèrent avec le métabolisme des flavines, ce qui peut expliquer, au moins partiellement, ses effets toxiques.
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Toxicité expérimentale
Toxicité aiguë [21, 26]
L’acide borique et les tétraborates de sodium sont peu toxiques en aigu ; leur potentiel irritant pour la peau et les muqueuses est variable selon les composés. Ils ne sont pas des sensibilisants cutanés.
Chez le rat, les DL50 par voie orale sont comprises entre 2660 et 4140 mg/kg pc pour l’acide borique (entre 465 et 724 mg B/kg), supérieures à 2500 mg/kg pc pour le tétraborate de sodium anhydre (538 mg B/kg), de 3305 mg/kg pc pour la forme pentahydratée (489 mg B/kg) et de 5560 mg/kg pc pour la forme décahydratée (628 mg B/kg).
Les CL50 4 h de l’acide borique et des tétraborates de sodium sont supérieures à 2 g/m3 [21].
Par voie cutanée, les DL50 chez le lapin sont supérieures à 2000 mg/kg pc pour l’acide borique et les tétraborates, aucune mortalité n’étant observée [25].
L'administration orale ou parentérale de fortes doses de ces composés est suivie de troubles digestifs (vomissements, diarrhées), d'une accélération des rythmes cardiaque et respiratoire, d’une dépression du système nerveux central, d'une ataxie, d'une hypothermie puis d'un coma et de convulsions. L'examen anatomopathologique des animaux décédés révèle une gastroentérite hémorragique, une atteinte rénale tubulaire et glomérulaire, un aspect congestif et des lésions hypoxiques du système nerveux central [1].
Irritation, sensibilisation [1, 25]
L'acide borique est faiblement irritant pour la peau du lapin et du cochon d'Inde, les muqueuses oculaires et respiratoires. En solution à 1,9 % dans l'eau, il est parfaitement toléré par l'œil de lapin. L’acide borique n’est pas irritant pour les voies respiratoires supérieures.
Les tétraborates de sodium penta- et décahydratés ne sont pas irritants pour la peau de lapin. Une légère irritation oculaire est rapportée pour les formes hydratées. Les effets, réversibles en 2 semaines, sont probablement liés à la nature cristalline de ces substances.
Sous sa forme pentahydratée, aucune irritation des voies respiratoires supérieures n’est observée.
Aucun potentiel sensibilisant pour la peau n’est observé dans les tests de Buehler disponibles pour ces composés [2].
Toxicité subchronique, chronique [21]
Les études chroniques et subchroniques mettent en évidence des effets sur le sang, la rate, le système immunitaire ou le foie, ainsi que des effets systémiques non spécifiques.
Acide borique
Des rats nourris avec des aliments contenant de l’acide borique ont développé une intoxication dont le tableau associait une diminution de la croissance pondérale (68 mg B/kg pc/j sous forme d’acide borique pendant 9 semaines, NOAEL = 52 mg B/kg pc/j, [31]), une polypnée, une hyperhémie conjonctivale, un œdème des pattes, une desquamation des pattes et de la queue (88 et 260 mg B/kg pc/j pendant 90 jours dans la nourriture, NOAEL = 26 mg B/kg pc/j, [32]).
Une étude récente, menée chez des rats mâles exposés à 0,16 mg B/kg pc/j pendant 90 jours, a mis en évidence une hématotoxicité (anémie, thrombopénie et leucopénie), une immunotoxicité (augmentation de l’expression d’interféron γ, de TNF α et d’interleukines, baisse des taux d’immunoglobulines) et des atteintes histopathologiques de rate (hyperplasie de la pulpe rouge, dégénérescence des cellules spléniques, infiltration de macrophages et atrophie de la pulpe blanche) [33]. Dans l’étude du NTP, une diminution du volume de globules rouges et de l’hémoglobine a été mesurée uniquement chez les mâles à la plus forte dose (58,5 mg B/kg pc/j pendant 2 ans, NOAEL = 17,5 mg B/kg pc/j) [34].
Chez la souris, une diminution de la prise de poids a été rapportée dans des études de 90 jours, à partir de 142 mg B/kg pc/j pour les mâles et 196 mg B/kg/j pour les femelles (NOAEL = 71/98 mg B/kg pc/j m/f) [25]. Par ailleurs, des effets hépatiques ont été observés chez des souris exposées pendant 2 ans à des doses ≥ 79 mg B/kg pc/j dans la nourriture (inflammation chronique et nécrose), ce qui n’a pas été le cas pour des expositions plus courtes [34].
Tétraborates de sodium
Des rats Sprague-Dawley ont été exposés à du tétraborate de sodium décahydraté via l’alimentation pendant 90 jours (0-2,6-8,8-26-88 et 260 mg B/kg pc/j). À la plus forte dose, tous les animaux sont morts ; des effets non spécifiques, identiques à ceux de l’acide borique, sont rapportés à partir de 88 mg B/kg pc/j (diminution de la croissance pondérale, polypnée, hyperhémie conjonctivale, atteintes des pattes et de la queue). A cette même dose, le poids du foie et de la rate est diminué chez les femelles ; chez les mâles, la baisse concerne les reins et les glandes surrénales [2]. Après deux années d’exposition (0-5,9-17,5 et 58,5 mg B/kg pc/j, dans la nourriture), le taux d’hémoglobine et le volume érythrocytaire sont diminués chez les rats exposés à la plus forte dose [2].
Chez les rats Long Evans exposés au tétraborate de sodium décahydraté via l'eau de boisson pendant 70 jours, le poids des animaux diminue ainsi que celui des vésicules séminales, des testicules, de la rate, du fémur, de même que le taux de triglycérides plasmatiques. Ces effets sont observés aux doses de 23,7 et de 44,7 mg B/kg pc/j. À cette dernière dose, l'hématocrite est légèrement diminué et la spermatogenèse altérée [35].
Effets génotoxiques [2, 21, 34, 36]
L’acide borique et les tétraborates de sodium ne sont pas considérés comme génotoxiques.
- In vitro
Il n'a pas été mis en évidence d'effet mutagène de l’acide borique dans les tests d’Ames (sur Salmonella typhimurium et E. coli) avec ou sans activation métabolique. De même les tests d’aberration chromosomique (cellules ovariennes de hamster), de mutation génique (cellules de lymphome de souris, fibroblastes humains et murins, cellules ovariennes de hamster) et de transformation cellulaire (cellules de mammifères) se sont avérés négatifs.
En revanche, des aberrations chromosomiques structurelles, mais pas d’échanges de chromatides sœurs, ont été observées sur des cultures des lymphocytes humains exposés à de l’acide borique (400 à 1000 µg/l d’acide borique, dissous dans du DMSO, pendant 24 ou 48 h) [37].
Concernant les tétraborates de sodium, aucune activité mutagène n'a été observée avec ou sans activation métabolique (test d’Ames sur S. typhimurium, méthode de pré-incubation) [36]. Le tétraborate de sodium décahydraté (brut et raffiné) n'induit ni mutation sur des fibroblastes de hamster chinois, ni transformation néoplasique sur des fibroblastes d’embryons de souris, mais s’avère cytotoxique pour ces cellules. Aucun effet génotoxique du tétraborate de sodium décahydraté n’a été mis en évidence que ce soit sur lymphocytes ou érythrocytes humains : résultats négatifs pour les échanges de chromatides sœurs, les micronoyaux et les aberrations chromosomiques [38].
- In vivo
Un essai de micronoyaux donne des résultats négatifs chez la souris (acide borique, gavage de 0 à 3500 mg/kg pc/j, pendant 2 jours) [1].
Un test des comètes met en évidence une augmentation des dommages à l’ADN spermatique, en lien avec la dose, après 6 semaines d’exposition à 20-44 ou 79 mg B/kg pc/j (sous forme d’acide borique) ; une augmentation du stress oxydant est aussi observée dans les tissus testiculaires [39].
Aucun des borates inorganiques testés (tétraborate de sodium pentahydraté et décahydraté, tétraborate de sodium anhydre) n’est mutagène in vivo. Le borax n’entraine aucune augmentation du nombre de micronoyaux au niveau d’hépatocytes de rats, à la suite d’une exposition par voie intrapéritonéale (3,25 et 13 mg/kg pc/j, pendant 10 jours) [40].
Effets cancérogènes [21, 34]
Aucune tumeur n’a été mise en évidence dans les études disponibles.
Dans une étude réalisée sur le chien à des doses allant jusqu'à 350 ppm d’acide borique (6,8 mg B/kg/j, 2 ans), aucune tumeur n'a été rapportée. Il en est de même chez le rat, nourri avec des doses allant jusqu'à 81 mg B/kg/j pendant 2 ans. Même si des carcinomes hépatocellulaires et une augmentation de l'incidence de tumeurs sous-cutanées ont été observés chez la souris mâle à une dose de 2500 ppm (446 mg B/kg/j), leurs incidences étaient comprises dans les valeurs des contrôles historiques ; à 5000 ppm (992 mg B/kg/j), aucun effet cancérogène n’est rapporté.
De même, dans les études chroniques réalisées chez le chien (jusqu'à 8,8 mg B/kg/j) et le rat (58,5 mg B/kg/j), exposés via la nourriture au tétraborate de sodium décahydraté, aucune tumeur n'a été rapportée.
Effets sur la reproduction [21, 36]
Le fœtus en développement et les testicules sont les principales cibles de l’acide borique et des tétraborates de sodium chez de nombreuses espèces.
Fertilité
De nombreuses études mettent en évidence les effets sur le système reproducteur masculin de l’acide borique et des tétraborates de sodium, suite à une exposition par voie orale (dans l’eau de boisson, en mélange dans la nourriture ou par gavage). Histologiquement, l'atteinte des cellules germinales est prédominante. Le mécanisme d'action de l'acide borique n'est pas connu, mais les données disponibles suggèrent un effet sur les cellules de Sertoli, induisant une altération de la maturation et de la libération du sperme.
Acide borique
Les effets testiculaires apparaissent après seulement 2 semaines d’exposition chez le rat (44 et 52,5 mg B/kg pc/j, par gavage) : diminution du poids des testicules, formation de cellules géantes multinucléées, présence de corps résiduels, dégénérescence/nécrose des cellules germinales et inhibition de la spermiation (rétention des spermatides). La NOAEL déterminée à partir de ces effets est de 22 mg B/kg pc/j) [41, 42].
Les effets sur le système reproducteur masculin des rats, rapportés suite à des expositions chroniques d’acide borique, sont les suivants :
- diminution du poids des organes (testicules, épididymes, prostate…) ;
- désorganisation et gonflement de l’épithélium germinal, exfoliation des cellules germinales, atrophie des tubes séminifères ;
- présence de débris cellulaires dans les testicules et les épididymes, apparition des cellules géantes multinucléées ;
- atteinte plus ou moins sévère de la spermiation, baisse de la motilité et de la viabilité des spermatozoïdes, augmentation de l’incidence des spermatozoïdes présentant des anomalies morphologiques.
Lorsque les lésions des tubes séminifères sont importantes, leur régression à l'arrêt de l'exposition est lente et souvent incomplète. Les conséquences sur la reproduction de ces effets testiculaires vont d’une augmentation des pertes préimplantatoires à une stérilité complète. Les premiers effets apparaissent sur le sperme, dès 26 mg B/kg pc/j [31] ; la dose la plus élevée sans effet, identifiée dans les études disponibles, est de 10 mg B/kg pc/j [32].
Chez les rats femelles, une diminution de l’ovulation a été observée suite à une exposition à 116 mg B/kg pc/j, dans l’eau de boisson, pendant 2 ans (NOAEL = 12 mg B/kg pc/j) [32].
Des effets similaires sont observés chez la souris. Dans une étude deux générations, l'indice de fertilité, le poids des testicules et de l'épididyme, et des indices testiculaires (index spermatogénique, diamètre des tubes séminifères, spermatides par testicule) ont été significativement réduits chez les mâles exposés à 111 mg B/kg pc/j. La dose inférieure (mâles : 19,2 mg B/kg pc/j ; femelles : 32 mg B/kg pc/j) diminuait la mobilité des spermatozoïdes chez les parents et la concentration du sperme chez quelques mâles de la première génération ; chez la femelle, on a pu observer une augmentation des poids de l'utérus et des reins ainsi que des cycles œstraux plus courts [43]. Aucune NOAEL n’a pu être définie à partir de ces résultats.
Dans une étude de 2 ans, une atrophie testiculaire et une hyperplasie des cellules interstitielles associées à une létalité plus importante chez les souris mâles ont été observées à 96 mg B/kg pc/j ; la concentration de 48 mg B/kg pc/j est sans effet [34].
Tétraborate de sodium décahydraté
Une étude menée sur 3 générations de rats a permis de déterminer une NOAEL de 17,5 mg B/kg pc/j, à partir des effets toxiques sur les testicules, d'une réduction de la spermiation chez le mâle et d'une diminution de l'ovulation chez la femelle. Aux doses les plus élevées, une atrophie testiculaire et une déplétion des cellules germinales testiculaires sont observées. La fertilité est fortement impactée : l’accouplement entre les femelles exposées et les mâles non exposés n’engendre aucune descendance [2, 32].
Chez la souris, une LOAEL pour les effets sur la fertilité de 27 mg B/kg pc/j a été déterminée (exposition en continu dans la nourriture). A cette dose, une diminution de la motilité spermatique est observée à la génération F0 ; dans la génération F1, le poids de l’utérus est augmenté, le cycle œstral raccourci et la concentration spermatique diminuée de 25 % ; à la seconde génération, on observe une réduction du poids des souriceaux [43].
Aucune étude n’est disponible par voie respiratoire ou cutanée.
Développement
Concernant la toxicité sur le développement, seules des données sur l'acide borique sont disponibles (rats, souris et lapins). Étant donné que les composés du bore sont présents sous forme d'acide borique dans l'organisme, les données de ce dernier par voie orale peuvent être extrapolées aux tétraborates de sodium [29, 44].
Les effets observés sur le développement incluent un taux élevé de mortalité prénatale, une réduction du poids de fœtus et des malformations (systèmes nerveux central, yeux, système cardiovasculaire et axe squelettique). Ces effets sont observés pour des concentrations inférieures à celles entrainant les effets sur les testicules.
Le rat est l'espèce la plus sensible [45]. Des anomalies du squelette costal sont fréquemment observées chez le rat et la souris alors que les malformations cardiovasculaires sont plus fréquentes chez le lapin (Tableau 1).
Conditions expérimentales
Durée exposition
Effets observés
NOAEL
Référence
Souris gestantes, 0-43-79-175 mg B/kg pc/j
Du 1er au 17e jour de gestation
79 mg B/kg pc/j : baisse du poids fœtal par portée, augmentation du nombre de fœtus avec des côtes rétrécies
43 mg B/kg pc/j
Souris (0-1000-4500-9000 ppm)
Femelles : 32-148-290 mg B/kg pc/j
Mâles : 19-105-221 mg B/kg pc/j
En continu pendant 27 semaines
9000 ppm : aucune portée
4500 ppm : baisse du nombre de portées, du nombre de nouveau-nés vivants par portée et de leur poids
1000 ppm : diminution de la concentration spermatique chez quelques nouveau-nés mâles de la génération F1
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[43] Rates gestantes, 0-13,6-28,5-57,7 mg B/kg pc/j
Du 1er au 20e jour de gestation
13,6 mg B/kg pc/j : baisse du poids fœtal
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Rates gestantes, 0 ou 94,2 mg B/kg pc/j
Du 6e au 15e jour de gestation
Chez les mères : baisse de la consommation d’eau et de nourriture et augmentation du poids du foie et des reins
Chez les fœtus : augmentation des malformations (dilatation ventriculaire cérébrale, XIIIème côte réduite)
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Rates gestantes, 0-3-6-10-13-25 mg B/kg pc/j
Du 1er au 20e jour de gestation
Sacrifice au 20e jour ou 21 jours après la délivrance
13 mg B/kg pc/j : baisse poids fœtal au 20e jour de gestation
25 mg B/kg pc/j : XIIIème côte réduite chez les nouveau-nés de 21 jours
10 mg B/kg pc/j
Rates gestantes, 0-5-10-20 mg B/kg pc/j
Du 6e au 21e jour de gestation puis exposition des nouveau-nés jusqu’au 28e jour postnatal
20 mg B/kg pc/j : incidence d’hernies ombilicales en légère hausse au 7e jour mais transitoire, diminution du poids fœtal
10 mg B/kg pc/j
[48]
Lapines gestantes, 0-10,9-21,9-43,7 mg B/kg pc/j
Du 6e au 19e jour de gestation (gavage), sacrifice au 30e jour
43,7 mg B/kg pc/j : malformations cardiaques fœtales (anomalie du septum interventriculaire)
21,9 mg B/kg pc/j
[49]
Tableau 1 : Effets de l'acide borique sur le développement des rats, souris et lapins.
Effets pertubateurs endocriniens
Une diminution de la concentration en testostérone a été mesurée chez des rats recevant 61 mg B/kg pc/j dans la nourriture, pendant 28 jours [50] ou 136 mg B/kg pc/j pendant 60 jours [51]. Dans une étude plus récente, une augmentation des taux de testostérone et d’œstradiol a été rapportée chez des rats exposés à 44 mg B/kg pc/j pendant 60 jours, par gavage [52].
Une augmentation du taux des hormones folliculo-stimulante (FSH) et lutéo-stimulante (LH) a été mesurée chez des rats exposés de 26 à 68 mg B/kg pc/j pendant 9 semaines. L’augmentation est supposée être une réponse compensatoire à l’atrophie des testicules [31].
Bien qu'il soit démontré que des doses élevées d'acide borique peuvent produire une toxicité pour la reproduction et le développement des mâles chez les rongeurs, il n'existe aucune preuve convaincante que les effets sur la santé, induits par l'acide borique, soient consécutifs à des modifications de la fonction endocrinienne [1, 45, 53].
Concernant le tétraborate de sodium décahydraté, des activités anti-œstrogénique et anti-androgénique observées dans une étude, demandent à être confirmées avant de pouvoir conclure [54].
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Toxicité sur l’Homme
En milieu professionnel, l’exposition aiguë ou chronique se traduit principalement par des effets irritants des muqueuses voire de la peau selon le mode d’exposition, ainsi qu’une toxicité directe sur le follicule pileux à l’origine d’une dépilation réversible. Des publications anciennes décrivent de possibles signes d’intoxication systémique (encéphalopathie débutante,…) chez des travailleurs exposés de façon prolongée à des concentrations élevées. L’acide borique et le borax ne sont pas considérés comme sensibilisants. Les données disponibles chez l’Homme sont en faveur de l’absence d’effet génotoxiques. On ne dispose pas de donnée sur d’éventuels effets cancérogènes. Les études de reprotoxicité chez l’Homme sont insuffisantes pour démontrer l’absence d’effet néfaste sur la fertilité ou le développement.
Toxicité aiguë
Une irritation des yeux et des voies respiratoires (sécheresse de la bouche, du nez ou de la gorge, mal de gorge, toux, dyspnée...) a été décrite chez des travailleurs exposés à l'acide borique et aux borates de sodium en suspension dans l'air à partir d’environ 4 mg/m3 [9, 55 à 58]. Le borax est sévèrement irritant pour les yeux [59].
Aucune intoxication aiguë systémique n’a été rapportée chez des travailleurs exposés à l'acide borique ou au borax [60]. Les intoxications aiguës systémiques par l'acide borique sont secondaires à des ingestions massives ou un contact prolongé avec une peau lésée [9, 25, 59, 61, 62]. Après un délai de quelques heures, la symptomatologie de ces intoxications systémiques associe typiquement des troubles digestifs (nausées, vomissements, douleurs abdominales, diarrhées) et neurologiques (hypertonie, agitation, tremblements, convulsions, céphalées,…) voire des troubles hémodynamiques, une hyperthermie et une acidose métabolique. Plusieurs observations signalent des atteintes rénale, hépatique et pancréatique. Au décours de l'intoxication, une atteinte de la peau (typiquement érythème des mains, des pieds et du siège évoluant vers la desquamation) peut également survenir [59, 61].
Toxicité chronique
Les contacts cutanés répétés peuvent provoquer des dermites d’irritation [60, 63].
L’exposition à des poussières, aérosols, fumées peut entraîner des conjonctivites, des rhinites, des bronchites chroniques voire des troubles digestifs mineurs [60, 63]. Il n’a pas été retrouvé d’altération de la fonction respiratoire chez des travailleurs exposés aux borates de sodium lors d’opérations d’extraction et de traitement ; aucune donnée n'a été retrouvée en ce qui concerne l'acide borique [9, 58].
Une toxicité directe sur le folicule pileux à l’origine d’une perte réversible des poils et des cheveux a été décrite chez des travailleurs exposés [60, 63].
Des publications anciennes rapportent des signes évocateurs d’encéphalopathies débutantes chez des travailleurs exposés de façon prolongée à des concentrations élevées, mais l’imputabilité reste douteuse [60, 63].
- Sensibilisation
Des dermatoses de contact allergiques ont été observées chez des travailleurs manipulant des fluides de coupe contenant de l'acide borique ; l'allergie est peut-être en relation avec un produit de réaction formé avec la monoéthanolamine au sein de la préparation [64]. Des patch-tests positifs aux alcalinoborates présents dans ces fluides ont été mis en évidence dans quelques cas, les patch tests évaluant l’acide borique seul à 3 % dans de l’eau étaient négatifs [65].
Effets génotoxiques
Les études de génotoxicité (tests des comètes et des micronoyaux) menées chez l’Homme exposé au bore de façon environnementale ou professionnelle sont en faveur de l’absence d’effet génotoxiques de l’acide borique et du borax [60, 66 à 68]. Il n’a pas été retrouvé de données de génotoxicité en milieu professionnel issues d’études indépendantes.
Effets cancérogènes
Il n’a pas été retrouvé d’études portant spécifiquement sur d’éventuels effets cancérogènes de l’acide borique ou du borax chez des travailleurs exposés. Les cancers de la peau qui ont été décrits chez des mineurs de borax ont été attribués à une co exposition à l’arsenic [63, 69].
Effets sur la reproduction [70]
Fertilité
Dans une étude ancienne de Tarasenko menée en URSS chez 28 sujets exposés plus de 10 ans à l'acide borique, une réduction de la libido et une oligoasthénospermie ont été rapportées chez 6 d’entre eux [63]. Dans 50 % des cas, les prélèvements atmosphériques au poste de travail étaient élevés compris entre 20 et 83 mg/m3. Ces résultats, réalisés sur une très faible cohorte, n'ont pas été confirmés par d'autres études.
Ainsi, aux États-Unis, aucun effet sur la fertilité masculine n'a été retrouvé chez 542 travailleurs (parmi 753) exposés à l'acide borique ou au borate de sodium et répartis en 5 groupes selon le niveau d'exposition en utilisant le taux de natalité standardisé (Standardised Birth Ratio) comme indice de fertilité (nombre de naissances observées/nombre de naissances attendues). Pour une sélection de 42 sujets les plus exposés, l'exposition moyenne était de 28,4 mg B/jour (environ 0,4 mg B/kg/j pendant plus de 2 ans), et le nombre de naissances était supérieur à celui de la moyenne nationale aux États-Unis. Les auteurs concluent que l'exposition professionnelle ne semble pas avoir de conséquence sur la capacité de reproduction de ces hommes [71].
La plupart des études menées ultérieurement ne sont pas indépendantes et ne rapportent pas d’association entre l’exposition professionnelle ou environnementale en Turquie ou en Chine et une altération de la qualité du sperme [72 à 74] ou une altération du taux sanguin de FSH, LH et testostérone [75 à 78]. Un ratio Y/X plus faible a été observé dans les spermatozoïdes d’hommes exposés au bore de façon professionnelle ou environnementale en Chine [73], mais n’a pas été retrouvé dans une cohorte du même type en Turquie [79].
Développement
Dans une étude chinoise, des travailleurs de l’industrie du bore rapportent un nombre moyen de bébés nés vivants plus faible et des avortements induits plus fréquents qu’un groupe de travailleurs issus d’une zone où l’exposition environnementale est faible. Mais il n’a pas été observé de différence significative concernant les grossesses multiples, les fausses couches spontanées, les bébés morts nés, les grossesses extra utérines, le sex ratio et les grossesses tardives. L’absence de données sur les conjointes de ces hommes ainsi que l’influence de facteurs de confusion rendent difficile l’interprétation de ces données [80].
Il n’a pas été trouvé d’étude portant spécifiquement sur les issues de grossesses de femmes exposées professionnellement.
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Interférences métaboliques
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Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal