Conduite d’un véhicule pour le travail : quelles obligations pour le salarié et l’employeur ?
De nombreux salariés conduisent un véhicule dans le cadre de leur travail, que cela soit de façon occasionnelle ou régulière (commerciaux, artisans, conducteurs routiers…). L’employeur peut-il avoir connaissance du relevé de points ? Le salarié doit-il informer son employeur d’une éventuelle suspension ou annulation de son permis ? Le point sur les obligations pour le salarié et l’employeur.
Tous les véhicules nécessitent-ils la détention d’un permis spécifique pour leur conduite ?
A chaque type de véhicule sa catégorie de permis de conduire.
Les différentes catégories de permis de conduire et de véhicules étant précisées aux articles R. 221-4 et R 221-7 du Code de la route. Par exception, la conduite de certains véhicules, ne nécessite pas de permis de conduire. Il s’agit essentiellement de véhicules dont la vitesse maximale par construction est faible et qui, pour certains d’entre eux, ne sont pas destinés principalement au transport mais à des usages particuliers (à titre d’exemples, certains engins de travaux publics, de manutention automoteurs, ou encore certains cyclomoteurs ou quads).
Enfin, d’autres véhicules s’ils ne nécessitent pas de permis de conduire, ne peuvent être conduits qu’après une formation (cyclomoteurs, quadricycles légers notamment).
À noter :
L’obligation de détention du permis de conduire, quand elle s’impose, s’applique aussi bien sur les voies ouvertes à la circulation publique que dans les lieux privés (entreprises, parkings privés).
Comment l’employeur peut-il vérifier la détention du permis de conduire par le salarié ?
Dans le cadre de la démarche de prévention du risque routier, l'employeur qui affecte un salarié à un poste de travail impliquant la conduite d'un véhicule automobile, doit s'assurer que ce dernier est bien en possession d'un permis en cours de validité et correspondant à la catégorie requise. Le salarié interrogé par l'employeur sur sa détention effective d'un permis de conduire doit répondre de bonne foi, à partir du moment où la possession d'un tel document présente un lien direct avec l'emploi qu’il est amené à occuper. Une clause du contrat de travail peut rappeler au salarié que la détention d’un permis est nécessaire à son activité professionnelle. Enfin, il appartient à l'employeur de vérifier périodiquement que ses chauffeurs sont toujours titulaires du permis de conduire, en se faisant présenter matériellement le titre officiel, avant un départ en mission à bord d'un véhicule de l'entreprise par exemple ou de façon régulière.
À noter :
Le permis détenu par un conducteur est unique et sert donc à la fois pour conduire un véhicule, dans le cadre de son travail ou pour un usage personnel, dans le cadre de sa vie privée.
L’employeur peut-il avoir connaissance du relevé de points ?
Le permis de conduire est affecté au départ d’un capital de 12 points. Ce capital est réduit de plein droit lorsque le titulaire du permis commet une infraction, pour laquelle une réduction est prévue, que celle-ci ait été commise à l’occasion du travail, ou lors d'un déplacement privé. Le salarié qui commet une infraction à la circulation routière peut donc se voir retirer des points sur son titre de conduite et voir, à terme, celui-ci annulé ou suspendu. Il est toutefois le seul informé du solde de points qu'il détient sur son permis de conduire et il n'a aucune obligation d'informer son employeur à ce sujet. Les informations relatives au nombre de points détenus par le titulaire d'un permis de conduire ne peuvent pas être collectées par les employeurs.
La situation est différente, toutefois, dans les entreprises de transport routier. Dans celles-ci, des salariés habilités et nommément désignés, peuvent, en effet, dans certaines conditions et dans le cadre de leurs attributions, avoir accès notamment aux informations relatives à l'existence, la catégorie et la validité du permis de conduire, à l'exclusion du nombre de points affectés au conducteur.
Le salarié doit-il informer son employeur d’une éventuelle suspension ou annulation de son permis ?
Il n’existe pas d’obligation légale de prévenir son employeur d’un retrait ou d’une suspension du permis. Toutefois, le salarié qui dissimulerait à son employeur le retrait de son titre de conduite et qui continuerait à conduire un véhicule de l’entreprise, dans l’exercice de son activité professionnelle, commettrait une faute que l’employeur serait en droit de sanctionner. Le salarié pourrait en effet, être considéré dans ce cas, comme manquant à son obligation de loyauté et d’exécution de bonne foi de son contrat de travail. Certains contrats de travail ou une note de service dans l’entreprise, peuvent, d’ailleurs, imposer aux conducteurs d’informer immédiatement l’entreprise de toute décision de suspension ou d’annulation de leur permis.
Dans ce contexte, le salarié privé de permis a donc tout intérêt à prévenir son employeur afin de privilégier le dialogue. Ce dernier, correctement informé, pourra éventuellement proposer au salarié une solution de reclassement temporaire ou d’autres modalités d’exécution de son contrat.
Le retrait de permis du salarié a-t-il une incidence sur son contrat de travail ?
La suspension ou l’annulation du permis de conduire, même consécutive à des faits relevant de la sphère privée, peuvent avoir une incidence sur le contrat de travail du salarié, dès l’instant où son activité professionnelle implique la conduite d'un véhicule. Celui-ci, privé de son permis, peut se trouver alors dans l'impossibilité de remplir les obligations prévues par son contrat de travail.
Bien que le retrait ou la suspension du permis du salarié n’entraînent aucune rupture ou suspension automatique de son contrat de travail, l’employeur qui en a connaissance ne doit en aucun cas le laisser continuer à conduire. Il conviendra alors de trouver des solutions pour pallier l’impossibilité du salarié de remplir ses obligations professionnelles, en envisageant par exemple son reclassement temporaire par une affectation à un autre poste de travail ou la liquidation de tout ou partie de ses congés acquis (congés payés, repos compensateurs...). Des mesures de protection spécifiques du salarié privé de son permis de conduire existent même dans certains accords collectifs.
En tout état de cause, pour pouvoir rompre le contrat de travail d’un salarié privé de permis de conduire, l’employeur devrait justifier de l'impossibilité objective du salarié de remplir ses obligations contractuelles et du fait que l'essentiel de l’activité de celui-ci consiste bien dans la conduite de véhicules.
L’employeur peut-il sanctionner pour faute disciplinaire, le salarié privé de permis de conduire ?
La jurisprudence considère que la suspension du permis de conduire d’un salarié, consécutive à la commission d’infractions au Code de la route, ne caractérise pas de façon automatique un manquement de l'intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail, que l’employeur serait en droit de sanctionner de façon disciplinaire.
Les juges vérifieront, dans ce cas, si les infractions à l’origine du retrait de permis, ont été commises pendant son temps de travail ou dans le cadre de sa vie personnelle. Dans ce contexte, le retrait de permis consécutif à une infraction commise en dehors de l’exécution du contrat de travail, serait considéré comme un fait de la vie privée du salarié, qui ne pourrait donner lieu à une sanction disciplinaire de la part de l'employeur, dès lors qu'il ne constituerait pas un manquement aux obligations professionnelles de celui-ci.
Quelles sont les responsabilités encourues en cas de conduite sans permis de conduire valable ?
En ce qui concerne le conducteur, le Code de la route prévoit que la conduite d'un véhicule sans permis de conduire est punie de deux ans d'emprisonnement et de 4 500 euros d'amende. De plus, si le conducteur est à l'origine d'un accident corporel, le fait de ne pas être en possession du permis requis sera regardé comme une circonstance aggravante et les peines encourues pour atteinte à l'intégrité de la personne s'en trouveront alourdies.
En ce qui concerne l’employeur, le Code civil lui fait obligation de réparer les dommages aux tiers, sur la route ou ailleurs, causés par ses salariés au moment où ils exécutent leur travail. Ainsi, si le salarié conducteur d'un véhicule est responsable d'un accident et qu'il cause des dommages matériels ou corporels à un tiers, c'est à l'employeur qu'il incombera de les réparer. En matière de conduite, cette responsabilité civile est couverte, en principe, par l'assureur du véhicule. Le Code des assurances prévoit toutefois que le contrat d'assurance peut comporter des clauses prévoyant une exclusion de garantie dans les cas où, au moment du sinistre, le conducteur ne possède pas le permis de conduire requis et valide. Dans ce cas, l’assureur couvrira les dommages causés aux tiers par le salarié et se retournera ensuite contre l’entreprise assurée pour se faire rembourser.
Références juridiques :
- Code de la route, articles L. 221-2, L. 223-7, L. 224-1, . L. 224-16, L. 225-5, R. 221-1-1, R. 221-4, R. 221-7, R. 221-10, R. 225-5
- Code du Travail, articles L. 1222–1, L.1221-6
- Code civil, article 1242 alinéa 5
- Code des assurances, art. R. 211-10
- Arrêté du 29 juin 1992 portant création du Système national des permis de conduire modifié.
Voir aussi
-
publications 04/2020
-
Article de revue 05/2022 | TS837page44
Les conditions de circulation d'engins de travaux publics sur route
-
Article de revue 02/2021 | TS823page44
Utilisation d'un véhicule au travail : obligations d'entretien et responsabilités