Robotique collaborative : enjeux en termes de santé et sécurité

Dans le contexte actuel « d’industrie du futur » où les entreprises sont amenées à transformer leurs systèmes de production, notamment pour une plus grande flexibilité, de nouvelles technologies émergent. Parmi celles-ci, la robotique collaborative est considérée comme un moyen de combiner le savoir-faire humain à l'endurance/force des robots. Classiquement, les robots collaboratifs sont décrits comme effectuant les tâches répétées ou pénibles tandis que les opérateurs réalisent les tâches à plus haute valeur ajoutée. Avant même les enjeux de flexibilité et de productivité, les entreprises abordent ces technologies comme des dispositifs d’assistance physique dans le cadre de la prévention des troubles musculosquelettiques. Cependant, l'introduction de la robotique collaborative constitue un changement de paradigme important puisque l’opérateur et le robot se trouvent à collaborer dans un contexte de proximité physique (sans être séparés par des barrières), ce qui suscite des interrogations en termes de santé et sécurité. Dans ce contexte, L’INRS a conduit une étude pluridisciplinaire (ingénierie et ergonomie) pour identifier les conséquences de l’introduction de la robotique collaborative en entreprise. Cette étude était structurée selon deux volets : 1/ L’objectif du premier volet était d’identifier les conséquences de l’introduction de la robotique collaborative sur l’activité des opérateurs. Pour cela, deux interventions en entreprises ont été réalisées pour lesquelles des méthodes d’analyse ergonomique (observations instrumentées de l’activité des opérateurs et réalisation d’entretiens) ont été déployées. Ces données ont été complétées par des entretiens et observations du poste de travail conduits par l’équipe d’ingénieurs en charge d’évaluer les risques techniques. Les résultats ont montré que l'interaction avec les robots collaboratifs modifiait l'activité mentale et physique des opérateurs, mais aussi l’organisation de l’ensemble de la chaine de production. A titre d’exemple, les opérateurs ressentaient moins de douleurs physiques et de fatigue et avaient plus de temps pour gérer leur travail (meilleure anticipation et régulation des incidents). Le contenu de leur travail s'est amélioré avec des tâches à forte valeur ajoutée. La question de l’acceptation a été également appréhendée. Cependant, une vigilance est nécessaire car des risques physiques de contact et de choc ont également été observés. 2/ Le deuxième volet consistait en une étude expérimentale conduite par l’équipe pluridisciplinaire. Les objectifs étaient d’analyser les modifications de l’activité cognitive (charge mentale et stratégies cognitives, par exemple) des sujets passant d’une collaboration Homme-Homme à une collaboration Homme-Robot collaboratif et d’identifier de nouveaux points de vigilance relatifs aux différentes fonctions de sécurité et des moyens de protection lors de l’intégration de ce type de technologie en entreprise (par exemple paramétrage des limites d’effort et de puissance du robot, délimitation des zones de sécurité en fonction des modes de collaboration). Pour cela, un ilot flexible expérimental représentatif d’une activité industrielle (tâche d’assemblage) a été développé. Ce dernier comprenait un poste de travail manuel et un second pouvant être manuel ou automatisé par l’utilisation d’un robot collaboratif. Les données ont été recueillies sur 31 participants et sont en cours d’analyse. En conclusion, il apparait, d’une part, que la robotique collaborative va transformer l’activité des opérateurs et impacter le travail collectif et les organisations et, d’autre part, qu’elle peut conduire à l’émergence des risques nouveaux ou mal maîtrisés. En termes de prévention des risques professionnels, les résultats de cette étude pluridisciplinaire aideront à définir des points de vigilance et des solutions techniques et organisationnelles à destination des préventeurs, intégrateurs et des entreprises qui font le choix de la robotique collaborative.