Le registre des accidents du travail bénins : quelles obligations ?
Tous les accidents survenant dans le cadre du travail ne donnent pas nécessairement lieu à des soins médicaux ou à un arrêt de travail. Ces accidents, a priori sans gravité, sont couramment qualifiés de « bénins ». Signaler ces accidents dans un registre prévu à cet effet permet aux salariés de conserver leurs droits en cas d’aggravation de leur état après l’accident. En outre, ce registre présente l’avantage d’informer l’employeur des risques qu’il est nécessaire de traiter avant qu’un accident plus grave ne survienne.
Quelles sont les conditions à respecter pour mettre en place un registre des accidents bénins ?
Pour mettre en place un registre des accidents bénins, l’employeur doit préalablement en avoir avisé le comité social et économique (CSE) lorsqu’il existe et répondre aux trois conditions cumulatives suivantes prévues par le Code de la Sécurité sociale :
- justifier de la présence permanente d'un médecin, ou d'un pharmacien, ou d'un infirmier diplômé d'État, ou d'une personne chargée d'une mission d'hygiène et de sécurité dans l'entreprise détentrice d'un diplôme national de secouriste complété par le certificat de sauveteur secouriste du travail délivré par l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS) ou les caisses d'assurance retraite et de la santé au travail (Carsat) ;
- avoir un poste de secours d’urgence ;
Poste de secours d’urgence |
- respecter ses obligations concernant la constitution du CSE pour les entreprises d’au moins 11 salariés.
Le registre est la propriété de l’employeur qui le conserve pendant une durée de cinq années à compter de la fin de l’exercice considéré. Par exemple, un registre établi en 2022 doit être conservé jusqu’en fin d’année 2027.
Aucune condition particulière tenant au formalisme n’est exigée. L’employeur peut donc conserver, pour chaque année civile, le registre sur un support papier ou sous une forme dématérialisée. Le seul formalisme imposé concerne l’obligation d’y faire mentionner la signature de la victime et du donneur de soins.
Depuis le 1er mai 2021, l’employeur n’a plus besoin de l’autorisation préalable de la Carsat pour tenir un registre des accidents bénins. Il doit néanmoins informer cette dernière de l’ouverture du registre, sans délai et par tout moyen conférant date certaine.
À noter |
Pour aider les employeurs, un modèle de registre des accidents du travail bénins est téléchargeable depuis le site Internet de l’Assurance maladie.
Quels accidents inscrire dans le registre ?
L’inscription d’un accident dit « bénin » dans le registre concerne uniquement les accidents sans gravité, d’ordre physique ou psychologique, n’entraînant ni arrêt de travail ni soins médicaux donnant lieu à une prise en charge par les organismes de Sécurité sociale.
L’accident doit être porté dans le registre dans les 48 heures qui suivent sa survenance, sans compter les dimanches et jours fériés.
Le registre des accidents bénins ne peut être utilisé que pour les accidents subis par les salariés de l’entreprise. De ce fait, les accidents bénins du personnel des entreprises intervenantes ou du personnel intérimaire en mission dans l’entreprise ne peuvent pas être inscrits dans ce registre
L’existence d’un registre des accidents bénins dispense-t-elle systématiquement l’employeur d’une déclaration d’accident du travail ?
L’inscription d’un accident dans le registre des accidents bénins remplace la déclaration d’accident de travail dès lors que l’accident rempli les conditions précisées ci-dessus.
Cependant, si l’état de santé du salarié s’aggrave suite à cet accident et que le salarié est amené à consulter un professionnel de santé en dehors de l’entreprise, l’employeur devra alors établir la déclaration d’accident du travail et l’adresser à la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Il pourra alors préciser dans sa déclaration que l’accident avait initialement fait l’objet d’une inscription au registre des accidents bénins. Cela permettra à l’employeur de ne pas être tenu responsable du décalage entre la date de l’accident et la date de déclaration à la CPAM, qui est, en principe, passible d’une amende.
En cas d’incertitude quant à la matérialité d’un accident bénin ou d’une lésion, ou de sa survenance aux temps et aux lieux du travail, il est conseillé d’établir une déclaration d’accident du travail selon la procédure habituelle, ceci afin de garantir les droits des salariés et de l’employeur.
Il convient de rappeler que lorsque l’entreprise n’a pas mis en place un tel registre, tout accident, même bénin, doit faire l’objet d’une déclaration d’accident du travail à la CPAM selon la procédure habituelle.
Quelles informations doivent figurer dans le registre ?
L’employeur doit pouvoir présenter, « sans difficulté d’utilisation et de compréhension et sans risque d’altération », certaines mentions dans le registre, à savoir :
- le nom de la victime ;
- la date de l’accident ;
- le lieu ;
- les circonstances de l’accident ;
- les éventuels témoins ;
- la nature et le siège des lésions ;
- les signatures du donneur de soins et de la victime.
Concernant la signature du donneur de soins ainsi que de celle de la victime, ces dernières doivent apparaître en face des indications de l’employeur, afin de bien mettre en corrélation les circonstances de l’accident, le lieu, la date, etc. avec l’identité du salarié victime et celle du donneur de soins qui est intervenu.
Qui peut consulter le registre ?
Le registre des accidents bénins doit être tenu à la disposition :
- des agents de contrôle des organismes chargés de la gestion des accidents du travail et des maladies professionnelles ;
- des ingénieurs conseils et contrôleurs de sécurité dûment habilités auprès des Carsat ;
- de l'inspection du travail ;
- du CSE.
Le médecin du travail et la victime peuvent également avoir accès au registre.
Seules ces personnes y ont accès, dans le respect du secret professionnel. En effet, en prenant connaissance des éléments mentionnés dans le registre, celles-ci ne doivent pas divulguer les informations personnelles concernant des salariés dont elles auraient connaissance dans le cadre de leurs fonctions.
Un salarié de l’entreprise (sauf s’il est membre du CSE) ne peut donc le consulter sans intérêt légitime.
À noter Le fait de ne pas informer le CSE ou de ne pas mettre à sa disposition le registre est susceptible de constituer un délit d’entrave à son fonctionnement. |
Quelles sont les modalités de contrôle et les sanctions encourues ?
Lorsqu'un agent de contrôle de la Sécurité sociale, un ingénieur conseil ou un contrôleur de sécurité dûment habilités auprès des Carsat, ou un inspecteur du travail constate l'un des manquements suivants, il en informe l’employeur et les autres agents :
- de la tenue incorrecte du registre ;
- du non-respect des conditions préalables à la mise en place du registre ;
- du refus de présentation du registre aux agents de contrôle de la Sécurité sociale, ou aux ingénieurs conseils ou contrôleurs de sécurité dûment habilité auprès des Carsat, ou aux agents de l’inspection du travail ; ainsi qu’au CSE ou à la victime.
Tant que l’un de ces manquements perdure, toute inscription dans le registre reste sans effet. L’employeur doit alors déclarer chaque accident à la CPAM selon la procédure habituelle.
L’employeur encourt également des sanctions civiles et des sanctions pénales.
Sur le plan pénal, l’employeur qui n’a pas inscrit dans le registre prévu à cet effet les accidents bénins du travail ou qui n’a pas mis le registre à disposition des personnes habilitées est passible d’une amende prévue pour les contraventions de 4e classe (750 €). En cas de récidive dans l’année, l’amende peut être portée au montant de celle prévue pour les contraventions de 5e classe (1 500 €).
Sur le plan civil, la CPAM peut recouvrer auprès de l’employeur la totalité des dépenses faites à l’occasion d’un accident du travail qui n’a pas été déclaré, qui n’a pas été inscrit sur le registre des accidents bénins ou dont l’aggravation n’a pas été adressée à la CPAM.
La CPAM peut également prononcer une pénalité financière si un manquement de l’employeur à ses obligations est constaté.
Références juridiques
Voir aussi
-
Focus juridiques 04/2020
-
Dossier 09/2022