Utilisation progressive d’un exosquelette d’assistance des épaules lors de tâches de manutention manuelle

- INTRODUCTION : Les exosquelettes professionnels sont considérés comme de potentielles solutions pour réduire la charge physique des travailleurs effectuant des tâches de manutention manuelle. En effet, une réduction des activités musculaires peut être observée lors de leur utilisation [1]. Cependant, la littérature manque encore d'études de terrain reflétant des situations réelles de travail [2]. Par ailleurs, les entreprises acquièrent souvent des exosquelettes sans envisager un processus de familiarisation à leur utilisation, augmentant ainsi le risque d'échec dans l'intégration de ces dispositifs d’assistance [3]. Cette étude avait pour objectif d’évaluer sur le terrain les changements d'activités musculaires et de perception de l’acceptation lors de l'utilisation d'un exosquelette passif d’assistance des épaules avant et après une période de familiarisation de 5 semaines. METHODES : Dix travailleurs d'une entreprise de logistique danoise (INT, groupe intervention) ont suivi une période de familiarisation de 5 semaines à l'utilisation progressive d'un exosquelette passif d'assistance des épaules (de 7,5 h/semaine à 37 h/semaine), tandis que dix autres travailleurs ont servi de groupe contrôle (CON), sans familiarisation. Des tests ont été effectués avant et après la période de familiarisation. Ils impliquaient la réalisation de quatre tâches de travail (basées sur des observations du travail habituel) consistant à soulever des marchandises d'une étagère à un camion avec l'exosquelette (EXO) et sans (NoEXO). L'électromyographie de surface (sEMG) des muscles érecteurs du rachis, deltoïdes antérieurs et trapèzes supérieurs a été enregistrée bilatéralement. L'effort perçu et l’acceptation de l'exosquelette ont été évalués à l'aide de l’échelle CR10 de Borg et d'un questionnaire. L'amplitude sEMG a été normalisée par rapport à des contractions volontaires maximales, et les 10ème et 90ème percentiles ont été calculés. Des RM-ANOVA bidirectionnelles ont été menées pour évaluer les effets de l'exosquelette et de la familiarisation. RÉSULTAT : Aucun effet de la période de familiarisation n'a été révélé pour l'amplitude sEMG et l'effort perçu. L'utilité perçue (p<.001), les émotions (p<.001) et le confort (p=.005) de l'exosquelette ont diminué pour les groupes INT et CON après la période de 5 semaines. L'utilisation de l’EXO a entraîné des diminutions significatives des 10ème et 90ème percentiles de l'amplitude sEMG des muscles deltoïdes antérieurs et du 10ème percentile des muscles trapèzes supérieurs dans toutes les tâches de travail (p < 0,05). Par ailleurs, des diminutions de l’effort perçu ont été révélées lors des tâches imposant une manutention au-dessus de la hauteur des épaules (p = 0,003). CONCLUSION : L'exosquelette a réduit les activités musculaires au niveau du cou et des épaules, ainsi que l'effort perçu, comme précédemment rapporté dans la littérature. D'autre part, la perception de l’acceptation de l'exosquelette a également diminué à l’issu de la période de familiarisation. Cela illustre bien que la mise en œuvre durable d'un exosquelette d'assistance des épaules est un réel défi pour cette entreprise. Ce travail montre également l'importance d'une approche holistique lors de l’intégration d'exosquelettes dans des situations de travail réelles.