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Pentachlorophénol et sels de sodium et de potassium

Fiche toxicologique n° 11

Sommaire de la fiche

Édition : Mise à jour 2013

Pathologie - Toxicologie

  • Toxicocinétique - Métabolisme

    Le pentachlorophénol est bien absorbé par toutes les voies d’exposition. La substance, qui passe rapidement dans le sang, est partiellement métabolisée au niveau hépatique et excrétée dans les urines et les fèces.

    Chez l'animal

    Le pentachlorophénol est absorbé par ingestion, par inhalation ou à travers la peau. Quelles que soient la voie d’absorption et l’espèce, le produit passe dans le sang où il se combine aux protéines plasmatiques, avant d’être éliminé essentiellement dans l’urine et les fèces. La part du produit retrouvée dans les tissus est faible, les concentrations les plus élevées se situent au niveau du foie et des reins.

    L’absorption et l’élimination sont rapides. Chez l’homme, pour une dose de 0,1 mg/kg per os, le pic plasmatique est atteint en 4 heures environ, la demi-vie du produit est voisine de 30 heures ; 90 % du produit sont excrétés en 8 jours.

    Surveillance Biologique de l'exposition

    Étant donné la bonne pénétration cutanée du pentachlorophénol, la surveillance biologique des expositions au pentachlorophénol est intéressante.

    Le dosage du pentachlorophénol sanguin en fin de poste de travail reflète l’exposition des semaines précédentes.

    Le dosage du pentachlorophénol urinaire total en début de poste et fin de semaine de travail est le reflet de l’exposition chronique. En dehors de toute absorption cutanée, une bonne corrélation existe entre les concentrations urinaires et atmosphériques de pentachlorophénol.

    Il existe une relation entre les taux de pentachlorophénol sanguin et urinaire et les effets rénaux.

    Des valeurs biologiques de référence pour la population professionnellement exposée ont été établies pour le pentachlorophénol sanguin et urinaire (Voir Recommandations § Au point de vue médical).

  • Mode d'actions
  • Toxicité expérimentale
    Toxicité aiguë

    Quelle que soit la voie d’administration, le pentachlorophénol induit des effets sévères neurologiques avec convulsion, métaboliques avec hyperthermie, et cardiaques. La substance peut induire une acné chlorée mais est modérément irritante pour la peau et les yeux.

    Chez le rat, les DL 50, trouvées dans la littérature, sont comprises entre 27 et 210 mg/kg par voie orale et entre 150 et 330 mg/kg par voie percutanée ; la seule expérimentation réalisée par inhalation a mis en évidence une toxicité élevée par cette voie : DL 50 estimée à 11,7 mg/kg pour une exposition de 10 à 20 min à la concentration de 900 mg/m3 [11]. Chez les autres espèces étudiées (souris, lapins, chiens, porcs, moutons et veaux), les chiffres trouvés sont voisins.

    Quelles que soient l’espèce et la voie de pénétration dans l’organisme, les signes observés sont une hyperthermie, une élévation des fréquences cardiaque et respiratoire, une faiblesse neuromusculaire progressive, avec des convulsions et une défaillance cardiaque dans les intoxications mortelles ; chez les animaux qui meurent, la rigidité cadavérique est rapide et intense. L’autopsie révèle une atteinte étendue du système vasculaire, avec congestion et oedème des tissus parenchymateux et avec des lésions des petits vaisseaux.

    Localement, le pentachlorophénol est modérément irritant pour la peau de lapin, la gravité des lésions étant fonction du véhicule employé (maximale avec les solvants pétroliers, minimale avec les solutions aqueuses). L’application du produit technique sur l’oreille du lapin provoque la formation d’acné mais il semble bien que cette action soit le fait des impuretés présentes dans le produit et, notamment, de l’hexachlorodibenzo-p-dioxine. Pour l’oeil du lapin, le pentachlorophénol est un irritant sévère.

    Toxicité subchronique, chronique [3]

    Une hépatotoxicité est observée dans les études expérimentales relatives à la toxicité subchronique et chronique, sans doute liée à la présence d’impuretés.

    Les études subaiguës et chroniques réalisées chez le rat montrent que les effets toxiques s’exercent essentiellement au niveau du foie ; on a notamment pu mettre en évidence, selon la dose et la durée du traitement, des changements morphologiques des cellules hépatiques, des augmentations du poids du foie et de certaines activités enzymatiques microsomales et des excrétions très accrues de porphyrine et d’acide δ-aminolévulinique [12 à 16].

    Chez les bovins, traités à la dose de 15 mg/kg/j per os pendant 42 jours, des lésions hépatiques existent également, mais elles sont plus discrètes que chez le rat [17, 18].

    Dans toutes ces études, l’hépatotoxicité du produit technique se révèle très supérieure à celle du produit pur ; elle est donc due, pour une large part, aux impuretés présentes.

    Effets génotoxiques

    Un seul résultat positif a été observé dans un test de mutation génique in vitro alors que d’autres tests in vitro et in vivo se sont révélés négatifs.

    In vitro

    Des résultats négatifs ont été obtenus dans un test de mutation génique sur bactéries (Salmonella typhimurium). Des résultats non significatifs ont été observés dans un essai d’aberration chromosomique. Cependant, un autre test in vitro sur Saccharomyces cerevisiae s’est révélé positif : aux plus fortes concentrations le pentachlorophénol peut favoriser les mutations géniques et recombinaisons intragéniques [19].
     

    In vivo

    Des résultats négatifs ont été obtenus dans un test de mutation létale récessive chez Drosophila melanogaster, dans un essai du spot test chez la souris ainsi que dans le test de l’hôte intermédiaire avec Salmonella typhimurium et Serratia marcescens.

    Les résultats disponibles concordent pour laisser penser que le pentachlorophénol ne provoque ni mutations ponctuelles (résultats négatifs dans le test d’Ames, dans le test des mutations létales récessives liées au sexe chez Drosophila melanogaster, dans le test de l’hôte intermédiaire avec Salmonella typhimurium et Serratia marcescens comme indicateurs ; résultats non significatifs dans le « spot test » chez la souris), ni aberrations chromosomiques (une seule étude négative avec le test de la dominance létale). En revanche, une étude in vitro avec Saccharomyces cerevisiae indique qu'à forte concentration, le pentachlorophénol peut dans certaines conditions favoriser les mutations génétiques et les recombinaisons intragéniques [19].

    Effets cancérogènes [5, 20, 21]

    Les résultats disponibles sont insuffisants pour une évaluation de la cancérogénicité du produit.

    Deux études de cancérogénèse réalisées par voie orale (2 ans chez le rat à des doses allant jusqu’à 30 mg/kg/j ; 18 mois chez la souris à 46 mg/kg/j pendant 4 semaines puis à 130 ppm dans la nourriture le reste du temps) n’ont pas montré d’influence du pentachlorophénol sur la fréquence des tumeurs, mais leur signification est limitée par le petit nombre d’animaux utilisés. Une troisième étude menée chez la souris par voie sous-cutanée (1 seule injection de 46 mg/kg) a montré, 74 semaines après l’injection, un nombre accru d’hépatomes chez les animaux traités mais, là encore, le petit nombre d’animaux et l’absence de détails rendent l’interprétation difficile. Il faut noter en revanche que certaines des impuretés parfois présentes dans le pentachlorophénol technique (2,4,6-trichlorophénol, 2 isomères de l’hexachlorodibenzo-p-dioxine) sont reconnues cancérogènes chez l’animal.

    Effets sur la reproduction

    Le pentachlorophénol est foetotoxique et tératogène (malformations du squelette) aux fortes doses et en présence de toxicité maternelle.

    Le pentachlorophénol est foetotoxique chez le rat, la dose sans effet se situant aux environs de 5 mg/kg. L’administration orale du produit à des doses supérieures à 15 mg/ kg, entre le 6ième et le 10ième jour de la gestation, entraîne une incidence accrue des résorptions embryonnaires ainsi que des oedèmes sous-cutanés et des anomalies du squelette chez le foetus [22]. Quelques effets tératogènes sont observés lorsque le produit est administré per os à 60 mg/ kg (dose toxique pour la mère) le 9ième ou le 10ième jour de la gestation [23]. Tous ces effets, plus marqués avec le produit pur qu’avec le produit technique, sont à imputer au pentachlorophénol lui-même.

    Le pentachlorophénol administré à la dose de 30 mg/kg/j per os à des rats mâles et femelles pendant 62 jours avant leur accouplement, puis aux femelles pendant le temps de la gestation et de l’allaitement, a provoqué une diminution du nombre de nouveau-nés et de leur poids, et une légère réduction du pourcentage des animaux viables. La fertilité des mâles ne semble pas affectée. Dans les mêmes conditions, la dose de 3 mg/kg/j per os est sans effet [24].

  • Toxicité sur l’Homme

    À des concentrations atmosphériques élevées, le pentachlorophénol provoque des effets graves neurologiques, hépatiques, surtout lors d’exposition cutanée. Il est également irritant pour les yeux, la peau et les voies respiratoires. Sur le long terme, le pentachlorophénol peut provoquer des dermatoses (chloracné). Certains effets hématologiques ou neurologiques peuvent être dus à des co-expositions. Aucune conclusion sur un risque cancérogène potentiel n’a pu être émise à partir des études épidémiologiques.

    Toxicité aiguë

    À des concentrations atmosphériques supérieures à 1 mg/m3, des aérosols de pentachlorophénol sont irritants pour les yeux, pour le nez et pour les voies aériennes supérieures ; une certaine accoutumance est possible puisque des personnes conditionnées peuvent supporter plus de 2 mg/m3.

    Les solutions ont une action irritante sur la peau, dès 10 % en cas d’exposition brève et isolée, dès 1 % en cas de contacts répétés ; elles peuvent provoquer des brûlures allant jusqu’à l’apparition de phlyctènes.

    À côté de ces effets locaux, on peut observer des intoxications légères dont les symptômes généraux sont surtout une asthénie plus ou moins marquée, avec perte d’appétit et amaigrissement.

    De nombreuses intoxications graves, certaines mortelles, ont été relatées dans la littérature pour des personnes professionnellement ou accidentellement exposées [29]. Après un début le plus souvent brutal, elles sont caractérisées par l’apparition de céphalées, sueurs, hyperthermie, tachycardie, dyspnée et, dans les cas sévères, par un coma hyperthermique et convulsif avec cytolyse hépatique dont la progression est rapide. Le tableau de l’intoxication associe, à des signes d’irritation des muqueuses, des signes d’atteinte hépatique, rénale, cardiaque et splénique.

    Dans la majorité des cas d’intoxication aiguë signalés, les voies cutanée et respiratoire étaient impliquées, mais on pense généralement que la voie cutanée est la plus importante. La dose létale dépend beaucoup de l’état général du sujet, notamment de son fonctionnement rénal, et de la température ambiante au moment de l’exposition.

    Toxicité chronique

    Il existe peu d’études larges et approfondies sur les effets à long terme du pentachlorophénol. En dehors de l’irritation des yeux et des voies aériennes supérieures déjà signalée au niveau aigu, l’exposition prolongée peut provoquer des dermatoses, et notamment une chloracné persistante. Cette affection, qui est peut-être due pour une bonne part aux impuretés qui accompagnent le pentachlorophénol (notamment à l’hexachlorodibenzo-p-dioxine), a été retrouvée fréquemment chez les travailleurs des établissements fabriquant le produit.

    Des perturbations mineures, ne traduisant jamais un désordre fonctionnel grave, ont été signalées aux niveaux hépatique, rénal, des organes hématopoiétiques, du système nerveux périphérique ou du système immunitaire, mais sans qu’il soit possible de conclure définitivement à une relation univoque entre leur apparition et l’exposition au pentachlorophénol. L’utilisation fréquente de solutions du produit dans des solvants organiques rend souvent difficile l’interprétation de ces perturbations.

    Des anomalies hématologiques, dont l’élément le plus constamment retrouvé est une neutropénie, ont été observées chez des travailleurs exposés à des préparations associant pentachlorophénol et lindane : des études expérimentales ont montré que le lindane est responsable de ces anomalies [30]. Cette neutropénie n’est franche qu’après exposition accidentelle importante.

    Effets génotoxiques

    Après culture de lymphocytes de 22 travailleurs exposés au pentachlorophénol, il a été mis en évidence une augmentation, faible mais significative, de la fréquence des anomalies chromosomiques [25, 31]. Une étude antérieure sur 6 travailleurs n’avait pas révélé d’anomalie.

    Effets cancérogènes

    Le pentachlorophénol n’a été mentionné spécifiquement que dans 2 cas de lymphomes cutanés chez des travailleurs employés à la fabrication du produit et dans 2 cas de maladie de Hodgkin et 7 cas de leucémie chez des personnes l’utilisant pour la protection du bois ou manipulant du bois traité. Aucune conclusion sur une éventuelle cancérogénicité du pentachlorophénol ne peut être tirée des études épidémiologiques publiées entre 1980 et 1986 et des études cas-témoins réalisées récemment en Suède, au Danemark et en Nouvelle-Zélande : celles-ci concernent des populations exposées essentiellement à d’autres produits et occasionnellement seulement au pentachlorophénol.

    Effets sur la reproduction

    Deux études ont recherché d’éventuels effets sur la reproduction : l’une au Canada, l’autre aux États-Unis. Aucune différence significative n’a été mise en évidence, en ce qui concerne les naissances, entre les femmes d’ouvriers exposés et les femmes d’ouvriers non exposés. On ne dispose en revanche d’aucune donnée sur des femmes personnellement exposées au produit pendant leur grossesse.

  • Interférences métaboliques
  • Cohérence des réponses biologiques chez l'homme et l'animal
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