Épurateurs d’air intérieur : des performances contrastées
Résultats d’une étude de l’INRS sur trois types d’appareils
Présenté comme une solution d’assainissement de l’air intérieur, le recours aux épurateurs s’est répandu depuis la pandémie de Covid-19. L’INRS a conduit une étude pour mesurer les performances de trois types d’appareils de filtration de bioaérosols disponibles sur le marché. Les conclusions mettent en évidence des résultats contrastés sur leur efficacité et une émission d’ozone pour l’un d’entre eux. À l’occasion de leur publication dans la revue Hygiène et sécurité du travail, trois questions à Fabien Gérardin, responsable d’études à l’origine de cette évaluation.
Quelle est l’origine de votre questionnement sur ces épurateurs d’air intérieur ?
Dans le cas des locaux de travail à pollution non spécifique – comme les bureaux ou les commerces – ne disposant pas de ventilation mécanique, le renouvellement de l’air est uniquement assuré par l’ouverture de fenêtres. Les épurateurs d’air dits « autonomes » constituent donc souvent un moyen complémentaire d’amélioration de la qualité de l’air pour les occupants. Ces épurateurs peuvent également être installés en complément d’une ventilation délivrant un débit d’air neuf conforme à la réglementation.
Au cours de la pandémie de Covid-19, ces appareils ont trouvé de nombreuses applications, mais suscitaient en parallèle des interrogations sur leurs performances réelles en matière d’assainissement de l’air. Pour répondre à ces préoccupations, l’INRS s’est équipé d’une cabine d’essai permettant d’étudier le comportement des épurateurs vis-à-vis des particules aéroportées (aérosols) dont les aérosols biologiques (bioaérosols). Des appareils exploitant trois principes d’épuration ont été testés : la filtration des particules, la filtration combinée à la photocatalyse et plasma froid, et l’ionisation. Le but de ces travaux était d’objectiver l’efficacité de ces technologies et d’explorer des pistes de prévention.
© IP/INRS/2022
Exemple d’épurateur installé dans une salle de réunion
Quels ont été les principaux enseignements de cette étude ?
Les mesures réalisées entre 2021 et 2022 ont permis de déterminer le débit d’air épuré des appareils et l’efficacité de filtration, afin d’apprécier les performances et l’innocuité des trois types d’épurateurs :
- épurateur à média filtrant : lorsque le média filtrant est mis en place de manière étanche dans le corps de l’appareil, il a été observé qu’un même débit d’air épuré (QAE) pouvait être obtenu avec des qualités de filtration très différentes. Il est essentiel que le QAE de l’épurateur soit renseigné en fonction du diamètre des particules ;
- épurateur associant média filtrant / photocatalyse / plasma froid / lampe UV-C : les mesures effectuées ont mis en évidence que ce procédé génère d’importantes quantités d’ozone et, dans une moindre mesure, de NO2, pouvant entraîner un dépassement des valeurs limites d’exposition. Ce type d’appareil n’est donc pas recommandé dans les locaux occupés. S’il est déployé en l’absence d’occupants, il sera nécessaire de s’assurer que la concentration résiduelle d’ozone est compatible avec une reprise d’activité dans les locaux ;
- ioniseur : l’ioniseur testé présente un débit d’air épuré (QAE) qui permet d’envisager une élimination efficace des particules de l’air dans la durée, soit sur plusieurs heures de fonctionnement. La production d’ozone de l’appareil testé était insignifiante, mais ce n’est pas forcément le cas de tous ces appareils. Les limites de cette technologie reposent sur son principe, qui vise à transférer des particules de l’air sur les parois du bâtiment. Or, ce transfert de contamination n’est pas souhaitable dans le cas des bioaérosols.
Les résultats de ces mesures ont été communiqués aux fabricants de ces matériels, dans une optique d’amélioration.
Dans la continuité de ces travaux, l’étude se poursuit avec l’objectif de faire avancer la connaissance sur les conséquences en termes d’efficacité et de production d’éventuels sous-produits pour la décomposition de composés organiques volatils (COV) présents dans l’air.
Comment mieux appréhender cette question de qualité de l’air intérieur ?
À ce jour et compte tenu de l’avancement des connaissances sur les performances et l’innocuité des épurateurs autonomes disponibles sur le marché, il est conseillé de privilégier des appareils équipés de média filtrant HEPA mis en place de manière étanche. Un appareil à média filtrant qui délivre un débit d’air épuré adapté au volume de la pièce contribuera à réduire significativement la concentration en (bio)aérosols. Toutefois, ces épurateurs ne sont pas tous équipés de moyens de décontamination de leur média filtrant, il est donc important de prendre en considération la possible exposition des personnes en charge de la maintenance de ces appareils.
Enfin, il convient de rappeler que le recours à des épurateurs dits autonomes dans des espaces de travail doit venir en complément d’un apport d’air neuf, en accord avec l’article R. 4222-6 du Code du travail.
L’article paru dans la revue Hygiène et sécurité du travail détaille la méthodologie employée et les résultats obtenus. La diffusion de ces travaux auprès des concepteurs, des préventeurs et des utilisateurs vise à contribuer à alerter sur les sources d’émissions pouvant contaminer l’air intérieur, et à agir dès la conception de locaux tertiaires ou lors de leur modification ou adaptation, comme cela a été le cas lors de la pandémie.