Foire aux questions
Questions-réponses sur les bitumes
Des réponses aux questions les plus fréquemment posées sur les risques professionnels liés aux bitumes dans les travaux d’enrobés routiers.
-
Qu’est-ce que le bitume ?
Obtenu lors de la distillation du pétrole, le bitume est un mélange d’hydrocarbures lourds, voire très lourds, car il est solide à température ambiante. Il ne doit pas être confondu avec le goudron qui est issu de la transformation de la houille. Le goudron est mille fois plus riche en substances CMR (cancérogène, mutagène, reprotoxique) que le bitume. Utilisé à tort pour nommer l’enrobé routier, le terme « bitume » ne désigne en réalité que l’un des composants de l’enrobé routier, où il joue le rôle de liant (de colle en quelque sorte). Le bitume rentre également dans la composition de l’asphalte et des membranes d’étanchéité.
-
Le bitume présente-t-il un risque ?
À température ambiante, les produits bitumineux ne présentent pas de dangers. En revanche, lors de leur mise en œuvre à des températures atteignant plusieurs centaines de degrés Celsius, des fumées de bitume sont dégagées. Composées de différents hydrocarbures (linéaires, cycliques, aromatiques, polyaromatiques, etc.) contenant généralement entre 9 et 40 atomes de carbone, ces fumées sont susceptibles de contenir des substances cancérogènes, notamment certains hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP).
Ainsi, la mise en œuvre des bitumes oxydés dans l'étanchéité toiture est classée 2A, probablement cancérogène pour l'homme, par le Circ (Centre international de recherche contre le cancer). La mise en œuvre des bitumes durs (bitumes modifiés intégrant des polymères) et leurs émissions lors des travaux d’asphalte coulé sont classées 2B, cancérogènes possibles pour l’homme, par le Circ. L’exposition aux fumées de bitume lors de la mise en œuvre des enrobés routiers est classée 2B, cancérogène possible pour l’homme, par le Circ.
Il est néanmoins difficile d'estimer le risque. L'exposition aux fumées de bitume dépendant du type de bitume, de la nature et de la quantité d'additifs, des conditions atmosphériques, du poste occupé par l'opérateur, etc.
-
Existe-t-il une valeur limite d’exposition (VLEP) aux fumées de bitume ?
Il n’existe pas de valeur limite d’exposition professionnelle (VLEP) proprement dite. En revanche, les organismes de prévention (INRS, Caisse nationale d’assurance maladie, Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics), les pouvoirs publics (Direction générale du travail) et le syndicat professionnel du secteur (Routes de France) ont établi et validé une grille d’interprétation des valeurs d’exposition.
Les valeurs de la grille d’interprétation ne sont pas associées à un effet sur la santé mais représentent des indices d’efficacité des moyens de prévention mis en place. Ces indices, qui sont liés à ce qu’il est techniquement possible de faire aujourd’hui en matière de prévention, permettent d’inciter les professionnels à adopter les solutions de prévention efficaces et à intégrer toute nouvelle avancée technologique.
-
Quels sont les moyens de prévention applicables sur le terrain ?
L’une des voies d’exposition aux fumées de bitume est l’inhalation. Parmi les approches concrètes de prévention sur le terrain, le respect des températures de consigne pour les enrobés routiers ou encore mieux, l’emploi d’enrobés tièdes sont des solutions efficaces pour réduire l’émission des fumées de bitume (diminution de 1/3 de l’exposition environ). Une autre approche complémentaire est l’emploi de systèmes de captage à la source des émissions (les finisseurs routiers équipés de captage diminuent l’exposition de moitié environ).
Voir l’article de Travail et sécurité « Travaux routiers. À basse température, le bitume fume moins » pour des exemples réels d’utilisation de moyens de prévention.
Voir l’article d’Hygiène et sécurité du travail « Travaux de revêtement routier : de multiples risques à prendre en compte » pour constater l’efficacité de ces moyens de prévention.
-
Quelles solutions de prévention peuvent-être mise en place pour les chantiers de petite taille ?
Sur les chantiers de dimensions réduites, où le captage des fumées et l’emploi d’enrobés tièdes ne sont pas possibles, il existe d’autres solutions. Afin de limiter la production des fumées et donc l’exposition, il faut privilégier l’emploi d’émulsions aqueuses tièdes ou froides. En revanche, l’exposition cutanée peut être plus importante ; il faut donc être vigilant sur les mesures d’hygiène et s’assurer que les opérateurs portent des vêtements couvrants.
-
Faut-il porter un masque (et de quel type ?) pour se protéger des fumées de bitume ?
Il faut avant tout privilégier les moyens de protection collective conseillés par l'INRS et les professionnels : emploi de bitume tiède, captage des fumées sur les finisseurs, ventilation des chantiers confinés, etc.
La protection individuelle ne doit être utilisée qu’en complément. Les gants multicouches et les vêtements couvrants sont recommandés pour la protection cutanée.
En fonction de l’évaluation des risques, il peut être décidé de faire porter des appareils de protection respiratoire. Dans ce cas, en extérieur, des appareils de protection respiratoire munis de filtres A2P2 minimum sont recommandés pour des situations spécifiques de courte durée. L'emploi d'appareils de protection respiratoire type cagoule à ventilation assisté TH3A2P ou masque à ventilation assisté TM3A2P est recommandé pour des opérations de longue durée ou pour les chantiers confinés.
-
Quels produits peut-on utiliser comme débituminant en substitution du gasoil ou du fuel ?
Il existe sur le marché des débituminants moins dangereux que le fuel ou le gasoil, par exemple issus de matière végétales. Ce sont des esters méthyliques d'acides gras linéaires ou ramifiés, saturés ou non, dont certains peuvent être des irritants légers. L'INRS a étudié en 2011 la dégradation d'un de ces débituminants. À partir de 125 °C environ, ce débituminant peut se dégrader et dégager des produits dangereux comme les aldéhydes. Il faut donc être vigilant de façon à éviter de les surchauffer.
D’un point de vue pratique, sur un chantier de revêtement routier, ces produits sont généralement utilisés sur des surfaces dont la température est inférieure à 125 °C. En revanche, lorsque les débituminants sont utilisés sur des surfaces plus chaudes (le dessous de la table de compactage, le tapis convoyeur ou les joues intérieures du finisseur par exemple), les vapeurs dégagées sont proportionnelles à la quantité appliquée. Lors des activités à l’air libre, l’éloignement des opérateurs des surfaces aspergées de débituminant peut suffire à éviter l’exposition.
Dans les espaces confinés ou lors d’expositions potentiellement élevées aux produits de dégradation, des produits stables jusqu'à 140 °C, sont conseillés. Si cela n’est pas possible, les opérateurs devront porter des appareils de protection respiratoire filtrants équipés de cartouches A. Dans tous les cas, un produit issu de matières premières renouvelables n’est pas exempt de danger et un produit non classé dangereux ne dispense pas des mesures de prévention des risques, qu’elles soient collectives ou individuelles.
-
Quel est le risque amiante associé aux revêtements routiers ?
Les revêtements routiers appliqués aujourd’hui ne contiennent pas d’amiante. Certaines formulations d’enrobés routiers, mises en œuvre jusqu’en 1995, contenaient des fibres d’amiante (à hauteur de 1 % en masse environ). L’exposition à l’amiante est susceptible de se produire lors du retrait de ces revêtements. Il est nécessaire, avant travaux, de procéder à une caractérisation des enrobés routiers pour repérer en particulier la présence de l’amiante (repérage obligatoire, il est recommandé d’appliquer la norme NF X 46-102) et des HAP.
En cas de présence d’amiante, la règlementation du code du travail (articles R. 4412-94 et suivants) doit être appliquée. Les entreprises chargées des travaux de retrait et d'encapsulage doivent obtenir une certification auprès des organismes certificateurs accrédités. Les travailleurs susceptibles d’être exposés à l’amiante doivent au préalable recevoir une formation spécifique à la prévention des risques liés à l'amiante, adaptée à la nature de l’opération et à leur fonction. Ils sont soumis à une surveillance individuelle renforcée de leur état de santé.
Voir l’article d’Hygiène et sécurité du travail « Exposition à l'amiante chrysotile lors de travaux sur chaussée amiantée » pour avoir une idée des niveaux d'exposition professionnelle et environnementale aux fibres d'amiante lors de ces travaux.
Voir la brochure « Exposition à l'amiante lors du traitement des déchets » (ED 6028) pour découvrir les principales mesures de protection collective, à savoir le dimensionnement approprié de l'emprise du chantier et son isolement vis-à-vis de son environnement (pouvant aller jusqu’au confinement), l'arrosage de la zone de travail, le captage à la source des poussières émises, le travail à l’humide et la gestion des déchets au fur et à mesure de leur production.
Pour en savoir plus, consultez le dossier web « Amiante » ou la fiche de prévention « Rabotage ».
-
Quel serait le suivi médical à conseiller pour les travailleurs intervenant lors de la pose des enrobés routiers bitumineux ?
Les travailleurs réalisant la pose des enrobés routiers bitumineux bénéficient d’un suivi individuel renforcé, du fait de la présence de faibles quantités de benzo(a)pyrène (substance classée dans la catégorie 1B de cancérogénicité en Europe) dans les fumées de bitume. Le contenu du suivi de l’état de santé est défini en fonction du résultat de l’évaluation globale des risques professionnels liés au poste de travail.
L’examen médical d’aptitude à l’embauche est notamment l’occasion pour le médecin du travail d’informer le travailleur sur les risques liés à son poste de travail et sur les moyens de prévention nécessaires. Le médecin du travail vérifie la compatibilité du poste avec l’état de santé du travailleur et propose les aménagements nécessaires le cas échéant. Il est recommandé d’éviter d’exposer les sujets atteints d'affections cutanées, oculaires, cardiaques ou respiratoires chroniques. L’examen clinique à l’embauche peut éventuellement être complété par des examens complémentaires tels qu’une radiographie de thorax ainsi que des explorations fonctionnelles respiratoires, qui servent d’examens de référence. La nécessité de prescrire ces examens ainsi que leur fréquence est déterminée par le médecin du travail en fonction de l’évaluation des risques. Lors des visites médicales ultérieures, le médecin du travail recherche plus particulièrement des signes d’atteintes cutanée ou respiratoire.
La présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques dans les fumées de bitume peut justifier la réalisation d’une surveillance biologique des expositions, en particulier lors de fortes expositions (températures de mise en œuvre élevées, confinement, absence de mesures de protection des travailleurs, etc.). Le choix des indicateurs biologiques et des modalités de cette surveillance biologique est déterminé par le médecin du travail, en fonction de la nature et des conditions de l’exposition.